Tahiti Infos

Enfance: un secrétaire d'Etat contre les "situations de détresse"


Paris, France | AFP | vendredi 25/01/2019 - Un quart des SDF sont d'anciens enfants placés: un secrétaire d'Etat à la Protection de l'enfance a été nommé vendredi, avant l'annonce lundi d'une feuille de route qui doit permettre de "prévenir ces situations de détresse", selon le Premier ministre Edouard Philippe.

341.000 mineurs font l'objet d'une mesure de protection de l'enfance en France (fin 2017), dont plus de la moitié sont placés en institution ou dans des familles d'accueil.
"Nous devons faire mieux" en matière de protection de l'enfance, a reconnu Edouard Philippe après la nomination du député LREM Adrien Taquet à un poste de secrétaire d'Etat dédié à ce dossier, auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn. Le gouvernement doit présenter lundi les grands axes de sa stratégie en la matière, qui sera soumise à une concertation.
Un documentaire accablant diffusé le 16 janvier sur France 3 révélait des violences insoutenables dans certains foyers d'accueil, notamment à Eysines en Gironde: adultes débordés levant la main sur des enfants, enfants victimes de viols de la part de leurs pairs, éducateurs sans aucune formation...
La diffusion du documentaire, suivie d'un débat auquel participait la députée LREM Perrine Goulet, elle-même ancienne enfant placée, a suscité une émotion considérable. La députée a demandé vendredi avec plusieurs collègues de la majorité une commission d'enquête parlementaire.
"Comment expliquer que l'Aide sociale à l'enfance, censée protéger des mineurs, semble trop souvent une machine à broyer des enfants déjà bien abîmés par la vie? Comment expliquer que 40% des SDF de moins de 25 ans sont d'anciens enfants placés et que 70% sortent sans diplôme de l'Aide sociale à l'enfance? Il n'est plus tolérable de laisser nos enfants continuer à se perdre", indique le texte de la demande. Ouverte aux "députés de tous bords", la demande n'a pas encore été formellement déposée.
 

- Moyens supplémentaires -

 
"Corriger les dysfonctionnements c'est bien, mais prévenir les violences, les mauvais traitements, arriver à identifier le plus tôt possible que quelque chose ne va pas, mettre en œuvre des accompagnements personnalisés pour éviter que la situation se dégrade, c'est ça qui est essentiel", a déclaré vendredi Edouard Philippe, annonçant "une mobilisation de moyens supplémentaires". Le budget de la protection de l'enfance avoisine les 8 milliards d'euros par an.
La nomination d'Adrien Taquet est "un signe positif", a réagi la fédération des associations de protection de l'enfant CNAPE. La Voix de l'Enfant "se réjouit" de cette création qu'elle "appelait de ses voeux de longue date".
"C'est un très bon signal, surtout couplé à la commission d'enquête parlementaire", a réagi Sylvain Louvet, auteur de l'enquête de huit mois diffusée dans "Pièces à conviction".
Parmi les pistes connues de la feuille de route gouvernementale, Mme Buzyn avait annoncé courant novembre la prise en charge à 100% des frais de santé des jeunes confiés aux services sociaux et un accompagnement financier pour ceux qui souhaitent poursuivre des études.
La nomination d'un secrétaire d'Etat, et non d'un haut commissaire comme le gouvernement l'envisageait, apporte à Adrien Taquet le poids politique indispensable pour engager la concertation avec les départements, qui sont maîtres d'oeuvre sur le terrain. L'Etat et les départements se renvoient souvent la balle sur le sujet.
"Il est temps que l'Etat s'engage", a réagi le département de Seine-Saint-Denis. Les juges pour enfants du tribunal de Bobigny ont lancé récemment un "appel au secours" sur les délais de prise en charge des enfants, qui vont "jusqu'à 18 mois" faute d'éducateurs pour exécuter les jugements.
Elu député des Hauts-de-Seine en juin 2017, "marcheur" de la première heure, Adrien Taquet, 42 ans, s'est engagé à "à bosser sur les angles morts de la République", notamment le handicap, l'autisme et la condition des détenus.
Une sensibilité qui lui sera utile pour s'attaquer aux nombreux "angles morts" de la protection de l'enfance, dont l'insuffisance criante d'éducateurs formés, l'absence d'unités pédopsychiatriques pour soigner les enfants victimes de violences, ou encore l'abandon des jeunes sortis du dispositif à 18 ans. 

le Vendredi 25 Janvier 2019 à 05:20 | Lu 387 fois