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Des expropriations qui coûtent cher à Anaa


Tahiti, le 26 février 2025 – Dans son rapport sur le contrôle des comptes et de la gestion de Anaa entre 2018 et 2022, la chambre territoriale des comptes (CTC) recommande notamment à la commune de maîtriser son endettement qui tend à “s'intensifier”. En cause : d'importantes charges dues essentiellement à l'indemnisation de propriétaires expropriés des emprises foncières utilisées pour la reconstruction de l'atoll dévasté par un cyclone en 1983. Montant de la facture : 138 millions de francs.
 
C'est la première fois que la Chambre territoriale des comptes (CTC) se penche sur la situation de ce petit atoll des Tuamotu qui comptait 530 habitants au recensement de 2022. Un “contrôle proportionné aux enjeux de la collectivité ainsi qu'aux contraintes liées à son éloignement” opéré par la CTC sur la période 2018 -2022. Au total, la juridiction financière émet six recommandations parmi lesquelles on notera surtout des investissements majeurs à opérer pour remettre en état la mairie qui ne remplit plus sa fonction d'abri cyclonique. Mais aussi, un endettement à maîtriser dans un contexte où il “devrait s'intensifier” alors que la commune n'engrange pas suffisamment de revenus propres et que sa capacité d'autofinancement présente un déficit de près de 30 millions de francs.
 
La CTC souligne notamment une procédure d'expropriations qui a de lourdes conséquences financières pour cette petite commune associée. En cause : le cyclone Orama qui a totalement dévasté l'île en 1983 ; et son village principal en particulier qui a dû être reconstruit sur un site plus protégé constitué de terres privées. Des parcelles acquises par la commune après une procédure d'expropriation, fixée par ordonnance en 2008, qui la conduit à devoir indemniser les propriétaires ou ayants droit de ces terrains. “Le montant cumulé des indemnisations ayant fait l'objet de décisions de justice s'élève désormais à plus de 122 millions de francs, auquel il conviendra de rajouter le montant de celles issues des jugements portant sur quatre parcelles, dont la superficie exacte à indemniser reste à délimiter, estimé à environ 80 millions de francs.”
 
16 ans de procédure
 
C'est ainsi qu'après 16 ans de procédure, la commune qui avait réussi à obtenir un financement dès 2009 de 64,4 millions de francs (grâce à un emprunt de 56,8 millions et une subvention de l'État de 7,6 millions), doit encore trouver un peu plus de 138 millions pour indemniser les propriétaires de ces parcelles où se trouve aujourd'hui le village de Tuuhora.
 
Par ailleurs, la CTC relève la vétusté de la mairie-abri de Anaa dont “la vocation paracyclonique ne peut plus être attestée alors même qu'elle est indispensable pour la sécurité des habitants”. Une réhabilitation nécessaire donc et qui coûterait 8 millions de francs. Sauf que la commune n'a aucune marge de manœuvre avec une capacité d'autofinancement négative et des fonds propres quasiment inexistants. Pour les faire progresser, la CTC recommande ainsi d'augmenter les fameux taux des centimes additionnels aujourd'hui très en-deçà du plafond, ainsi que les tarifs de la taxe de séjour.
 
Il n'en demeure pas moins que la commune devra forcément contracter un emprunt supplémentaire pour exécuter ces décisions de justice, ce qui l'endetterait encore davantage sur plusieurs exercices. Ultime solution : se tourner vers l'État et le Pays pour obtenir “le versement, à titre exceptionnel et hypothétique, d'une subvention”.

Rédigé par Stéphanie Delorme le Mardi 25 Février 2025 à 14:36 | Lu 2820 fois