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Le candidat de la gauche, Pedro Castillo, élu président du Pérou


Lima, Pérou | AFP | mardi 19/07/2021 - Le candidat de la gauche radicale et novice en politique, Pedro Castillo, a été proclamé lundi vainqueur de l'élection présidentielle au Pérou, un mois et demi après le scrutin du deuxième tour du 6 juin où il affrontait la candidate de la droite populiste, Keiko Fujimori.

"Je proclame président de la République José Pedro Castillo Terrones", a déclaré le président du Jury national électoral (JNE), Jorge Luis Salas, lors d'une brève cérémonie virtuelle qui clôt des semaines de suspense après un scrutin particulièrement serré.

"Je voudrais saluer les autorités électorales (...) saluer également les partis politiques qui ont participé à cette fête démocratique", a lancé M. Castillo, peu après la proclamation, devant des centaines de partisans réunis au siège de son parti Peru Libre à Lima.

"J'ai le cœur ouvert pour chacun d'entre vous, il n'y a pas de rancœur dans cette poitrine", a déclaré l'ex-instituteur depuis le balcon du siège du parti, arborant son traditionnel chapeau blanc, typique de sa province natale de Cajamarca (nord).

"Je demande à Mme Keiko Fujimori (...) de faire en sorte que le pays avance", a-t-il ajouté.

L'autorité électorale chargée d'examiner les recours a confirmé lundi les résultats délivrés il y a plusieurs semaines par l'Organe national du processus électoral (ONPE) qui organisait le scrutin.

A l'issue du dépouillement de 100% des bulletins de vote, l'ONPE avait donné Pedro Castillo, 51 ans, vainqueur avec 50,12% des voix, contre 49,87% à sa rivale, Keiko Fujimori, 46 ans.

Selon les résultats actualisés par le JNE, M. Castillo l'emporte avec 44.263 voix d'avance sur la fille de l'ex-président Alberto Fujimori (1990-2000).

Les centaines de partisans du président élu, qui campaient depuis des semaines devant le siège du JNE dans le centre de Lima, ont laissé éclater leur joie en chantant et dansant sur des rythmes traditionnels péruviens.

"Nous avons enfin un président !", s'est réjouie auprès de l'AFP Rosa Huaman, 27 ans, alors que la foule scandait "On l'a fait!". 

"Cela faisait 200 ans que nous attendions qu'un instituteur, un Andin, un +cholo+ (métis) arrive au pouvoir et gouverne pour tout le monde", a déclaré Caledonio Ayala, 38 ans, venue de la région de Huanuco (centre).

"Engagements"

Peu avant l'annonce du résultat définitif, Mme Fujimori, qui avait insinué début juillet qu'elle ne reconnaîtrait pas la victoire de son concurrent, a fait volte-face. 

"J'annonce qu'en remplissant mes engagements, mon engagement envers tous les Péruviens (...) envers la communauté internationale, je vais reconnaître les résultats car c'est ce qu'exigent la loi et la Constitution que j'ai juré de défendre", a-t-elle déclaré en conférence de presse.

"J'appelle les Péruviens à ne pas baisser les bras et à mettre en oeuvre une défense démocratique", a-t-elle ajouté.  

La fille d'Alberto Fujimori, qui purge une peine de 25 ans de prison pour corruption et crime contre l'humanité, avait jusque-là multiplié les accusations de "fraudes" contre son adversaire et demandé l'invalidation de plusieurs dizaines de milliers de suffrages.

Visée par une enquête pour des pots-de-vin présumés lors de ses campagnes présidentielles de 2011 et 2016, où elle avait déjà échoué au second tour, elle a effectué 16 mois de détention préventive et, faute d'immunité présidentielle, risque désormais 30 ans de prison.

A rebours de ses accusations, la mission d'observation de l'Organisation des Etats d'Amérique (OEA), les Etats-Unis et l'Union européenne avaient jugé le scrutin libre et transparent.

"Nous estimons nos liens profonds (avec le Pérou) et sommes impatients de les renforcer avec le président élu Pedro Castillo", a réagi lundi soir l'ambassade des Etats-Unis à Lima.

De son côté, le gouvernement vénézuélien a célébré l'élection "indiscutable" de M. Castillo et a exprimé son souhait de "développer une relation bilatérale de coopération", selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères.

Pedro Castillo et Keiko Fujimori ont été les vainqueurs surprise le 11 avril d'un premier tour indécis avec 18 candidats en lice.

Sorti de l'anonymat en 2017 à la faveur d'un mouvement de grève des enseignants dont il avait pris la tête, le chef du parti minoritaire de gauche Peru Libre a proposé pendant la campagne une série de nationalisations et l'arrêt de certaines importations pour renforcer l'industrie locale.

Mme Fujimori et ses partisans avaient agité le chiffon rouge, l'accusant de vouloir transformer le Pérou en une sorte de Corée du Nord ou de Venezuela, et de le mener à la ruine et à la dictature.

M. Castillo prendra ses fonctions le 28 juillet, jour de l'expiration du mandat du président intérimaire Francisco Sagasti.

le Mardi 20 Juillet 2021 à 05:25 | Lu 162 fois