Tahiti Infos

La crise avec la Pologne s'invite au sommet européen


Olivier HOSLET / POOL / AFP
Olivier HOSLET / POOL / AFP
Bruxelles, Belgique | AFP | jeudi 21/10/2021 - Le bras de fer entre l'Union européenne et Varsovie sur l'indépendance de la justice polonaise et la primauté du droit de l'UE, s'est imposé à l'agenda du sommet des dirigeants des Vingt-Sept, qui se réunissent jeudi et vendredi à Bruxelles.

Avant même l'ouverture de cette réunion, le chef du gouvernement polonais Mateusz Morawiecki a rencontré le président français Emmanuel Macron, et devait s'entretenir à 12H00 GMT avec la chancelière Angela Merkel.

Les chefs d'Etat et de gouvernement doivent discuter de la flambée des prix de l'énergie, des retards de certains pays membres dans la vaccination contre le Covid-19 et des tensions avec le Bélarus autour des migrants notamment.

A ce programme chargé s'est ajoutée la crise déclenchée par le Tribunal constitutionnel polonais -- proche du parti nationaliste conservateur au pouvoir et saisi par Mateusz Morawiecki --, qui a décrété le 7 octobre certains articles des traités européens incompatibles avec la Constitution nationale.

Une décision dénoncée par Bruxelles comme une attaque sans précédent contre la primauté du droit européen et la compétence de la Cour de justice de l'UE, mais aussi comme l'illustration ultime du manque d'indépendance de la justice polonaise à l'égard du gouvernement.

Elle a provoqué des échanges tendus mardi au Parlement européen entre la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, qui a promis de sévir contre Varsovie, et le Premier ministre polonais, qui a martelé la suprématie de la Constitution nationale.

"L'UE est à un moment crucial où elle doit choisir soit de poursuivre le langage de la force et du chantage, qui mènera selon moi à une atrophie de l'organisation, soit de revenir à ses racines, à la souveraineté des Etats membres", a déclaré jeudi matin le vice-ministre des Affaires étrangères Szymon Szynkowski vel Sek aux médias polonais.

A la demande de certains Etats, dont les Pays-Bas, le sujet sera "abordé" lors de la réunion du Conseil, mais ne donnera pas lieu à des conclusions contrairement aux autres points à l'ordre du jour.

"Inquiétude"

"Un grand nombre de chefs d'Etat et de gouvernement vont exprimer leur inquiétude", a indiqué un diplomate européen.

Mais certains pays comme l'Allemagne prônent le "dialogue" avec Varsovie. "Il ne s'agit pas de faire de ce sommet une confrontation (...) Nous n'attendons pas une discussion sur des sanctions à l'égard de la Pologne", a indiqué une source gouvernementale à Berlin.

Après sa rencontre avec Angela Merkel -- pour qui ce devrait être le dernier d'une centaine de sommets --, le dirigeant polonais aura une réunion avec ses homologues du groupe de Visegrad (Hongrie, République tchèque et Slovaquie). 

Plusieurs capitales jugent inconcevable une approbation du plan de relance polonais de 36 milliards d'euros, actuellement bloqué par la Commission qui réclame des garanties sur l'indépendance du système judiciaire du pays.

"Je ne vois pas, en l'état actuel, comment la Commission serait en capacité de valider ce plan de relance", commente-t-on à l'Elysée. "Ce n'est pas un chantage financier, c'est répondre à des principes fondamentaux, au premier rang desquels il y a les garanties d'Etat de droit et d'indépendance de la justice".

L'UE dispose d'autres outils pour faire respecter l'Etat de droit, mais ils sont pour certains lourds à mettre en oeuvre, et les pays membres sont opposés à toute précipitation.

Les eurodéputés, eux, font pression sur la Commission en la menaçant d'une action en justice pour qu'elle déclenche sans délai un nouveau mécanisme permettant de suspendre les versements de fonds européens aux pays où sont constatées des violations de l'Etat de droit portant atteinte au budget communautaire.

Une procédure qui pourrait viser la Pologne et la Hongrie, autre pays régulièrement épinglé par Bruxelles. Mais les Etats membres prônent d'attendre l'avis de la Cour de justice de l'UE sur ce règlement avant de l'utiliser.

Le mécanisme fait actuellement l'objet d'un recours en annulation par la Pologne et la Hongrie devant la justice européenne, et une décision n'est pas attendue avant la fin de l'année ou début 2022.

Un autre sujet épineux du sommet, qui commence à 13H00 GMT, sera la hausse des prix de l'énergie, qui pèse sur les revenus des ménages et menace la reprise économique.

le Jeudi 21 Octobre 2021 à 03:15 | Lu 195 fois