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Le Fa’amu, l'adoption polynésienne expliquée par Simone Grand au Quai Branly


Illustration : Peinture de P. Dubois
Illustration : Peinture de P. Dubois
La dernière journée du « FIFO hors les murs » au Musée du Quai Branly était consacrée vendredi au thème du Fa’amu (ndlr : adoption). Un sujet complexe qui a engendré des discussions passionnées, lors de la conférence animée par l’anthropologue polynésienne, Simone Grand. Les débats ont été enrichis par les interventions d’Hervé Boitelle, producteur des films « Marquisien mon frère » et « Terre natale, retour à Rurutu », projetés l’après-midi, et Louis Jouve, fondateur de l’association « Maeva Polynésie », regroupant près de 500 familles métropolitaines ayant adopté sur le Fenua.

« La spécificité de l’adoption en Polynésie provient du fait que c’est un don et non un abandon. C’est un don d’amitié ou familial qui ne se fait pas toujours sans douleur, car c’est un renoncement, que l’on pense préférable pour l’ensemble de la famille, ou pour les enfants que l’on donne » a expliqué Simone Grand à l’issue des débats, soulignant le caractère « traditionnel » de l’adoption dans la société polynésienne.

Si le cadre légal en Polynésie et en métropole est le même, l’anonymat des familles biologiques n’est toutefois pas prévu sur le territoire. « C’est une des conditions du don d’enfant » a indiqué l’anthropologue.
Selon elle, cette particularité n’engendre généralement pas de difficultés lorsque l’enfant adopté reste sur le Fenua. Les choses sont pourtant différentes s’il est élevé en métropole.


L’adolescence : une période à risque

Le Fa’amu, l'adoption polynésienne expliquée par Simone Grand au Quai Branly
« Dans ce cas, l’enfant peut parfois s’interroger sur le fait qu’il ait été donné, et pas un autre. Il arrive que certains parents biologiques donnent deux enfants, pour qu’ils ne se sentent pas seuls » explique Simone Grand. L’anthropologue précise que ces difficultés sont quelquefois exacerbées dans certaines familles, de surcroît dans un milieu où l’adoption est exceptionnelle.

« L’enfant, surtout lors de la période à risque qu’est l’adolescence, peut se considérer à part, exclu, et n’appartenant pas au groupe, alors que ce n’est pas la réalité » développe-t-elle. Un constat également fait par Louis Jouve. « L’adoption en Polynésie, avec un contact maintenu entre les familles, peut mettre les enfants dans une situation difficile, à l’adolescence notamment où ils peuvent avoir du mal à comprendre ce qui leur arrive » complète-t-il.


« Chaque adoption est unique »

« Le fait d’avoir quatre parents est très compliqué à concevoir » insiste Louis Jouve. S’appuyant sur sa propre expérience, le fondateur de l’association « Maeva Polynésie » souligne qu’il ne faut pas généraliser. « J’ai adopté trois polynésiens. Deux sortent d’une situation difficile, car ils n’ont pas forcément accepté ce qui leur était arrivé. Le troisième n’a en revanche eu aucun problème » explique-t-il. « Chaque adoption est unique » conclut Simone Grand.

Le « FIFO hors les murs » se poursuivra les 7 et 9 juin à la Délégation de la Polynésie française avec la projection de « Kuru : The science and the sorcery » et « Lucien Kimitete, un homme de la Terre des Hommes ». Le premier film sera suivi d’une conférence sur la médecine traditionnelle, animée par Simone Grand, et le deuxième par un débat sur la culture marquisienne, proposée par Manouche Lehartel et la réalisatrice, Dominique Agniel.



Rédigé par Terence Ienfa le Vendredi 3 Juin 2011 à 09:07 | Lu 2415 fois