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Assises du Medef : comment devenir une entreprise innovante ? par Olivier Kressmann


Olivier Kressmann, président du Medef Polynésie.
Olivier Kressmann, président du Medef Polynésie.
PAPEETE, le 4 mars 2016- Les Assises du Medef auront lieu jeudi prochain, avec pour thème L'Entreprise innovante. Olivier Kressmann, président du Medef Polynésie, nous présente les enjeux qui animeront les débats et les conférences des assises.

Le jeudi 10 mars, de 7h30 à 16h30 au Méridien, le Medef organisera ses Assises annuelles. Pour cette neuvième édition, un thème porteur sera développé au cours de nombreuses conférences d'une quinzaine de minutes : l'entreprise innovante.

Un thème découpé en quatre grands axes, présentés ci-dessous par le président du Medef. Le but est de permettre aux patrons de se tenir informer des dernières tendances, car "quand une entreprise devient immobile, elle meurt" explique Olivier Kressmann. Un bon argument. Du coup, les entreprises qui souhaitent participer peuvent trouver tout le programme sur tahiti-infos.com, et s'inscrire sur medef.idt.pf. Il ne reste plus de places pour le dîner de clôture.

"UNE ENTREPRISE INNOVANTE SE REMET EN CAUSE"

Tahiti Infos : Les assises du Medef en sont à leur neuvième édition, et chaque année les hommes politiques font le déplacement. Aurez-vous un message à leur adresser ?
Olivier Kressmann : Le message est que nous sommes sur le pont pour participer au développement du Pays, à la réécriture de son logiciel économique. On le sait depuis longtemps mais aujourd'hui il est indispensable d'agir vite. L'ère du CEP est résolument derrière nous, il faut penser autrement l'économie du Pays. Cette nouvelle économie passera par une collaboration du monde des entreprises, les partenaires sociaux et le gouvernement.

TI : Nouvelle économie, ce sera effectivement le thème des Assises du Medef. Vous l'avez divisé en quatre grands axes, avec en premier les données. On pense big data, open data… Mais le gouvernement partage difficilement ses données, et l'analyse du big data est-il seulement possible dans un petit Pays comme le notre ?
Olivier Kressmann : Il faut y croire, car ce sont des éléments incontournables pour le développement d'une entreprise d'avoir accès aux informations publiques. C'est même assez anormal que nous ayons autant de difficulté à accéder à ces informations, à l'ère du numérique. Mais l'administration a commencé des travaux conséquents pour se réorganiser dans ce domaine, je pense en particulier à la DICP (les Contributions), mais ça ne suffit pas. D'autres acteurs comme l'IEOM et l'ISPF sont aussi très actifs, et peu d'entreprises sont au courant qu'il y a tant de données, issues des douanes, des entreprises… Mais il faut plus le structurer.

Notre invité prestigieux, vice-président du Medef France, Thibault Lanxade qui est un jeune chef d'entreprise de 43 ans, connait très bien ce sujet pour l'avoir défendu devant les instances nationales et européennes.

TI : Votre deuxième thème n'est pas dans les technologies mais dans l'organisation des entreprises, et là aussi on voit que des choses bougent en Polynésie avec le Congrès des RH ou le Club Ideo qui s'est créé l'année dernière.
Olivier Kressmann : Une entreprise innovante, qui va de l'avant, c'est aussi une entreprise qui se remet en cause sur son organisation interne, avec une notion de délégation qui est importante pour mettre en valeur les ressources humaines que l'on a. Dans le même thème, "transformer et partager", il y a aussi l'aspect juridique, il faut être vigilant sur les relations juridiques que l'on a avec les tiers, les contrats avec les autres entreprises. Dernier point, important pour nous qui sommes loin, c'est de s'ouvrir à ce qu'on appelle les réseaux de compétence. Il faut arrêter d'essayer de réinventer l'eau chaude, et de chercher la compétence à l'extérieur alors qu'elle existe en Polynésie. Et parce qu'elle est gérée par la concurrence, on s'interdit d'y faire appel… Mais c'est par la collaboration d'entités locales que l'on arrive à grandir.

TI : Le troisième axe de l'entreprise innovante, c'est "Financer et bien gérer". Alors que les tribunaux regorgent de dossiers de détournements de fonds jusqu'au plus haut niveau, on se demande si les entreprises peuvent faire mieux.
Olivier Kressmann : "C'est toujours une surprise d'apprendre que des fonds ont été détournés. Ça arrive quand on est dans le routinier, qu'on ne cherche pas à se remettre en cause, à optimiser les procédures, à mettre en place un double contrôle… Mais ce n'est pas simplement ça la notion de pilotage, il faut aussi être dans une intelligence de gestion. Ce n'est pas parce qu'on fait beaucoup de chiffre d'affaires que l'on est forcément dans une bonne situation. C'est bien de faire de la vente, il faut encaisser derrière. Le nerf de la guerre pour une entreprise qui n'a pas une situation très solide, c'est le pilotage de sa trésorerie. Si on a la capacité d'honorer ses engagements auprès de ses salariés, fournisseurs et l'administration, on est dans une situation saine.

TI : Là aussi on voit que des choses se font, puisque la CCISM a mis en place en place une cellule pour aider les entrepreneurs à gérer leur trésorerie, il y a des initiatives pour le financement des entreprises avec la Caisse des Dépôts ou l'Adie…
Olivier Kressmann : On n'innove rien dans ces Assises. On donne l'occasion aux chefs d'entreprises de faire un focus pendant une journée sur des sujets qu'ils n'ont pas forcément eu le temps d'étudier. Des focus courts, puisque les interventions des conférenciers font 15 minutes maximums. Il y a quatre thèmes, et à l'intérieur trois à quatre interventions. C'est volontaire, pour avoir du rythme et retenir les idées fortes. Mais ça va révéler des choses aux entrepreneurs, et ils pourront étudier ça plus en profondeur plus tard.

TI : Le quatrième thème, "nouveaux enjeux", aura sans doute des couleurs plus revendicatives puisqu'il inclut les évolutions législatives. Avec ce qui se passe en métropole, loi Macron et réforme du Code du Travail, on voit que les revendications des entreprises peuvent être entendues. Vous les demandez aussi ici ?
Olivier Kressmann : Bien entendu que nous demandons une réforme du Code du Travail, cet espèce de livre de 300 pages qui arrive à se contredire entre les chapitres… C'est une aberration. En Polynésie française, on a un Code du Travail copié sur celui de la métropole à l'époque du CEP. On n'y est plus du tout, et nous avons nous aussi une nécessité de réformer ce texte.

TI : Le même message était porté aux précédentes Assises, sans être entendu…
Olivier Kressmann : Ce message, pour qu'il soit efficace, doit être relayé par l'ensemble des partenaires sociaux. Pour l'instant nous avons des partenaires sociaux qui sont arc-boutés pour ne rien remettre en cause. C'est leur vision, ils ont le droit, mais après, pour nous c'est très simple, le Code du travail ne relève pas d'une volonté des partenaires sociaux, mais du politique. À un moment donné, il faudra prendre une décision pour changer les choses. C'est ce qui arrive en métropole. Il faut être dans une démarche de construire un Pays, le faire progresser sur le plan social sans chercher à spolier qui que ce soit.

Le plus important dans tout ça ce n'est pas de réformer pour réformer. C'est le principe de simplifier le Code pour faciliter l'embauche de ceux qui n'ont pas de travail ! On passe notre temps à s'occuper des problèmes et à préserver les acquis de ceux qui ont un emploi, mais je dis que la priorité aujourd'hui est de donner un travail à ceux qui n'en ont pas.

TI : Enfin, à propos du Plan Stratégique commandé par le ministère de la Relance économique au cabinet Kahn. On l'attend encore, pensez-vous que tout ça était une perte de temps ?
Olivier Kressmann : J'espère que non. J'ai interpellé le président du Pays fin 2015 pour avoir une visibilité sur les suites des travaux que nous avons menés, quels qu'ils soient. Une conférence économique était prévue, on aimerait savoir si elle va se tenir. Et surtout d'avoir un retour sur les travaux qui ont été fait. Ça a pris trois mois, nous y avons mis des ressources, des gens qui ont aussi un travail à côté. Il faut savoir que le Medef lançait des travaux similaires en même temps, que nous avons arrêtés pour mettre toutes nos ressources au service du Pays… Ce n'est pas pour avoir une feuille blanche derrière. Mais je ne pense pas que ce sera le cas.




Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Vendredi 4 Mars 2016 à 14:29 | Lu 1586 fois