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Accueil des élèves handicapés, encore des efforts à faire pour le Pays


Au fenua, 1054 eleves sont en situation de handicap. Crédit photo : Archive TI.
Au fenua, 1054 eleves sont en situation de handicap. Crédit photo : Archive TI.
Tahiti, le 22 mai 2023 – Un colloque sur l'inclusion des élèves en situation de handicap est organisé durant toute la semaine à l'UPF. En Polynésie, même si des efforts ont été faits ces dernières années, des retards concernant l'accessibilité aux infrastructures ou au numérique sont encore à déplorer. En 2023, 1 054 élèves porteurs de handicap sont scolarisés dans les établissements du premier et du second degré au fenua.
 
Si depuis quelques années, de nombreux efforts ont été faits par le Pays concernant l'accueil et le suivi des élèves en situation de handicap dans les écoles, collèges et lycées (qui est une compétence du Pays), la marge de progression est encore importante pour arriver au niveau de la métropole. Au fenua cette année, on dénombre 1 054 élèves en situation de handicap. Ils représentent 0,6% des élèves inscrits en secondaire, 1,3% en primaire et 1,6% en maternelle. Afin de se pencher sur de nouvelles méthodes d'inclusion de ces jeunes en situation de handicap, un colloque s’est ouvert ce lundi à l'Université de la Polynésie française. Il se tiendra jusqu’à vendredi et a pour objectif de mettre le cap sur une société polynésienne plus inclusive, notamment dans le milieu scolaire. Ainsi, pendant ces cinq jours, des réflexions seront menées, afin de trouver les meilleures directions à prendre, pour mieux intégrer les personnes en situation de handicap, afin d’encore améliorer l'équité des chances. 
 
“Ce colloque est né d'une réflexion sur l'état de bien-être de nos étudiants en situation de handicap ici, à l'université”, a expliqué l'une des organisatrices de l'événement et chargée de mission handicap à l'UPF, Karine Leocadie. “On a remarqué que même si des progrès avaient été faits, les choses n'avançaient pas assez vite. Alors on a décidé de faire ce colloque pour tenter de faire tout ça.” Actuellement, à l'UPF, seize étudiants sont porteurs de handicap. “Ce colloque, c'est un moment marquant qui va permettre d'accroître notre visibilité, car c'est une chose essentielle pour améliorer l'inclusion”, a ajouté Weena Marua, étudiante en Master 1 et porteuse de handicap, qui fait également partie du comité organisateur.
 
Présent à l'ouverture de l'événement, le nouveau président du Pays, Moetai Brotherson, a tenu à rappeler l'importance de ce moment : “L'important, ce sont les vies des personnes concernées par ce colloque. Le handicap peut être physique, sensoriel... Mais ne serait-ce pas nous qui sommes handicapés du cœur, en ne les voyant pas et en ne les incluant pas ? C'est une chance que cet événement soit tenu et je tiens à remercier les associations qui aident chaque jour toutes les personnes en situation de handicap.”
 
Accessibilité aux bâtiments et au numérique
 
Dans le milieu scolaire, trois types de réponses institutionnelles sont apportés aux élèves en situation de handicap. “Il y a l'accessibilité aux infrastructures, comme des rampes ou plus rarement des ascenseurs. Ensuite, c'est l'accompagnement humain, avec les auxiliaires de vie scolaire (AVS), qui accompagnent individuellement ou collectivement les élèves qui en ont besoin. La dernière réponse est celle des dispositifs qui sont mis en place, comme les classes Ulis (Unités localisées pour l'inclusion scolaires, NDLR). Il y en a actuellement trente-cinq en Polynésie”, a expliqué le vice-recteur en Polynésie, Thierry Terret. “Sur les îles, il y a également le problème des transports scolaires qui ne sont pas adaptés aux personnes à mobilité réduite”, a-t-il ajouté.
 
En Polynésie, le retard est principalement lié à “l'accessibilité aux bâtiments, qui est très en retard dans beaucoup d'établissements publics”, a déclaré, lors de son intervention, la chargée ministérielle d'études pour l'inclusion des étudiants en situation de handicap au niveau national, Clémence Didier, qui a fait le déplacement depuis la métropole. Un retard au niveau de l'accessibilité numérique est également à déplorer. “Pour les élèves qui ont un handicap sensoriel, comme ceux auditifs ou visuels, il faut des ordinateurs adaptés, avec par exemple des claviers à reconnaissance vocale. Malheureusement, nos ressources informatiques ne sont pas encore adaptées”, a continué le vice-recteur en Polynésie.
 
Efforts marqués depuis quelques années
 
Si la situation n'est pas encore optimale, depuis quelques années, de très nombreux efforts ont été faits par le Pays pour améliorer l'inclusion de ces élèves en situation de handicap. En effet, depuis 2016, les budgets alloués à l'accessibilité ont fortement augmenté. Quarante-cinq nouveaux auxiliaires de vie scolaire ont été recrutés depuis trois ans et le nombre de classes Ulis est passé de seize en 2015 à trente-cinq cette année. “Il y a bien sûr une marge de progression encore importante, mais on remarque un choix politique très marqué avec ces efforts budgétaires”, a précisé Thierry Terret. Pour lui, la Polynésie partait de “très loin” avant cette prise de conscience, ce qui explique encore ce retard par rapport à la métropole. “On est en train de former des enseignants spécialisés, mais il faut du temps pour finaliser les formations”, a-t-il-ajouté. “Il faut également poursuivre le travail de recrutement d'AVS, car on n'est pas encore capable de répondre à la demande.”
 
Durant cette semaine donc, il est question de discuter autour de futurs axes d'améliorations que pourrait prendre la Polynésie. Ainsi, pendant le reste de la semaine, les quarante intervenants, provenant du Canada, d'Australie, de Hawaii, de métropole et du fenua, vont se relayer et présenter diverses méthodes d'inclusion dans le milieu scolaire. De quoi donner des idées à l'enseignement local, sous conditions de transformer toutes ses potentielles solutions à la sauce polynésienne. “Ils viennent partager leur situation et leurs méthodes, qui fonctionnent chez eux. Mais il faut contextualiser à l'échelle du Pays. Mettre en application ce qu'ils font dans un territoire comme le nôtre, c'est compliqué”, a expliqué Karine Leocadie. “Avec son éclatement géographique, il est compliqué d'appliquer ces méthodes à l'ensemble du territoire.”
 
Une déléguée porteuse d'espoir
 
Atteinte d'un handicap sévère, Nathalie Salmon-Hudry a été nommée il y a peu déléguée interministérielle au handicap et aux personnes en perte d'autonomie dans le nouveau gouvernement Brotherson. Cette nomination est porteuse d'espoir, puisque désormais, il y aura une personne chargée, au cœur du gouvernement, de rappeler la problématique du handicap dans les décisions qui seront prises. “On espère que par ce biais, les portes vont s'ouvrir vers une Polynésie plus inclusive”, a déclaré l'organisatrice, Karine Leocadie. “Ça démontre bien que le gouvernement est sensible à ce sujet. Au-delà du symbole, ça va permettre une impulsion au plus haut niveau pour faire avancer les choses”, a conclu Thierry Terret
 

Rédigé par Thibault Segalard le Lundi 22 Mai 2023 à 18:42 | Lu 1092 fois