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​Les tarifs d’Air Tahiti dans le viseur de l'assemblée


Tahiti, le 27 mai 2021 - Une mission d’information de l’assemblée est créée à l’initiative de Lana Tetuanui pour décortiquer les conditions tarifaires d’Air Tahiti. La nouvelle organisation des transports aériens interinsulaires doit entrer en vigueur le 1er juillet prochain avec une nouvelle taxe de solidarité susceptible de causer une augmentation des billets d’avion.

A quelques semaines de l’entrée en vigueur de la nouvelle taxe de solidarité pour la continuité territoriale du transport aérien interinsulaire, la commission législative du tourisme et du transport aérien de l’assemblée vient de mettre en place d’une “mission d’information” sur les conditions tarifaires de la compagnie Air Tahiti, pour le fret et le transport de passagers. Tout un programme et des intentions qui laissent songeur. L’instance est créée à l’initiative de la sénatrice Tapura Lana Tetuanui qui en sera co-rapporteure avec la présidente du groupe de la majorité à Tarahoi, Tepuaraurii Teriitahi. 

Depuis mi-décembre, une batterie de textes a été adoptée par l’assemblée pour réformer l’organisation du transport aérien interinsulaire suivant des principes applicables depuis février 2016. A partir du premier juillet prochain, cette nouvelle règlementation installe un système de péréquation pour compenser les déficits liés aux dessertes de désenclavement de 32 îles des Tuamotu-Gambier et deux destinations des Marquises. Ces destinations font parallèlement l’objet de délégations de service public, l’une en cours de finalisation avec Air Tahiti, l’autre déjà attribuée à la compagnie Tahiti Air Charter, filiale du groupe Degage. Enfin, une taxe entre en vigueur dès le 1er juillet pour financer les déficits inhérents à ces dessertes de désenclavement. Appelée pudiquement “contribution de solidarité”, elle vient au demeurant s’ajouter au prix des transports et laisse craindre une augmentation des billets d’avion, alors que la “volonté du gouvernement est de faire baisser les tarifs”, comme l’avait affiché le ministre Jean-Christophe Bouissou en décembre dernier. 

Le 16 mars, à l’examen en séance plénière du texte cadre qui organise la mise en œuvre de cette nouvelle donne dans le transport aérien inter-îles, la sénatrice Lana Tetuanui s’était déjà vertement indignée du coût du billet d’avion Raiatea-Tahiti. Dans la foulée et pour élargir ce ressenti, elle avait aussi fait part de doléances reçues d’usagers, unanimes sur la cherté des tarifs d’Air Tahiti. L’idée avait ainsi été lancée publiquement par elle de s’intéresser à cette question tarifaire de plus près. Un vœu exaucé le 17 mai dernier avec la création de la mission d’information.

“Consultation citoyenne”

Symptomatique ou non : la première action de l’instance est un sondage d’opinion mis en ligne jusqu’au 8 juin sur le site de l’assemblée. Une “consultation citoyenne ” qui propose à qui veut bien de se prononcer sur les tarifs d’Air Tahiti. Le questionnaire est réalisé par les services de l’Assemblée. Pour la députée Nicole Sanquer, représentante non-inscrite, la ficelle est un peu grosse : “Je trouve que les questions sont très orientées et à charge”, estime-t-elle. “Et j’ai l’impression que l’on veut trouver un coupable qui ne soit pas le gouvernement pour assumer la responsabilité d’une augmentation des tarifs au premier juillet.”
De son côté, le directeur général d’Air Tahiti s’interroge sur la pertinence qui sera donnée à une telle consultation citoyenne. “On peut s’attendre à une majorité de réponse pour dire que c’est trop cher”, redoute Manate Vivish. Il rappelle au passage que la compagnie aérienne termine l’année 2020 avec une “perte sèche” de 1,7 milliard de Fcfp malgré une subvention de 450 millions de Fcfp accordée par le Pays. “Avant de nous jeter au bucher, il faut regarder ce que l’on fait et nous faire un procès équitable : le transport à un coût ; la sécurité des passagers et la sûreté ont un coût. On exerce de notre mieux dans un environnement très contraint. Et je crois que l’on n’est pas si mauvais.” Il rappelle au demeurant que “le transport aérien est déjà largement taxé”.  

Promesses de transparence

Après l’entrée en matière de cette “consultation citoyenne”, les élus de la mission d’information prévoient de se plonger dans la “construction tarifaire des billets Air Tahiti”. Plusieurs auditions sont d’ores et déjà programmées : le ministre des Transports interinsulaires, Jean-Christophe Bouissou, le directeur de l’aviation civile, Georges Puchon, le président d’Air Tahiti, James Estall, le directeur général de la compagnie, Manate Vivish, divers chefs d’escales des îles éloignées, un échantillon d’usagers, et des représentants du personnel de la compagnie aérienne domestique.

On attend de la transparence. On veut avoir la certitude que les prix pratiqués par Air Tahiti sont les meilleurs possibles”, explique Tepuaraurii Teriitahi. “On veut comprendre en toute transparence à quel point les lignes de désenclavement sont déficitaires, si c’est le cas. Ce ne seront pas des auditions à charge. Au contraire, les conclusions de cette mission d’information doivent nous permettre de répondre aux usagers insatisfaits. Et si on est bien éclairés, on pourra devenir les meilleurs avocats d’Air Tahiti”, déclare-t-elle.
Les élus souhaitent être informés ? Ils veulent comprendre ? On va expliquer. Ils veulent jouer la transparence ? On va se prêter à l’exercice en toute transparence”, annonce avec volontarisme le DG d’Air Tahiti, qui remarque au passage : “Le Pays est dans le capital d’Air Tahiti. Il a des représentants au conseil d’administration. Il a à sa disposition toutes les informations nécessaires.” Les élus de la mission d’information souhaitent l’entendre courant juin, pour un rapport qu’ils veulent pouvoir rendre courant juillet. 

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Vendredi 28 Mai 2021 à 16:56 | Lu 4841 fois