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Cancer : les Amazones polynésiennes partent à l’assaut


PAPEETE, le 6 avril 2018. L’association Amazones Pacific vient de voir le jour, elle est la petite sœur d’une initiative martiniquaise. Le concept : construire une communauté et, à terme, ouvrir une maison d’accueil pour les femmes touchées par le cancer.

Mélanie est une Amazone. Elle est aussi fille d’Amazone. Installée en Polynésie depuis trois ans et demi, elle est Martiniquaise d’origine et elle a participé à la naissance de l’association Amazones aux Antilles. Cette association est un cocon, une maison mais aussi une communauté qui suit les femmes atteintes par le cancer.

"Pendant et surtout après le protocole de soin, nous sommes souvent livrées à nous-mêmes", constate Mélanie. Le protocole de soin correspondant à la période entre l’annonce de la maladie et la fin du traitement, lorsque le patient est considéré en rémission.

"De retour à la maison, avec nos cicatrices et nos crânes nus, la reconstruction est difficile, qu’elle soit mentale ou physique. La maladie touche à la féminité, certaines femmes culpabilisent, vivent mal cet ‘après maladie’ et ne trouvent pas toujours de réponses auprès de leur entourage. Il reste un vrai mal-être." Elle ajoute, "on veut faire comprendre aux patientes, à leur entourage et au reste de la société qu’on a le droit d’être mal, de ne plus accepter d’être touchée pas même par un médecin, de ne pas accepter son corps…"

Un certain nombre de patientes ne savent pas "quoi faire de ce nouveau corps, de cette nouvelle identité". L’objectif de l’association Amazones est d’accueillir, d’accompagner, de réconforter, d’aider à la reconstruction, au retour à la vie.
Mélanie est arrivée en Polynésie à la fin de son propre traitement. "Un traitement lourd", confie-t-elle. Elle a fait de nombreux aller-retour en Martinique et en France dans le cadre de sa reconstruction physique. Elle a participé à la mise en place de l’association Amazones Martinique.

À l’occasion d’octobre 2017, le cœur du Projet Amazones était une exposition photo "où 17 femmes ont joué le jeu", se réjouit Mélanie. "Pour certaines cela a été l’occasion de se dépasser, d’oser se montrer. "

D’autres actions ont également été menées afin de permettre cet autre regard sur la maladie : des témoignages d’Amazones, une websérie de dix épisodes, un documentaire sur la vie « après », qui sont passés sur les écrans télévisés.

Octobre rose 2017 fut l’occasion de créer l’instant de quelques semaines la « Villa Woz » (Maison rose en créole), un véritable cocon pour les Amazones dans lesquelles elles ont pu bénéficier gracieusement d’un espace dédié pour prendre soin d’elles et se sentir « à nouveau », femmes. Soixante-dix ateliers dispensés par des bénévoles, intervenants professionnels de l’accompagnement et du bien-être (kinésithérapie, sophrologie, massage, coaching, esthétique, danse sur talon, yoga etc…), mais également des conférences, des groupes de paroles ont vu le jour pendant toute une semaine parler du cancer et des traitements, autrement…

L’objectif du projet Amazones est que cette Villa devienne pérenne… "On n’est pas seulement malades en octobre", ironise Mélanie. "En Martinique c’est en très bonne voie." En Polynésie, elle a déjà effectué un certain nombre de démarches avec une équipe solide. "Le projet est bien reçu partout où nous nous présentons."

Mélanie monte maintenant sa petite sœur polynésienne. Pour ce faire, elle a rencontré des patientes, listé les besoins locaux car elle ne veut pas faire "un copié collé de la version antillaise". L’association Amazones Pacific est née en mars.
Pour l’instant, à Tahiti, Mélanie et son équipe veulent "créer l’événement". "Pour sensibiliser à notre cause, il faut se faire connaître." Si, à terme, l’association polynésienne rêve d’ouvrir une maison d’accueil, elle se concentre aujourd’hui sur la communication, la consolidation de la communauté d’Amazones, la préparation du projet qui verra le jour en octobre 2018 au fenua. "Nous souhaitons passer par l’expression culturelle", insiste-t-elle. "Des artistes sont invités à réaliser des photographies, sculptures, tableaux. Le lycée professionnel de Faa’a par exemple participera à la réalisation d’œuvres sur le thème la femme et le cancer. Des photographes sont prêts à jouer le jeu. " Un hymne et son clip se préparent, un concours de court métrage ainsi qu’une web série pourraient aussi voir le jour. Tout cela pour que la société porte un "autre regard sur la maladie". "Pour comprendre les autres, il faut réussir à se mettre à leur place, savoir ce qu’ils vivent." Les Amazones sont parties au combat, espérant que le plus grand nombre de personnes les suivront dans leur chevauchée.



Pour en savoir plus

www.projetamazones.com

Contact polynésien : 87 72 33 70



Balade nocturne à la Villa Woz


Mini série "Nola fait son cinéma"


Les Amazones, peuple de guerrières

Dans la mythologie grecque, les Amazones sont un peuple de femmes guerrières que la tradition situe sur les rives de la mer Noire. D’autres historiens les plaçant plus précisément en Asie Mineure, certains en Libye. Ce sont des femmes courageuses et hardies, capables de grands exploits et qui, selon la légende, se coupaient un sein pour pouvoir mieux tirer à l’arc. Au-delà de l’aspect mythologique, des historiens suggèrent que les Amazones pourraient correspondre historiquement aux femmes guerrières des peuples scythes et sarmates. Leur existence est souvent fantasmée.

Rédigé par Delphine Barrais le Vendredi 6 Avril 2018 à 09:46 | Lu 5180 fois