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L'équilibre difficile entre le "coût" et le "prix" de la santé


Tahiti, le 6 mai 2022 – Les Assises de la santé se sont ouvertes vendredi à la présidence par un constat très sombre de l'évolution des dépenses de santé et de la situation sanitaire de la population polynésienne. Les tables rondes de juin prochain devront dégager à la fois des sources de financement et des pistes pour éviter le "dérapage des maladies".
 
Pour le président, Édouard Fritch, "la santé a un coût, mais elle n'a pas de prix". Pour la directrice du Centre hospitalier, Claude Panero, "la santé n'a pas de prix, mais elle a un coût". Dans un sens ou dans l'autre, que l'on préfère mettre l'accent sur l'offre de santé ou sur ses dépenses, les débats tournaient tous vendredi matin aux premières "Assises de la Santé" autour d'un même équilibre délicat : comment financer la santé des Polynésiens ?
 
La santé passée de 5 à 9% du PIB
 
Promises aux partenaires sociaux lors de la grève générale de novembre 2021, ces assises sont annoncées depuis des semaines par les syndicats comme par le patronat sous le seul angle des "économies" à réaliser dans le champ de la santé. À quelques mois d'une crise sanitaire ayant mobilisé plus que jamais les soignants, l'exercice restait délicat pour le gouvernement face aux nombreux professionnels de santé réunis au salon d'honneur de la présidence. Édouard Fritch n'a d'ailleurs pas manqué de "témoigner sa gratitude" aux professionnels de santé pour ces deux années de "combat" et de "sacrifice en première ligne". Mais une fois passés ces propos liminaires, le cœur du sujet du jour résidait dans une formule reprise par la quasi-totalité des intervenants : "maîtriser les dépenses de santé".
 
Cette première journée de prise de contact -qui précèdent trois jours de tables rondes les 1er, 2 et 3 juin prochain au Hilton de Faa'a- a surtout été l'occasion de dresser le constat très sombre de l'évolution de la situation sanitaire et de son financement au fenua. Une "réalité" résumée en quatre points par le président du Pays : Un, le vieillissement de la population avec un doublement des plus de 60 ans en 25 ans ; Deux, l'augmentation des longues maladies avec le chiffre "effrayant" d'un Polynésien sur six de plus de 60 ans en longue maladie ; Trois, les maladies comportementales au sein de notre population, "comme l'obésité qui bat des records" ; Quatre, une augmentation des dépenses de santé passée en 25 ans de 5 à 9% du PIB de la Polynésie.
 

"Un dérapage des dépenses et des maladies"
 
"On va bien au-delà du financement", assure le président de la CPS, Jeff Benhamza. "On balaye plus large. Il y a les relations avec les professionnels de santé, le bien-être, la prévention…" Pleinement conscient des problèmes financiers de la branche maladie de la Protection sociale généralisée, le président de la Caisse insiste tout de même sur le lien entre "l'augmentation des difficultés de santé de santé de notre population" et "l'augmentation des dépenses de santé". Même discours chez Dimitri Pitoeff de A Ti'a i Mua : "On assiste depuis des années à un dérapage des dépenses de santé, qui est également lié à un dérapage des maladies." Le syndicaliste estime que ces assises doivent permettre à tous les acteurs, patients comme professionnels, d'être mis "en face de leurs responsabilités".
 
Tout l'enjeu est de réformer le modèle actuel qui "date de 1995" pour les "20 ou 30 prochaines années" a rappelé Édouard Fritch vendredi. À moins d'un an de la fin du mandat, le chantier a le mérite d'être ouvert mais le pari semble très audacieux.
 

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Rédigé par Antoine Samoyeau le Vendredi 6 Mai 2022 à 18:29 | Lu 2128 fois