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Les terres australes françaises, au coeur des enjeux majeurs du XXIe siècle


Les terres australes françaises, au coeur des enjeux majeurs du XXIe siècle
SAINT-PIERRE (France / La Réunion), 02 nov 2012 (AFP) - Changement climatique, ressources halieutiques, hydrocarbures et minerais rares des abysses: les océans détiennent les clés d'enjeux majeurs du XXIe siècle, et la France dispose d'un atout avec une implantation sur tout le gradient de l'océan Indien.

Les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) s'étendent des îles Eparses sous les tropiques à la Terre Adélie, en passant par les îles australes de Crozet, Kerguelen, Saint-Paul et Amsterdam.

Les TAAF, ce sont finalement quelques confettis de terre qui donnent droit à beaucoup de mer, et "la mer sera le grand sujet du XXIe siècle", assure Vincent Bouvier, directeur général à l'outre-mer.

Les Zones économiques exclusives (ZEE) des îles subantarctiques et des Iles Eparses s'étendent respectivement sur 1.615.000 km2 et 735.300 km2 soit 23% des ZEE de la France, participant à donner au pays son second rang mondial derrière les Etats-Unis.

Convoitée d'abord pour ses capacités de pêche au thon, la ZEE des Eparses, dans le canal du Mozambique, est alléchante avec la découverte d'immenses champs gaziers et pétroliers, potentiellement exploitables, allant du sud du Kenya au Mozambique et englobant Madagascar et les Seychelles.

Des permis d'exploration de pétrole en eaux profondes ont déjà été octroyés en 2008 dans la ZEE de Juan de Nova (une des Eparses), qui arrivent à échéance en 2013.

Dans les grands fonds marins reposent aussi des nodules polymétalliques et amas sulfurés, qui connaissent "un regain d'intérêt" de la part des industries minières du monde entier, fait valoir Lionel Lemoine, de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer).

"Ces ressources minérales des grands fonds font l'objet d'une forte compétition. La Chine, l'Inde, la Corée ont des initiatives. Il y a des amas sulfurés dans l'océan Indien", ajoute M. Lemoine.

Ces nodules et autres amas "abritent notamment des +terres rares+, ces dix-sept métaux essentiels aux technologies de pointe (télécommunications, armement, énergies renouvelables) au caractère stratégique", souligne la commission sénatoriale des Affaires étrangères et de la défense dans un rapport publié en juillet.

"puits à carbone"

Même si environ 90% des ressources minières et halieutiques sont déjà dans les zones sous juridiction, les pays signataires de la convention de Montego Bay déposent des dossiers pour étendre leurs limites maritimes, signalent les sénateurs.

La France l'a fait dès 2009 pour les Iles Saint-Paul-et-Amsterdam, l'archipel de Crozet, les Iles Kerguelen et la Terre Adélie.

En attendant de savoir si ces minerais seront un jour exploités, elle surveille jalousement l'exploitation des très rentables légines et langoustes dans ses ZEE, avec le concours des navires militaires. La zone a en effet été écumée dans les années 90 par des mafias de la pêche.

Dans le champ scientifique, l'installation de bases permanentes dès les années 50, au service d'abord de la météorologie, a placé la France "en position de leader de la recherche dans cette région du monde", se réjouit Yves Frénot, directeur de l'Institut Paul-Emile Victor (Ipev, coordonnateur de la recherche dans les TAAF).

Ainsi, les activités des observatoires s'inscrivent maintenant dans un maillage mondial. "Sur Amsterdam, les mesures de concentration de CO2 y sont effectuées depuis 1980. C'est la station la plus ancienne au monde après celle d'Hawaï et la seule dans l'Océan Indien jusqu'à un ou deux ans", rappelle M. Frénot.

"Sans les mesures d'Amsterdam, les modèles d'évolution du climat utilisés par le GIEC fonctionnent moins bien du fait du peu de stations situées dans l'hémisphère Sud", relève le scientifique.

De plus, l'océan austral "joue un rôle fondamental de +puits à carbone+ et nous menons des campagnes pour comprendre ce phénomène", détaille-t-il.

Somme toute, "les TAAF permettent à la France d'être une puissance effectivement présente sur un espace qui va des tropiques au Pôle Sud", affirme Pascal Bolot, le préfet administrateur supérieur.

Les bases permettent "un affichage de souveraineté et d'image, avec une pêche raisonnée et la défense de la biodiversité", souligne M. Bolot. "Et on ne peut pas présager de l'avenir, des intérêts qui pourraient émerger", ajoute-t-il, évoquant "le pétrole, des routes commerciales, des implantations satellitaires, etc."

Alors pour un coût annuel global d'environ 50 millions d'euros, "c'est un très bon rapport entre le pari fait sur l'avenir et le prix payé", juge le préfet, n'hésitant pas à parler d'un "placement de bon père de famille".

Rédigé par AFP le Vendredi 2 Novembre 2012 à 05:13 | Lu 1107 fois