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La drôle de vie des jeunes traders expatriés à Hong Kong


Hong Kong, China | AFP | dimanche 09/11/2014. Le meurtre présumé de deux Indonésiennes par un trader britannique à Hong Kong a révélé sous un jour peu flatteur les mœurs de certains jeunes banquiers occidentaux qui font de la mégapole financière le théâtre de leur débauche.

Rurik Jutting, 29 ans, ancien courtier de la Bank of America Merrill Lynch, est soupçonné d'avoir tué Sumarti Ningsih et Seneng Mujiahsih, dont les corps ont été retrouvés dans son appartement cossu de Wanchai, à deux pas des bars à hôtesses.

Jutting aurait été peu disert depuis son arrestation mais déjà se dessine le profil d'un "golden boy" sur le fil du rasoir, les poches bourrées de dollars, consommateur de filles et de cocaïne, client régulier des établissements sulfureux à Hong Kong comme aux Philippines.

Dans les conversations ou sur les réseaux sociaux, de nombreux Hongkongais ont abondamment exprimé leur rancoeur envers ces enfants gâtés de la finance, pleins d'eux-mêmes, et qui n'ont que mépris pour les locaux.

"Ils gagnent une fortune sans pour autant se sentir quelque responsabilité sociale que ce soit", s'emporte C.H. Lo, un bijoutier de 37 ans. "Leurs hauts revenus et leur immoralité alimentent le marché de la drogue et de la prostitution", affirme-t-il. Leur credo : "Travailler beaucoup, s'amuser beaucoup."

Sur internet, on fustige les "losers occidentaux qui se prennent pour Dieu en Asie" et se comportent "comme jamais ils ne le feraient chez eux".

"Je suis d'accord, les expatriés devraient se tenir, notre réputation se dégrade d'année en année à cause de ces imbéciles", écrit un anonyme en réaction à un article sur l'enquête.

 

- Etourdis de liberté, d'argent et de sexe - 

Un banquier étranger explique à l'AFP que les traders, soumis à forte pression, perdent rapidement pied en brassant des sommes inaccessibles à l'entendement des gens ordinaires et développent "les fantasmes et la mentalité d'une rock star".

"Ici, vous avez accès à une offre de prostitution plus large et beaucoup moins chère qu'à New York", assure-t-il. Il se souvient de cette fête orgiaque dans "la suite d'un hôtel" peuplée de "prostituées se livrant à un striptease savonneux dans la salle de bain pendant que d'autres prodiguaient des services sexuels oraux sur le canapé".

Difficile, pour des jeunes gens étourdis de liberté, d'argent et de sexe, de résister à la tentation, justifie un autre banquier étranger.

"Il est fascinant pour un étudiant un peu niais de sortir de l'université et de faire partie tout à coup des types cools qui fréquentent les meilleurs nightclubs. Pour rester dans cet état d'euphorie émotionnelle et chimique, il est prêt à ouvrir son épais portefeuille",
analyse-t-il.

Plus largement, les expatriés sont accusés de contribuer au creusement des inégalités sociales dans l'ancienne colonie britannique revenue à la Chine en 1997. Les écarts sont parmi les plus grands au monde et un Hongkongais sur cinq vit sous le seul de pauvreté selon l'ONG Feeding.

"Les banquiers étrangers sont surpayés et ils contribuent aux écarts de richesse", estime ainsi Maggie Ho, une employée de 31 ans. "Les locaux se méfient des banquiers depuis la crise de Lehman Brothers" ayant conduit à la faillite du groupe bancaire américain en 2008.

Un cadre de banque tient à rappeler l'évidence : la plupart d'entre eux se comportent normalement et condamnent les moutons noirs.

"Beaucoup de banquiers ne sont pas des abrutis complets. Je ne bois que de l'alcool, et encore, avec modération", plaide-t-il.

Rédigé par AFP le Dimanche 9 Novembre 2014 à 09:40 | Lu 952 fois