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Foyer d'accueil Maniniaura : « être une maman et une jeune fille comme les autres »


PAPEETE, le 9 janvier 2018 - Depuis plus de vingt ans, le foyer Maniniaura, situé à Mahina, accueille de jeunes mères majeures ou mineures et leurs nouveau-nés. Nous avons eu l’occasion de rencontrer la directrice de la structure ainsi qu’une jeune mère de 17 ans qui a accepté d’évoquer son parcours.

A Mahina, non loin de la mer se trouve le foyer Maniniaura. Dans une paisible maison rose et verte, plusieurs monitrices aident de jeunes mères, majeures ou mineures, dont le parcours n’a pas toujours été facile. Accompagnement autour de la grossesse et de la maternité, suivi de la relation mère-enfant, mise en place d’un projet d’intégration et d’insertion sociale et suivi psychologique : telles sont les missions effectuées par le foyer et ce, depuis 1998.

Au sein de la structure, dont la capacité d’accueil est de huit jeunes mères, les rôles sont répartis équitablement. Après leurs journées d’école et de formation, les jeunes femmes retrouvent leurs bébés et partagent leur vie ensemble. Une vie rythmée par des activités, des sorties à la plage ou au cinéma, des discussions, des disputes aussi, qui retombent aussi vite qu’elles ne sont arrivées.


« Tisser un lien de confiance »

Tel que nous l’explique Violaine Utia, directrice du foyer Maniniaura, il y a deux types de placements : « le placement administratif et le placement judiciaire. Le premier fait souvent suite à un signalement des affaires sociales. Le second est généralement lié à une décision rendue par le juge des enfants. » Pour ces jeunes femmes, qui ont parfois été victimes d’abus sexuels, les premiers jours au foyer sont difficiles : « lorsqu’elles arrivent, elles ont peur car c’est un nouveau contexte. Il faut alors tisser un lien de confiance, être à l’écoute. Elles finissent par trouver leur place au sein du foyer », explique Violaine Utia.

Dans deux semaines, Leilanie* aura 18 ans. Mère d’un nourrisson de deux mois, cette jeune fille a été placée au sein du foyer Maniniaura par le juge des enfants afin, explique-t-elle pudiquement de « renouer des liens avec sa famille » : « Mes parents ne s’occupaient pas de moi, j’étais comme livrée à moi-même. Le foyer me permet d’élever mon fils dans de bonnes conditions. » Au foyer, elle se « sent bien » car l’accompagnement la « rassure ». Ses yeux pétillent lorsque l’on évoque ses projets d’avenir. Comme toute jeune fille de son âge, Leilanie souhaite réussir son bac, qu’elle passera en juin, et se lancer dans la vie d’adulte. Sans oublier son passé, elle souhaite désormais acquérir son « indépendance ».

Manutea Gay, président de l’association Emauta pour redonner de l’espoir

Quels sont les différents aspects de la prise en charge ?

« Nous accueillons principalement des jeunes filles mineures qui ont un nourrisson. Nous avons deux objectifs : veiller à ce que la jeune mère soit une bonne mère, lui apprendre à être maman, et veiller à la préparer à sa vie d’adulte. Tel est le travail effectué par les monitrices travaillant au sein du foyer Maniniaura. »

Quels sont les moyens dont vous disposez pour aider ces jeunes femmes à s’insérer dans leur vie d’adulte, notamment dans la vie professionnelle ?

« Premièrement, nous mettons en place la logistique nécessaire pour la prise en charge du nouveau-né et de la jeune maman. L’enfant est placé à la garderie durant la journée pendant que la mère est inscrite au sein d’un établissement scolaire soit d’enseignement général, soit d’enseignement technique. »

Comment faites-vous afin que les jeunes femmes conservent un lien avec leurs familles ?

«Avoir un lien familial est évidemment un aspect très important dans l’épanouissement des jeunes, c’est universel. Pour les jeunes mères qui ont rencontré de graves soucis familiaux, il faut d’une part stabiliser les liens et de l’autre apporter un soutien psychologique. Nous veillons à ce que, malgré un passé parfois douloureux, la jeune mère puisse s’épanouir comme une jeune fille normale. C’est au cas par cas car aucune situation ne se ressemble, il faut innover en fonction du caractère de la jeune fille et de ce qu’elle a vécu. C’est la raison pour laquelle nous gardons les mères durant plusieurs années, tant que la situation nécessite un accompagnement. »

Qu’en est-il du rôle des pères ?

« Là encore, c’est au cas par cas. Il y a des situations où le père, immature, est totalement absent et d’autres où les papas, qui sont souvent de jeunes mineurs, assument. Etant une structure indépendante, autant que faire se peut, nous essayons d’encourager le lien entre le père et l’enfant. Les papas peuvent avoir un droit de visite réglementée. Tout dépend cependant de l’autorité judiciaire qui place les jeunes mamans. »






L'association Emauta

L'association gère quatre foyers à Tahiti : Le bon samaritain pour les hommes, La samaritaine pour les femmes avec ou sans enfants, Te arata (l'arche) pour les familles et le foyer Maniniaura, situé à Mahina. Ces foyers gérés fonctionnent grâce à des subventions du Pays et à des apports associatifs.

Rédigé par Garance Colbert le Mercredi 9 Janvier 2019 à 16:16 | Lu 1774 fois