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En Nouvelle-Calédonie, Ayrault promet un Etat attentif et respectueux des choix


En Nouvelle-Calédonie, Ayrault promet un Etat attentif et respectueux des choix
NOUMÉA, 27 juillet 2013 (AFP) - Jean-Marc Ayrault, en visite depuis deux jours en Nouvelle-Calédonie, a rassuré les élus autonomistes aussi bien qu'indépendantistes sur la vigilante neutralité de l'Etat, tout en insistant sur sa détermination à accompagner l'archipel sur le chemin de la décolonisation tracé par l'accord de Nouméa.

"L'Etat remplira ses obligations. Personne ne doit en douter". Vingt-cinq ans après le drame d'Ouvéa et les accords de Matignon qui ramenèrent la paix, quinze ans après l'accord de Nouméa qui renforçait aussi le rééquilibrage économique en faveur des Kanaks, le Premier ministre a donné la ligne de son gouvernement.

Accompagnant Lionel Jospin en 1998 pour la signature de l'accord de Nouméa comme président du groupe PS à l'Assemblée nationale, M. Ayrault n'a pas caché son "émotion" de revenir sur cette terre à la veille d'échéances cruciales.

Selon les termes de l'accord de Nouméa, dont le président François Hollande s'est dit le "garant", le prochain Congrès qui sortira des élections territoriales de 2014 aura la charge de fixer la date d'un référendum d'autodétermination d'ici 2018. Si cela n'est pas fait, il revient à l'Etat de l'organiser.

La campagne électorale n'a pas encore débuté mais l'inquiétude d'un retour des tensions pointe parfois. Les multiples rencontres avec les élus, dont certaines à huis clos, ont permis "que la parole se libère et que les choses se disent franchement", selon l'entourage de M. Ayrault.

Un avis partagé par Paul Néaoutyine, président FLNKS de la province Nord et figure historique du mouvement indépendantiste. "M. Ayrault a rappelé ce qu'il y a dans les accords", a-t-il noté. "Nous, au FLNKS, disons qu'il faut s'acquitter de ce qui est prévu", à savoir les derniers transferts de compétences hormis les régaliennes.

"Il faut savoir faire le saut, prendre nos responsabilités et garder des liens avec la France", a-t-il expliqué à l'AFP.

De son côté, le député autonomiste Philippe Gomes (affilié à l'UDI à l'Assemblée) s'est félicité que le Premier ministre ait tenu un discours "de responsabilité et d'impartialité".

"On est toujours sur un petit feu qui couve"

"L'Etat est réduit à sa portion congrue en terme de compétences et pour autant le rôle politique de l'Etat reste essentiel: c'est lui qui a retissé les fils du dialogue", a souligné M. Gomes à l'AFP, reconnaissant " que l'histoire de la Nouvelle-Calédonie s'est engagée sur la voie de la paix sous deux gouvernements socialistes", de Michel Rocard et Lionel Jospin.

Cette paix qui ne semble jamais tout à fait acquise a été au coeur des prises de paroles de Jean-Marc Ayrault: à Nouméa, capitale de la province Sud, en province Nord, à l'occasion de la visite de l'usine de nickel de Koniambo, --symbole du rééquilibrage et de la formation de cadres kanaks-- et à Ouvéa (province des Iles Loyauté).

Toutes les occasions ont été saisies pour rappeler "la force de l'esprit de paix", saluer "le travail extraordinaire de réconciliation" et la nécessité d'un "travail de mémoire", appeler à ne pas gaspiller "l'héritage inestimable" de Jean-Marie Tjibaou l'indépendantiste et Jacques Lafleur l'anti-indépendantiste qui surent "faire un pas l'un vers l'autre".

Les cérémonies de coutume kanak, échange symbolique de cadeaux et de paroles, faites au Sénat coutumier et dans les tribus ont été des moments privilégiés pour appuyer ce discours.

En effet, sur le Caillou, "on est toujours sur un petit feu qui couve", estime Philippe Gomes," c'est un pays fragile, avec une revendication indépendantiste et des inégalités sociales majeures qui sont souvent ethniques".

Dans l'éducation par exemple, 1 jeune Kanak sur 20 accède à des études supérieures contre 1 jeune Européen sur 5, et les bidonvilles à la périphérie de Nouméa abritent des Kanaks des îles Loyauté poussés à l'exode par le manque de perspective économique dans leurs tribus.

La "jeunesse" tant citée par Jean-Marc Ayrault est bien l'enjeu de ce territoire: sa formation, sa reconnaissance et son intégration.

Le plan de formation des kanaks "Cadres Avenir" continue, des "contrats de développement" soutenus par l'Etat accompagneront les initiatives de création d'activités dans les îles Loyauté et dans le Nord. Bientôt la Nouvelle-Calédonie pourra se doter d'autorités administratives indépendantes comme une Autorité de la concurrence, outil de lutte contre la vie chère.

Et si finalement, les Calédoniens décidaient de ne pas aller au référendum pour se laisser plus de temps de trouver les chemins de leur "destin commun", l'Etat serait prêt à réviser la Constitution pour le lui permettre.

sla/mad/fm

Rédigé par Par Sophie LAUTIER le Samedi 27 Juillet 2013 à 06:15 | Lu 576 fois