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Manger son placenta reste une pratique courante en Chine


Manger son placenta reste une pratique courante en Chine
SHANGHAI, 25 juin 2012 - Après son accouchement, Wang Lan a ramené chez elle sa petite fille tout juste née, ainsi que son placenta qu'elle envisage de déguster bientôt en soupe, selon une pratique séculaire de la médecine traditionnelle chinoise.

Les qualités présumées des placentas en tant qu'aliments suscitent beaucoup de débats dans les pays occidentaux, où certains lui attribuent comme vertus de parer au "baby blues", cette dépression passagère postnatale, d'améliorer les montées de lait maternel et de doper l'énergie.

Mais la placentophagie est une pratique séculaire en Chine, et elle reste relativement courante aujourd'hui. On pense ici que le placenta a des propriétés antivieillissement.

"Il est en ce moment dans mon réfrigérateur et j'attends l'arrivée de ma mère pour le faire cuire et le manger. Une fois nettoyé, il peut être préparé en soupe, sans qu'il ait cette actuelle odeur de poisson", déclare Mme Wang. Elle confie espérer que ce festin l'aidera à se remettre de son accouchement.

Qin Shihuang, premier empereur d'une Chine unifiée, est réputé avoir vanté, il y a quelque 2.200 ans, les bienfaits pour la santé des placentas. Et pendant la dernière dynastie chinoise, celle des Qing, l'impératrice douairière Cixi en aurait consommé pour rester jeune.

Un texte médical classique de la dynastie Ming (1368-1644) maintient que le placenta est "très nutritif" et qu'en ingérer régulièrement permet de "prolonger sa longévité".

La pratique de manger son placenta semble s'être renforcée au cours de la dernière décennie, selon des médias d'Etat.

Une maternité de la ville orientale de Nankin a par exemple indiqué qu'environ 10% des parturientes repartaient avec leur placenta après l'accouchement.

Sur l'internet s'échangent des recettes culinaires. Un site très populaire suggère de préparer le placenta sous forme de soupe, de boulettes, de raviolis ou de le mélanger avec d'autres ingrédients de la médecine traditionnelle chinoise.

Alors que le commerce des organes humains est interdit depuis 2005 en Chine, des gélules contenant des placentas réduits en poudre sont disponibles dans les pharmacies.

"Cela tonifie et enrichit le sang", assure ainsi un médecin traditionnel chinois de la pharmacie Lei Yun Shang de Shanghai.

Marché noir florissant

"Les ventes sont très bonnes. En gros, chaque fois que nous en recevons, cela s'écoule très rapidement", souligne un vendeur de la boutique.

Ce ne sont pas seulement les mères qui désirent manger du placenta, mais aussi les pères, voire leurs amis qui peuvent en recevoir en cadeau à la place d'une boîte de chocolat ou d'une bouteille de vin.

"Ma femme et moi étions toujours à l'hôpital... et ils l'ont mangé", relate un Shanghaïen qui a offert le placenta expulsé par son épouse à des membres de sa famille.

D'autres ont des réticences, voire une opposition ferme. "Je sais que c'est bon pour la santé, mais l'idée de manger de la chair humaine me donne tout simplement la nausée. C'est quelque chose que je ne peux pas faire", confie Grace Jiang, une comptable jeune mère de famille.

La forte demande a même créé un marché noir florissant, impliquant les hôpitaux, les personnels soignants et même les parturientes, en violation de la loi.

L'année dernière, les autorités ont lancé une enquête dans un hôpital de la ville méridionale de Canton où les placentas se vendaient 20 yuans (2,5 euros) l'unité.

Les infirmières "utilisaient l'argent gagné pour acheter leur petit déjeuner", a relaté une source dans l'hôpital au journal local Xin Kuai.

Dans d'autres régions de la Chine, comme par exemple dans la ville de Jinan (est), les placentas atteignent un prix plus élevé: les vendeurs demandent pas moins de 300 yuans (37 euros) la pièce, la plupart provenant des hôpitaux selon la presse officielle.


Par Bill SAVADOVE

Rédigé par AFP le Dimanche 24 Juin 2012 à 18:10 | Lu 581 fois