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Prothèses de hanche : le dispositif médical de nouveau pris en défaut


Prothèses de hanche : le dispositif médical de nouveau pris en défaut
PARIS, 28 février 2012 (AFP) - Mise à mal par le scandale des prothèses mammaires PIP, la sécurité des dispositifs médicaux est de nouveau sur la sellette après des révélations en Grande-Bretagne et en France sur une affaire de prothèses de hanche défectueuses.

Des centaines de milliers de patients dans le monde pourraient avoir été exposés à des taux importants de métaux toxiques dus à un modèle particulier de prothèses de hanche, se sont alarmés mardi le British Medical Journal (BMJ) et la BBC dans une enquête commune montrant que le risque était connu du fabricant américain.

Le Figaro a aussi affirmé que DePuy Orthopaedics, filiale de Johnson & Johnson, "a tout fait" pour garder cette prothèse ASR sur le marché "en dépit de signaux inquiétants".

Elle a été vendue en Europe, et notamment en France, jusqu'à l'été 2010, malgré des "premiers signaux d'alerte dès 2007" en Australie, selon Le Figaro.

"La pose de prothèses de hanche est une des grandes réussites de la médecine moderne", a déclaré le Dr Fiona Godlee, rédactrice en chef du BMJ. "Mais la combinaison d'une régulation inappropriée et d'un mercantilisme sans limite a causé un mal réel et potentiel pour un grand nombre de patients à travers le monde".

Les prothèses de hanche, comme les implants mammaires, font partie des dispositifs médicaux et ne sont donc pas soumises aux mêmes règles que les médicaments pour leur mise sur le marché et leur surveillance.

380 prothèses ASR posées en France

Les prothèses ASR associent un couple métal sur métal, un modèle réputé résistant, mais qui a l'inconvénient de pouvoir libérer des particules de cobalt et chrome. Elles ont montré un taux de reprise (réintervention) plus important que d'autres prothèses.

Le risque des implants en alliage cobalt-chrome est bien connu depuis 1975, selon l'enquête britannique. Outre des réactions locales qui peuvent détruire les muscles et l'os, les particules métalliques peuvent s'infiltrer dans la circulation sanguine.

Le BMJ et la BBC citent un document interne à DePuy, daté de 2005, qui évoque la possibilité que des "débris d'usure puissent être cancérigènes".

"Malgré le fait que ces risques étaient bien connus et bien documentés depuis des décennies, les patients ont été laissés dans l'ignorance sur leur participation à une véritable expérimentation incontrôlée", selon le BMJ.

Sollicité lundi aux Etats-Unis, le fabricant n'avait pas réagi mardi en fin d'après-midi.

Les prothèses ASR ont été introduites dans le monde en 2003 et en France en 2004. Près de 93.000 ont été posées, dont 380 en France, selon l'agence des produits de santé (Afssaps). Près de 100.000 prothèses de hanches sont implantées chaque année en France, dont environ 7% de prothèses métal-métal.

Après le scandale des prothèses mammaires PIP, la France a décidé de renforcer les conditions de mise sur le marché et de surveillance des dispositifs médicaux.

Au niveau national, l'Afssaps travaille à l'élaboration d'une "liste des dispositifs médicaux implantables à risque", qui devront être soumis à une vigilance particulière.

Au niveau européen, des discussions sont en cours pour améliorer la réglementation de ces produits.

"Les méthodes de régulation des dispositifs médicaux semblent plutôt dater des années cinquante que du 21e siècle", a déploré le Pr Nick Freemantle (University College de Londres), cité par le BMJ.

"On a un problème d'accès à l'information, très clairement, et d'opacité qui rendent difficile l'intervention des autorités de régulation", a reconnu auprès de l'AFP Jean-Claude Ghislain, directeur de l'évaluation des dispositifs médicaux à l'Afssaps.

Aux Etats-Unis, la FDA (agence américaine des médicaments) a placé toutes les prothèses de hanche dans une catégorie "à haut risque".

vm/pjl/nm

Rédigé par Par Véronique MARTINACHE le Mardi 28 Février 2012 à 05:49 | Lu 1124 fois