Tahiti Infos

La plupart des médicaments en vente libre inefficaces voire dangereux


Les médicaments en vente libre les plus utilisés contre le rhume, le mal de gorge, la grippe ou les troubles intestinaux sont majoritairement inefficaces et, dans certains cas, dangereux, selon une étude du magazine 60 Millions de consommateurs dévoilée jeudi.

Sur 61 médicaments "passés au crible" sous le contrôle du professeur Jean-Paul Giroud, pharmacologue clinicien reconnu, et de Hélène Berthelot, pharmacienne, seuls 13 d'entre eux - comme le sirop Clarix toux sèche, Humex adultes toux sèche dextrométhorphane abricot, Vicks vaporub, Imodiumcaps, Gaviscon menthe, Maalox sans sucre - sont jugés efficaces et sans risque pour le patient. 

"Ils ont un rapport bénéfice/risque favorable et sont +à privilégier+", indique le magazine dans un hors-série consacré aux médicaments sans ordonnance.

En revanche, "28 sont tout simplement +à proscrire+, le rapport bénéfice/risque étant défavorable en automédication. Vingt sont classés +faute de mieux+: leur efficacité est faible ou non prouvée mais ils n’ont pas, peu ou très rarement d’effets indésirables", poursuit le journal. 

"Nous sommes favorables à l'automédication (...) mais cela suppose que l'usager soit bien informé (des contre-indications, du mode d'utilisation) et que les produits soient irréprochables", a commenté Thomas Laurenceau, rédacteur en chef.

"Or, au fil des ans, nous constatons de plus en plus d'effets indésirables, c'est très préoccupant", dit-il.

Plus de 2.500 médicaments sont en accès libre en pharmacie. Pourtant, les consommateurs ne sont pas ou mal informés des risques encourus en prenant par exemple du Néo-codion pour soigner leur toux, de l'Actifed rhume, des Strepsils lidocaïne pour atténuer leur maux de gorge ou des Contalax pour lutter contre la constipation.

Hélène Berthelot cite les cas, loin d'être isolés, d'hospitalisations pour hémorragies gastro-intestinales après l'absorption de pastilles pour la gorge. "Les patients en avaient consommé en dose normale (...) Et le pis est qu'il n'y a même pas de signe avant-coureur", a-t-elle déploré.

 

- pris entre deux feux -

 

De son côté, le professeur Giroud, auteur de plusieurs ouvrages sur l'automédication, relève que certains présentent 10 à 15 contre-indications. 

"Certains contiennent des substances qu'on ne devrait tout simplement pas associer" car elles décuplent les risques d'accidents cardio-vasculaires et neurologiques, de somnolence.

Pour certains, les combinaisons de substances sont tout simplement une aberration; ainsi, le Néo-codion qui contient de la Codéïne, un anti-toussif et deux expectorants ayant un effet contraire.

"L'automédication, c'est d'abord connaître ses propres symptômes. Toute personne malade devrait donc d'abord se poser la question : quels symptômes ai-je vraiment ? Puis elle devrait se demander si elle peut vraiment les traiter en automédication", observe-t-il. 

Elle devrait être aussi mieux informée sur la maladie elle-même. Dans le cas du rhume où les médicaments sans ordonnance sont jugées les plus dangereux, les symptômes disparaissent d'eux-mêmes au bout de 7 à 10 jours.

"Les médicaments ne doivent pas être automatiques. L'automédication ne devrait se faire que sur des personnes en bonne santé. Et quand on prend des médicaments (sans ordonnance), il faut toujours limiter leur durée d'utilisation", insiste M. Giroud.

"Il faut que les autorités de santé (...) fassent du ménage", a par ailleurs estimé Thomas Laurenceau, relevant que certains médicaments devraient passer par une prescription et d'autres être "tout simplement retirés du marché".

De son côté, Hélène Berthelot a reconnu la responsabilité des pharmaciens, "pris entre deux feux", le médical et le commercial. "Ils se rattrapent (en terme de chiffre d'affaires) sur l'automédication. Mais ils peuvent aussi parfaitement sélectionner les bons produits", dit-elle.

"Les médicaments sont toujours dangereux parce que justement, ce sont des médicaments. Le risque zéro n'existe pas", a déclaré à l'AFP Isabelle Adenot, président de l'Ordre des pharmaciens qui dénonce la publicité sur ces médicaments très populaires même si les Français en sont moins consommateurs que leurs voisins européens (15,4% contre 32,3% en moyenne en Europe).

Elle préconise pour sa part la généralisation du dossier pharmaceutique permettant de minimiser le risque de délivrer ces médicaments de manière inappropriée.


Rédigé par Avec AFP le Jeudi 3 Décembre 2015 à 04:38 | Lu 949 fois