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​Municipales : Le premier tour de scrutin déjà scruté


Tahiti, le 16 juin 2020 – Alors que le second tour se profile, le tribunal administratif de Papeete examinait attentivement mardi une première salve de contentieux relatifs aux élections municipales du 15 mars dernier. Des "protestations", très probablement vouées à l'échec, sur quelques communes des archipels où les tāvana avaient été élus dès le premier tour.
 
Le premier tour des municipales avait pu avoir lieu, le 15 mars dernier, peu avant que les mesures sanitaires ne viennent réduire les déplacements et limiter les rassemblements, rendant impossible la tenue d’un second tour de scrutin le dimanche suivant. Le confinement n'a pas empêché les battus du premier tour de formuler des "protestations", selon le terme juridique consacré. A Puka Puka, Fangatau, Rurutu, Raivavae, Makemo et Tumaraa, les vaincus ont choisi de saisir le tribunal administratif avec des arguments tous azimuts.
 
Folklore sans incidence sur le scrutin
 
Insuffisamment étayés, ces arguments touchaient à la fois à l'influence des présidents de bureau de vote "non neutres" pendant le scrutin, des listes électorales imparfaites, des procurations non prises en compte ou bloquées par un agent de l'OPT, l'absence ou de la mauvaise présentation des bulletins, la non signature des cahiers d'émargement par les assesseurs ou encore les conditions de proclamation des résultats. Une compilation des problèmes de procédure à laquelle se sont ajoutées des contestations sur le déroulement de la campagne les semaines précédentes avec l'évocation des généreux travaux chez les particuliers par des personnels municipaux, d'inauguration bienvenue, de repas pour les matahiapo astucieusement programmé, ou de kits OPH opportunément délivrés. Un folklore qu'il aurait été étonnant de ne pas voir le jour du vote ou en période préélectorale.
Des arguments, parfois soutenus par quelques maigres attestations mais sans véritable élément probant, que le rapporteur public a écarté les uns après les autres estimant tantôt que cela ne pouvait être considéré comme des manœuvres propres à altérer la sincérité du scrutin, tantôt que les faits ont été sans incidence sur les résultats compte tenu des écarts de voix. Une série de contentieux probablement sans succès avec quelques particularités.
 
A Ua Huka, on a failli rire jaune
 
Aux Marquises, le scrutin à Ua Huka a vu deux listes choisir une même couleur pour leurs bulletins de vote. Parmi le spectre de teintes possibles, l'affaire a donc tout de la cocasserie et du hasard malheureux, même si le jaune concerné figure sur le drapeau marquisien. Pour la rapporteur public, rien dans le code électoral n’empêche deux listes de choisir le même référentiel coloré. Le problème aurait existé si les bulletins avaient été de taille et de couleur strictement identique, le doute s'appréciant aux mentions qui y figurent. Pour la magistrate, les deux supports avec un peu de rouge, de noir et d'emblèmes particuliers sont suffisamment distincts pour éviter que les électeurs de cette commune aient été perturbés et soient obligés de revoter. Tout le monde est donc blanc comme neige. Feu vert devrait donc être donné à la nouvelle équipe municipale qui peut désormais voir la vie en rose.
 
A Tumaraa, des événements "troublants"
 
A Tumaraa, le scrutin s'était révélé serré en mars dernier. Cyril Tetanui l'avait emporté de 21 voix seulement avec sa liste Tapura, face à son principal opposant Reva Gotz. Ce dernier a donc porté l'affaire devant la justice. Il dénonce des repas offerts aux associations ou aux employés de la commune en utilisant du matériel de la mairie ; un ramassage organisé d'électeurs le jour du vote avec un bus de la commune. Des locations de matériels et de véhicules qui auraient été faites en bonne et due forme, la liste Tapura de Cyril Tetuanui ayant produit les factures émises par le maire de Tumaraa, Cyril Tetuanui. L'avocat Des Arcis s'en amusera à la sortie de l'audience : "Moi je veux bien, mais il se facture à lui-même". Autre point relevé par le candidat malheureux : les attributions "pas neutres" d'aides du Pays par le chef local du SDR, les interventions intempestives de Lana Tetuanui perturbant les autres réunions publiques ou encore l'embauche de trois CAES conduisant des véhicules municipaux sans autorisation. "Il y a là une série d’événements troublants qui prouvent que le scrutin a été altéré", selon l'avocat. Me Des Arcis fait remarquer qu'il suffit que 11 voix soient recomptées en faveur de la liste battue pour que le scrutin bascule. Pas assez de doutes pour le rapporteur public qui a conclu au rejet malgré la débauche d’arguments. Le tribunal doit rendre ses décisions mardi prochain, 23 juin.

Rédigé par Sébastien Petit le Mardi 16 Juin 2020 à 16:43 | Lu 1323 fois