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Les auxiliaires de santé des îles en quête de reconnaissance


Tahiti, le 3 septembre 2025 - Ce mercredi marquait l'ouverture des Journées des auxiliaires de Santé des îles au Centre hospitalier de Polynésie française. Organisé sur deux jours, l'événement est aussi l'occasion pour ces agents de faire connaître leur travail et le contexte difficile dans lequel ils évoluent. Aujourd'hui relégués dans la catégorie D de la fonction publique, ils remplacent pourtant quotidiennement médecins et infirmiers, absents de certaines îles.
 
Ils sont les grands oubliés du système de santé polynésien. Les auxiliaires de santé des îles endossent pourtant quotidiennement la blouse – et les responsabilités qui vont avec – des médecins ou infirmiers, absents de certaines zones du territoire. Un rôle que ne leur confère pourtant pas leur statut. Créés en 1988, les auxiliaire de santé publique sont “choisis et recrutés parmi la population des quartiers, des zones rurales et des îles isolées, et ils sont appelés à servir dans les communautés dont ils sont issus” indique la délibération avant de préciser : “Ils ont pour mission dans les îles éparses et isolées d'assurer les besoins sanitaires de base et dans les zones rurales et les quartiers d'aider les professionnels de santé dans leurs tâches dans le cadre d'actions spécifiées qui leurs sont dévolues.” Une théorie largement dépassée par la pratique dans les faits.
 
Sur le terrain, certains cas exigent bien plus que des “besoins de base” : “À Hereheretue, il y a moins de 5 ans, l'auxiliaire de santé présent sur place a été contraint de pratiquer des actes de thanatopraxie sur le corps d'un habitant de l'île”, témoigne François Takamoana, auxiliaire de santé à Amanu, aux Tuamotu. “Il a dû le plier en deux afin de le faire rentrer dans un congélateur, et ce dans l'attente d'un bateau de la marine marchande qui ne l'a rappelé que plusieurs jours plus tard.” Des récits à faire pâlir dont François Takamoana ne manque pas : “En 2021, à Amanu, nous avons évasané une femme enceinte de 6 mois, à 3 heures du matin, dans une mer démontée et à bord d'un bateau en bois avec un moteur de 40 cv. Il fallait qu'elle soit à Tahiti le plus rapidement possible.”
 
Des professionnels isolés et oubliés
 
Actuellement, on recense 67 auxiliaires de la fonction publique répartis sur 44 îles isolées. Ces derniers sont amenés à exercer, souvent seuls, des missions de soin et de prévention, pour la plupart “sans autre formation qu'une courte préparation à l'emploi, sans rapport avec leur statut et leur rémunération” fustige le taote Philippe Biarez, chef de projet au sein de l'Association Partage Santé Pacifique. Et le professionnel de santé insiste : “Lors de la création du statut de la fonction publique en 1995, cette profession a été oubliée et n'a pas été créée dans la fonction publique. Ces professionnels sont depuis lors, pour la plupart, assimilés aux aides médico-techniques de catégorie D, soit comme des agents d'entretien.” Quant aux formations et leurs mises à jour, elles se font de plus en plus rares : “Notre dernière formation date de 2016 et nous sommes en 2025... des années ont passé”, ironise François Takamoana.
 
Une situation que les auxiliaires aimeraient voir évoluer, mais du côté des pouvoirs publics les réponses se font rares. Seul ministre présent pour l'ouverture de ces Journées des auxiliaires de santé, Cédric Mercadal. Un geste apprécié mais qui n'a pas suffit à faire oublier l'absence de Vannina Crolas, ministre de la Fonction publique et principale concernée par les revendications statutaires de ces agents.
 

Rédigé par La rédaction le Mercredi 3 Septembre 2025 à 15:56 | Lu 2032 fois