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Edmond Simeoni, le "défenseur du peuple corse", est décédé


Ajaccio, France | AFP | vendredi 14/12/2018 - Edmond Simeoni, 84 ans, décédé vendredi à Ajaccio, est une figure emblématique du mouvement nationaliste corse depuis la fin des années 60 et le père de Gilles Simeoni, actuel homme fort de l'île de Beauté.

Né le 6 août 1934 à Corte en Haute-Corse, ce médecin gastro-entérologue se présentait sur son site internet, sur lequel il continuait quotidiennement à commenter l'actualité, comme un "défenseur du peuple corse", "passionné de la famille, de la médecine, du sport, de la politique" et souffrant d'une "allergie grave à l’injustice".
Le 24 novembre dernier, alors qu'il recevait à Ajaccio le Coppieters Awards 2018, un prix saluant son engagement en faveur du droit à l'auto-détermination des peuples d'Europe, Edmond Simeoni partageait une nouvelle fois ses convictions en faveur de l'émancipation des peuples. "Tout peuple a le droit d'être reconnu, tout peuple a le droit d'être libre", avait-il martelé dans son discours devant nombre de politiques insulaires au premier rang desquels son fils cadet, Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de Corse.
Celui qui reconnaissait dans un entretien à l'AFP en janvier avoir une "capacité de révolte décuplée… avec l’âge" était engagé dans la "lutte d'émancipation corse depuis 1961".
Assumant une "obsession" pour son île de Beauté, il restera dans l'Histoire comme le leader de ce qui se voulait une occupation symbolique de la cave agricole d'Aléria mais fut la première action violente de la mouvance autonomiste, l'Action régionaliste corse (ARC), fondée en 1967 avec son frère ainé Max. 
Le 21 août 1975, Edmond Simeoni occupe avec une douzaine de militants armés de fusil de chasse cette cave près d'Aléria (Haute-Corse) pour "dénoncer des malversations" et l'attribution par l'Etat de terres viticoles aux rapatriés d'Algérie. Quelque 1.500 gardes mobiles donnent l'assaut et deux membres des forces de l'ordre sont tués tandis qu'un militant de l'ARC est gravement blessé.
 

- "jamais partisan de l'indépendance" -

 
"A part Aléria, qui a été un signal fort, nous n'avons jamais utilisé la violence, nous l'avons même dénoncée, combattue", assurait le Dr Simeoni en janvier dernier à l'AFP.
"Nous avons toujours été partisans d'un statut d'autonomie au sein de la République française. Je milite depuis des décennies et je n'ai jamais été partisan de l'indépendance. Jamais !", avait-il également affirmé.
Il a été condamné en juin 1976 à cinq ans de prison dont trois ferme pour les événements d'Aléria. Son fils Gilles, alors âgé de neuf ans, restera marqué par ses visites au parloir de la prison de la Santé. 
Après sa sortie de prison en janvier 1977, le Dr Simeoni est élu en août 1982 à la première Assemblée de Corse et en 1983 conseiller municipal de Bastia avant d'être victime d'un premier infarctus et de subir le premier d'une série de pontages coronariens.
Il avait été élevé avec ses deux frères par sa mère, sage-femme et jeune veuve, dans le village de Lozzi en Haute-Corse, avant d'étudier au lycée de Bastia puis de partir à Marseille où il suivra des études de médecine et jouera à l'Olympique de Marseille.
C'est dans la cité phocéenne, à 20 ans, qu'il rencontre Lucie, une militante communiste d'origine alsacienne qui deviendra sa femme et la mère de ses deux fils: Marc, un consultant et créateur de start-up qui sera condamné en 2010 à trois ans de prison avec sursis pour avoir hébergé Yvan Colonna, et Gilles qui sera l'un des avocats du berger de Cargèse condamné à la réclusion à perpétuité pour l'assassinat du préfet Erignac. Edmond Simeoni sera quant à lui le président du comité de soutien à Yvan Colonna.
Cet homme longiligne, au regard bleu acier, grand-père de cinq petits-enfants, était aussi le président de l'association "Corsica Diaspora et amis de la Corse" depuis 2004 et un féministe qui avait notamment écrit un livre sur les résistantes corses, "Lettre aux femmes corses".

le Vendredi 14 Décembre 2018 à 04:52 | Lu 423 fois