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Étienne Raapoto, 40 ans de ve'a


TAHITI, le 24 mars 2022 - Il a été le journaliste emblématique du Ve’a de Polynésie la 1ère, Etienne Raapoto a présenté son dernier journal télévisé en langue tahitienne en 2016. Depuis, cet homme qui se définit comme un épicurien. Il profite de la vie. Il sera sur scène ce vendredi et ce samedi pour le concert Himene a Tau.

"Je vais chanter, mais je ne suis pas un chanteur professionnel", annonce Etienne Raapoto. Il compte parmi les artiste du spectacle Himene a Tau prévu vendredi et samedi au grand théâtre de la Maison de la culture. Il a été, pendant près de 40 ans, un journaliste emblématique de Polynésie la 1ère. Il n’a cessé durant toutes ces années de défendre et de faire la promotion du reo mā’ohi à l’antenne, mais pas seulement. En 2016 par exemple, il a fait partie de l’équipe en charge de la traduction du dessin animé Vaiana, de Disney. En 2017, il a prêté votre voix à la sonorisation du dictionnaire de l’Académie tahitienne. Étienne Raapoto est aussi un homme de théâtre. En 2020, il a été élevé au rang de chevalier de l’Ordre de Tahiti Nui.


Entre animation… et théologie

Étienne Raapoto est né en 1951 à Tahiti. Son père, originaire de Raiatea, est Samuel Raapoto. "Pour vous donner une idée du personnage qu’il était, il suffit de préciser que le lycée de Arue a pris son nom", explique-t-il. Il était pasteur, président de l’église évangélique devenue l’église protestante mā’ohi. Sa mère est originaire de Tahiti. Elle est de la grande famille des Teriierooiterai. "Jean-Claude Teriierooiterai était un cousin germain", précise-t-il.

D’abord scolarisé à l’école primaire protestante, puis au collège des garçons Charles Viénot, il est allé en France poursuivre ses études. À l’âge de 17 ans, il a quitté Tahiti. "Mon père souhaitait que je fasse mes études dans une sorte d’école pastorale pour prendre la relève, mais honnêtement cela ne m’enchantait pas. Ce n’était pas du tout mon truc, j’étais plutôt attiré par les métiers de l’animation, le socio-culturel. C’est pourquoi j’ai bifurqué." Il a séjourné un temps à Lausanne, en Suisse, et dans diverses villes de France. Il est resté quatre années en métropole pour être instructeur à la formation de personnel d’encadrement éducatif et d’animation. Il a également suivi des cours de théologie.

De retour à Tahiti avec un diplôme d’instructeur, il a formé les personnels d’encadrement et d'animation auprès du CPCV, le Comité protestant de centres de vacances, des Centres d'entraînement aux méthodes d'éducation active (Cemea) et de la Maison des jeunes et de la culture de Paofai. En 1976, il a pris la direction de la Maison des jeunes et de la culture de la commune de la commune de Pirae. Henri Hiro, quelques temps auparavant l’avait encouragé à passer un concours de recrutement d’animateur pour pouvoir prétendre à un tel poste. Il garde un heureux souvenir de ces actions au sein de cet établissement. "On formait des jeunes, on a ouvert un centre aéré, il y avait une bibliothèque, on fonctionnait avec les écoles de la ville", se rappelle-t-il.

Le reo avec Maco Tevane

En parallèle, il a étudié le reo tahiti. "Je me suis aperçu après toutes ces années passées en France que je ne parlais pas ma langue. On parlait tahitien à la maison, mais à l’école c’était interdit." Il se tourne alors vers son père qui l’encourage à prendre un enseignant. Étienne Raapoto a étudié sa langue auprès Marc Maamaatuaiahutapu Tevane, mieux connu sous le nom de Maco Tevane. Pendant trois ans, il fait évoluer ses connaissances, grammaticales notamment. "Mais je manquais toujours de vocabulaire." À nouveau, il va voir son père qui l’a mis à l’épreuve. "Il voulait s’assurer que j’étais vraiment motivé ! Il m’a dit : va rejoindre ta tante à Raiatea." Laquelle ne parlais pas un mot de français. "J’y suis allée. Je suis restée auprès d’elle, à Tevaitoa. C’est assez loin de Uturoa et, à l’époque, il y avait peu de transport, j’étais coincé là-bas. J’ai pu progresser très rapidement!"

Entrée à RFO en 1983

Alors qu’il était toujours directeur de la Maison des jeunes de Pirae, il a été invité à intégré le jury d’un concours télévisé animé par Michèle de Chazeau, sur RFO. Ce concours invitait les élèves des établissements du secondaire à s’affronter sur le thème de la culture polynésienne. C’est à ce moment-là qu’il a été remarqué par a chaîne. "On m’a demandé si je ne voulais pas être animateur radio, ce que j’ai accepté." Il a intégré alors ce qui s’appelait la "section tahitienne". C’était en 1983. Étienne Raapoto s’est investi complètement dans ses tâches. Rapidement, il a réclamé une formation pour pouvoir devenir journaliste, ouvrant la voie aux autres animateurs de langue tahitienne. Étienne Raapoto est devenu le premier journaliste bilingue français/reo tahiti. Ce qui lui vaut d’apparaître dans le huitième volume de l’Encyclopédie de Polynésie française.

Pour diverses raisons, après un peu d’antenne en Polynésie, Étienne Raapoto a demandé une mutation au siège. Il a été envoyé en Guadeloupe où il est resté trois années. "J’ai pu, grâce à cela, aller également en Guyane et en Martinique, on était envoyé en renfort selon les besoins." Il est également passé en Nouvelle-Calédonie, à Wallis-et-Futuna. "Mon seul regret est de ne pas avoir pu aller à Mayotte." Cette période a été formatrice pour le journaliste. "Quand tu découvres tant de choses différentes, tu évolues très vite !"

Une vie de présentateur à Tahiti


En Polynésie, Étienne Raapoto a été animateur radio et télé, il postulé au poste de rédacteur en chef, il a été grand reporter. Il a contribué à la programmation d’émissions à l’antenne, toutes centrées sur la Polynésie et les Polynésiens, leur mode de vie et leur langue. Il est le créateur, notamment, des émissions : Haumanava, Ha’amana’o na, Fare Ma’ohi et Tahi, Rua, Toru.

Il a présenté son dernier journal en 2016. "Je suis vraiment très content d’avoir fait ce métier pendant 40 ans. Mais y retourner ? Non !" Il profite désormais de la vie. Il passe des heures dans son jardin. "Et puis, je suis un épicurien", dit-il. Il aime manger, boire, rire. Il aime la vie telle qu’elle se présente.



Rédigé par Delphine Barrais le Jeudi 24 Mars 2022 à 10:09 | Lu 1686 fois