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Le jeune caporal échappe au mandat de dépôt


Tahiti, le 31 août 2020 - Un militaire de 25 ans, caporal dans l’armée française en mission sur le territoire, a été présenté en comparution immédiate lundi après un premier renvoi de l’affaire le 10 août dernier. Poursuivi pour avoir poignardé l’une de ses connaissances qui l’avait vexé, le prévenu a été condamné à deux ans de prison dont un an avec sursis. Il a cependant échappé au mandat de dépôt qui avait été requis à son encontre et a obtenu l’exclusion de l’inscription de cette condamnation de son casier judiciaire. 
 
Pour quelle raison un militaire de 25 ans, jamais condamné et ayant réussi, en étant "parti de rien", à devenir caporal dans l’armée française, a-t-il poignardé l’un de ses "copains" ? L’égo, surtout. Et l’alcool ensuite. Le militaire a en effet été présenté en comparution immédiate lundi pour répondre de violences avec arme commises en état d’ébriété. Le 8 août dernier, et alors qu’il se trouvait en mission sur le territoire pour quelques mois, le prévenu s’était rendu à un barbecue dans son quartier d’enfance à Mahina. En début de soirée, il avait entamé une discussion houleuse avec l’une de ses connaissances, un "copain", qui avait notamment remis son grade de caporal en cause. Ivre et se sentant "rabaissé", le militaire s’était saisi d’un couteau qu’il avait utilisé pour porter un coup sous la mâchoire de la victime. Prise en charge et hospitalisée, cette dernière avait bénéficié de dix jours d’incapacité totale de travail (ITT). 
 
À la barre du tribunal ce lundi, les versions se sont opposées. Interrogé sur les faits, le jeune caporal, qui est entré dans l’armée française en 2015, a de nouveau expliqué qu’il s’était senti "rabaissé" lorsque la victime avait remis son grade en cause. "J’étais tellement énervé que je ne me contrôlais plus. Il m’a descendu car je n’ai pas de diplôme alors que, peu importe le stade d’où l’on part, chacun peut évoluer à son propre niveau" a-t-il ainsi expliqué pour justifier son geste. Confronté à ses déclarations lors de la garde à vue, il a indiqué qu’il ne se souvenait pas de la manière dont il avait porté le coup de couteau en affirmant toutefois que ce coup avait été porté de face. Une affirmation contredite par la victime qui a quant à elle soutenu que ce coup lui avait été porté de dos alors qu’elle était assise. Interrogé, au bout de vingt minutes d’audience, le militaire s’est soudainement rappelé que son "copain" avait tenté de lui porter des coups de poing avant qu’il ne se saisisse du couteau. 
 

Exclusion du casier

Pressentant que l’avocat du prévenu allait demander un partage de responsabilité, le conseil du jeune homme blessé, Me Dubois, a pris les devants lors de sa plaidoirie en invoquant une "forme de préméditation" et en rappelant que l’arme blanche n’avait jamais été retrouvée : "Il est allé chercher ce couteau dans la cuisine et les témoins rapportent qu’il s’est littéralement jeté sur mon client. Il faut remettre les choses à leur place et considérer qu’il est intégralement responsable". À l’aube de ses réquisitions, le procureur a, quant à lui, tenté de comprendre comment le prévenu avait pu commettre un geste aussi "disproportionné". "Le prévenu a reconnu les faits en expliquant qu’il avait été touché dans son honneur car la victime lui avait mal parlé. Or, le ton employé chez les Polynésiens peut tout faire et tout défaire et atteindre ainsi un niveau de provocation verbale important". Après avoir ainsi tenté de comprendre le geste reproché au prévenu, le représentant du ministère public a cependant requis deux ans de prison dont six mois avec sursis à son encontre, assortis d’un mandat de dépôt, en expliquant qu’il avait eu la "volonté de faire du mal" et que ce constat traduisait une "certaine dangerosité".
 
Des réquisitions "lourdes" qui ont "choqué" l’avocat du prévenu, Me Peytavit, qui a entamé sa plaidoirie en insistant sur le parcours de son client. "Mon client vient de loin, de tout en bas et il s’est fait tout seul. Il est aujourd’hui devant vous et risque de tout perdre car il a commis une erreur dramatique." L’avocat, tel que l’avait annoncé son confrère, a demandé le partage de responsabilité et l’exclusion de la condamnation du casier judiciaire du prévenu. Après en avoir délibéré, le tribunal a condamné le prévenu à deux ans de prison dont un an avec sursis. Au regard de son casier vierge et de sa situation professionnelle, il n’a pas décerné de mandat de dépôt et a ordonné l’exclusion de la condamnation du casier. Le jeune caporal, qui sera sanctionné au niveau disciplinaire, devrait donc pouvoir tout de même garder son emploi. 
 
 

Rédigé par Garance Colbert le Lundi 31 Août 2020 à 18:46 | Lu 4867 fois