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Macron s'évertue à apaiser les "gilets jaunes" et multiplie les appels au calme


Paris, France | AFP | jeudi 06/12/2018 - L'exécutif s'évertue jeudi à convaincre qu'il a entendu la colère des "gilets jaunes" tout en multipliant les appels au calme, alors que se rapproche le risque d'une nouvelle explosion de violence ce week-end.

À deux jours de la mobilisation attendue samedi sur tout le territoire, les sept principaux syndicats ont mis en garde contre "toutes formes de violences dans l'expression de revendications".
Une initiative saluée par le Premier ministre Edouard Philippe qui, devant le Sénat, a demandé aux "gilets jaunes" de ne pas se rendre à Paris pour "éviter qu'ils soient pris au piège que leur tendent les casseurs".
Des dizaines d'appels à manifester à Paris se concurrencent sur les réseaux sociaux, donnant pour la plupart rendez-vous sur les Champs-Élysées, qui a été le théâtre de scènes d'émeutes le 1er décembre.
L'Élysée a dit craindre "une très grande violence", malgré l'annonce mercredi soir d'un geste que l'exécutif espère décisif: la renonciation pour toute l'année 2019 aux augmentations de taxes sur les carburants.
Le gouvernement va déployer des "moyens exceptionnels" en plus des 65.000 policiers et membres des forces de l'ordre mobilisés en France, a rappelé le Premier ministre.
Édouard Philippe, qui en était resté à la possibilité, au moins théorique, de réintroduire la taxe, apparaît fragilisé par cet arbitrage communiqué directement par le palais présidentiel.
Le Premier ministre est "très affaibli" mais ne pourra pas servir de "fusible" car "c'est la personne du président de la République qui est visée", a estimé le député LFI Alexis Corbière.

- Macron au centre des critiques-

 
Le chef du gouvernement poursuit au Sénat un débat engagé à l'Assemblée pour défendre une nouvelle fois les mesures prises en urgence: outre l'annulation de la taxe carbone, il s'agit d'un gel des tarifs du gaz et de l'électricité cet hiver, et du renoncement à durcir le contrôle technique automobile avant l'été. 
Toutes ces annonces répondent à des demandes des "gilets jaunes". Mais pour près de huit Français sur dix (78%), elles ne répondent pas aux attentes exprimées par le mouvement, selon un sondage Elabe diffusé mercredi, alors qu'il n'était question que d'un moratoire de six mois. 
Le président Emmanuel Macron, cible de toutes les critiques sur les points de blocage, a demandé de son côté solennellement aux partis politiques, aux syndicats et au patronat "de lancer un appel clair et explicite au calme".
De fait, l'appel semble avoir été entendu par l'opposition qui s'était encore montrée très offensive la veille. "Notre pays est confronté à une crise extrêmement grave et préoccupante. En ces circonstances, nous appelons à ce qu’aucun acte de violence sur les personnes et sur les biens ne puisse être commis", a dit le chef de file des députés LR Christian Jacob.
La présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, a souhaité des "mobilisations pacifiques". L'ex-président François Hollande a appelé "à la mesure et au refus de toutes les formes de violences".

- Ultradroite et ultragauche -

 
Le député LFI François Ruffin a, en revanche, balayé l'appel au calme de l'Elysée, estimant que "ceux qui jettent de l'huile sur le feu sont ceux qui disent que le cap est bon".
Enfin les députés socialistes, Insoumis et communistes ont annoncé qu'ils déposeraient lundi une motion de censure contre le gouvernement.
Le collectif des "gilets jaunes libres" a demandé à être reçu vendredi par Emmanuel Macron, pour "calmer" la France qui se trouve "au bord de la guerre civile", a annoncé un de ses représentants, Benjamin Cauchy, à l'AFP. L'Elysée n'a pas réagi dans l'immédiat.
L'exécutif redoute aussi une extension de la colère à d'autres secteurs, notamment les agriculteurs et les transporteurs routiers.
Environ 200 lycées et collèges étaient de nouveau bloqués ou perturbés jeudi. Un total de 146 personnes a été interpellé jeudi devant un lycée de Mantes-la-Jolie après des heurts et dégradations dans cette commune des Yvelines.
"Ca reste une minorité, Mais le problème c'est que là où ça se passe, c'est souvent très violent", a déclaré le ministre de l'Education Jean-Michel Blanquer dans les couloirs du Sénat.
Partout en France, les appels à se mobiliser une nouvelle fois samedi se multiplient et le ministère de l'Intérieur fait état d'une "mobilisation de la part de l'ultradroite et de l'ultragauche". 
De même source, "on constate une vraie radicalisation" de certains "gilets jaunes".
"Je prie pour samedi", a glissé un proche du président.
Plusieurs musées et lieux culturels parisiens ont décidé à nouveau de rester fermés samedi. La Ligue de football professionnel (LFP) a annoncé le report de deux nouveaux matches de Ligue 1, Monaco-Nice et Saint-Etienne-Marseille ce week-end.
Sur les réseaux sociaux, les mots d'ordre évoquent un renversement des institutions: "dissolution de l'Assemblée nationale", "Manu, on arrive !", "Pot de départ de Macron !", ou encore "Tous à la Bastille".
À Dole, Fabrice Schlegel, un promoteur immobilier de 45 ans qui est l'un des premiers leaders des "gilets jaunes" dans sa ville, s'est montré très inquiet. "Je ne sens pas les choses très bien, il y a une émulation révolutionnaire, mais comment les Français lambda vont-ils réagir face à cela ?", a-t-il dit à l'AFP.

le Jeudi 6 Décembre 2018 à 06:14 | Lu 320 fois