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L'OPT demande au Pays de lui rembourser trois milliards Fcfp


Jean-François Martin
Jean-François Martin
PAPEETE, le 5 juin 2015 - Le nouveau directeur général de l'OPT, Jean-François Martin, a réagi mercredi dernier au rapport de la Chambre territoriale des comptes, très critique sur la politique télécom du Pays et sa gestion de l'OPT. Il révèle surtout que l'Office a demandé à être remboursé des trois milliards Fcfp versés au titre de la licence télécom, que ses nouveaux concurrents n'ont pas eu à payer...

Lors d'une interview, à l'occasion de la présentation mercredi de la nouvelle tête de réseau de l'OPT installée à Papenoo, le directeur général de l'Office des Postes et Télécommunications, Jean-François Martin a réagi au dernier rapport de la Chambre territoriale des comptes que nous révélions mardi 2 juin.

>> Télécoms : la "machine à cash" du Pays

En substance, le rapport tacle les politiques qui ont considéré l'Office et ses filiales comme une source de revenus importante pour le budget (quitte à retarder au maximum l'arrivée de la concurrence), le manque de vision stratégique pour le développement de l'économie numérique, et les confusions de rôle entre le gestionnaire de l'OPT et son régulateur, deux rôles joués par le Pays.

Que pensez-vous du rapport de la CTC ?

Jean-François Martin : "Première chose, il y a deux rapports de la Chambre territoriale des comptes. L'un est un examen de la gestion de l'OPT de 2008 à 2014, et le second concerne la politique du gouvernement en matière des postes et télécoms. C'est ce rapport-là qui a fait l'objet d'une publication et d'un examen à l'Assemblée. Le deuxième rapport, dont l'OPT a été destinataire, sera communiqué en juin à notre conseil d'administration."

"Sur le rapport concernant le Pays, j'ai vu qu'il y a des recommandations. Notamment de séparer le régulateur et l'OPT en tant qu'opérateur. Ça a été fait là, puisqu'avec le remaniement ministériel le président du Pays a conservé la tutelle de l'OPT, en revanche Teva Rohfritsch a dans son portefeuille la politique de l'économie numérique, en particulier la tutelle du régulateur. Dans le cadre de la loi sur la concurrence, l'Autorité de la concurrence viendra compléter le paysage réglementaire."


Deux membres du même gouvernement, est-ce vraiment une séparation ?

"Voilà. Au moins en apparence il y a déjà deux ministres différents, ce qui n'était pas le cas jusque-là. Teva Rohfritch a en charge le volet réglementaire, donc il a la tutelle de la Direction générale de l'économie numérique, et il a à définir la politique de l'économie numérique. Chose qu'il a déjà faite par le passé d'ailleurs lors des États généraux du numérique."

Contestez-vous une des conclusions du rapport ?

"Il y a le retard pris par le Pays pour que la concurrence soit effective. Ce que je vois, en 2015, c'est qu'il y a une concurrence, Viti pour Internet et Pacific mobile Telecom pour la téléphonie mobile. Donc la concurrence est effective aujourd'hui. Qu'elle ait mis du temps à se mettre en place, possiblement, puisque le code date de 2003 pour l'ouverture. Mais en 2015 il y a de la concurrence."

Et sur la dénonciation du fait que le Pays ponctionne trop les caisses de l'OPT ?

"Alors je n'ai pas vu dans le rapport le terme "dénonce" ou "ponctionne". Ma position est qu'en tant que société commerciale, nous faisons des bénéfices et en distribuons en partie sous forme de dividendes, donc c'est vrai qu'il y a eu ces dernières années des prélèvements importants, (…) parfois 4 milliards d'un coup. On a pu le faire par le passé."

"(Aujourd'hui) les perspectives du groupe OPT sont, on va dire, moins optimistes. Il y a des orientations stratégiques en cours, qui seront présentées prochainement au conseil d'administration. Dans ce cadre il y a des projections financières de l'OPT et de Vini. Il est certain qu'il faut que l'on préserve nous aussi le financement de nos investissements, et qu'on pourra distribuer par la suite des dividendes si on fait du résultat, après avoir mis de côté ce qu'il faut."

Le rapport note également que le groupe OPT est la seule entreprise télécom à avoir payé une licence pour le droit d'accès au statut d'opérateur au Pays

"Les droits d'accès ont été instaurés en 2003. Tout opérateur était frappé de cette licence, mais suite à une action de Viti, elle a été annulée. Visiblement Pacific Mobile Telecom (donc Vodafone) a également obtenu l'annulation, et récemment, la Direction des Impôts et des Contributions Publiques a fait annuler complètement ce texte des impôts."

Donc le Pays va vous devoir 3 milliards Fcfp ?

"Nous avons effectivement introduit une réclamation, conformément au code des impôts, Vini et l'OPT, pour obtenir remboursement des droits d'accès de la part du Pays."

Le rapport de CTC confirme cette déclaration : "Les dispositions fondant le droit d'accès ayant été déclarées illégales par le juge administratif, les différents opérateurs ont été déchargés des sommes dues. Les implications financières de cette décision ne sont pas négligeables, tant pour le Pays qui perd une recette fiscale que pour les opérateurs alternatifs à l'OPT : en effet, l'OPT n'a pas encore demandé le remboursement des droits d'accès qu'il a acquittés par anticipation en 2009 (ses autorisations expirant en 2012) et intègre encore par conséquent le coût de ces licences dans ses tarifs."

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Vendredi 5 Juin 2015 à 10:45 | Lu 2774 fois