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Deux baleines blessées : Mata Tohora saisit le procureur


"Ces deux observations la même semaine montrent qu’il y a des accidents, et certainement plus qu’on ne l’imagine", constate Mata Tohora. ©Mata Tohora
"Ces deux observations la même semaine montrent qu’il y a des accidents, et certainement plus qu’on ne l’imagine", constate Mata Tohora. ©Mata Tohora
Tahiti, le 30 septembre 2025 – Sur ses réseaux sociaux, l'association Mata Tohora annonce avoir fait un signalement auprès du procureur de la République après avoir constaté que deux baleines présentaient des blessures importantes liées à un choc.
 
Le 26 septembre, Mata Tohora avait signalé sur sa page Facebook l’observation de deux baleines distinctes avec des blessures sur le dos : une baleine juvénile à la Presqu’île et une baleine adulte accompagnée d’un baleineau à Moorea. Selon l’association, “après analyse des éléments reçus, il s’agit d’un impact avec une coque ou l’étrave d’un bateau de taille moyenne”. Ce mardi, l'organisation a confirmé avoir saisi le procureur de la République à ce sujet.
 
En Polynésie française, les baleines sont des espèces protégées, et les blessures constatées peuvent provenir d’hélices de bateaux, suggérant un accident lié à une navigation non respectueuse. Si les faits se confirment, il pourrait s’agir d’une infraction à la réglementation environnementale.
 
Contactée, de Dr Agnès Benet, océanologue et fondatrice de Mata Tohora explique dans son mail: 
 
« Mata Tohora est une association qui œuvre pour la protection des cétacés depuis 2013. Nous avons depuis toutes ces années mis en place un réseau d’observateurs formés et déployés sur les 5 archipels, ce qui nous permet de recevoir de nombreuses informations.
La semaine dernière, nous avons donc été informés d’une baleine juvénile blessée. La plaie encore rosée indique qu’il s’agit d’un accident récent, car les cétacés cicatrisent relativement vite si la plaie reste superficielle. Dans le cas contraire, l’accident peut avoir des conséquences graves, comme une septicémie ou la mort de l’animal.
Dans ce cas précis, la baleine a été revue par différentes personnes grâce à notre communication sur les réseaux sociaux, qui a permis de suivre l’évolution de la plaie : une semaine après, elle n’est plus rose mais blanche, donc en bonne voie de cicatrisation. La communication est donc essentielle pour le suivi des accidents dans le milieu naturel sur une telle superficie. La collaboration des pêcheurs et des whale-watchers est une aide précieuse.
Nous avons suivi la procédure que nous avons mise en place en 2017 avec la DIREN pour le RLE, à savoir contacter la DIREN et la gendarmerie. Nous avons fait le signalement au Parquet de Papeete, et la procureure nous a répondu qu’une enquête pénale est diligentée sous sa direction. Les gendarmes nous ont également contactés pour plus d’informations.
La seconde baleine blessée est une mère accompagnée de son baleineau. Ces deux observations la même semaine montrent qu’il y a des accidents, et certainement plus qu’on ne l’imagine.
La vitesse est le principal facteur de collisions, qui peuvent être mortelles, comme dans le cas extrêmement triste de Coco l’année dernière. Selon de nombreuses études internationales, à partir de 18 nœuds, 9 baleines sur 10 meurent en cas de collision, et à 10 nœuds, 3 baleines sur 10.
Pour limiter les risques, après concertation avec les capitaines de navires à grande vitesse, nous avons demandé que la vitesse soit réglementée à moins de 10 nœuds dans la passe de Papeete et de Vaiare. Les embarcations à moteur de toutes tailles sont concernées, y compris les bateaux rapides et les jet-skis. Dans le cas du juvénile blessé, il s’agit probablement d’un bateau de taille moyenne rapide, avec une coque et une étrave tranchante.
Il ne s’agit pas de blâmer quelqu’un, mais de sensibiliser tous les usagers de la mer à ralentir, quel que soit le lieu et le type d’activité. Nous sommes en pleine saison des baleines, avec des baleineaux dans les lagons, passes et baies. Parler du risque de collision est vraiment essentiel.
»
 
Mata Tohora rappelle ainsi l’importance de la vigilance et de la responsabilité de chacun en mer pour protéger ces espèces fragiles.
 

Rédigé par Darianna Myszka le Mercredi 1 Octobre 2025 à 15:59 | Lu 2498 fois