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Australie: le preneur d'otages sous le coup de poursuites multiples


Sydney, Australie | AFP | mardi 16/12/2014 - Un an avant la prise d'otages de Sydney, Man Haron Monis avait été libéré sous caution après avoir été inculpé de complicité dans le meurtre de son épouse, un chef qui s'ajoutait à une kyrielle de poursuites pour agressions sexuelles.

Les autorités ont reconnu que le cheikh autoproclamé de 50 ans avait échappé aux radars en dépit des graves accusations portées contre lui et d'un comportement étrange qui aurait dû tirer la sonnette d'alarme.

Noleen Hayson Pal, 30 ans, fut victime en avril 2013 d'un meurtre atroce, poignardée à 18 reprises avant d'être immolée par le feu.

Monis, originaire d'Iran, était arrivé en Australie en 1996 avec le statut de réfugié. Il a été inculpé de complicité pour le meurtre de sa femme tandis que sa petite amie de l'époque l'était pour le meurtre lui-même.

La justice a cependant estimé que les charges n'étaient pas suffisamment étayées par le parquet et le couple avait été libéré sous caution. Et ce malgré le fait que Monis soit déjà poursuivi pour des dizaines d'agressions et abus sexuels datant de l'époque où il était "guérisseur spirituel".

Le Premier ministre Tony Abbott l'a décrit comme quelqu'un de "profondément perturbé", avec un "lourd passé de violences criminelles, d'attirance pour l'extrémisme et d'instabilité mentale".

Le fait qu'il ait été libre malgré son lourd passé soulève toutefois de graves questions, ont reconnu les autorités.

"Nous demandons aux services fédéraux et de l'Etat de regarder de près les raisons pour lesquelles il est passé au travers des mailles du filet", a dit le ministre de la Justice de Nouvelle-Galles du Sud, Brad Hazzard.

"Nous sommes tous scandalisés que ce type ait été dehors", a renchéri le Premier ministre de l'Etat Mike Baird.

- 'Idéologue extrémiste' -

Monis s'était fait connaître de la justice pour avoir adressé des lettres d'insultes aux familles de soldats morts en opération et un juge lui avait ordonné en 2013 de se tenir à carreau pendant deux ans.

Au-delà de ses ennuis judiciaires, il se faisait remarquer depuis des années par ses longues tirades contre ce qu'il percevait comme l'injustice de sa situation.

Il avait sa propre entrée dans Wikipedia, énumérant ses démêlés avec le système judiciaire. Il se disait également spécialiste de l'astrologie, de la numérologie, de la méditation et de la magie noire, d'après la presse australienne.

Sur son site internet www.sheikhharon.com -- inaccessible après la prise d'otages -- il avait publié des photos d'enfants arabes morts en légendant: "Voici une preuve du terrorisme de l'Amérique et de ses alliés au nombre desquels l'Australie. Le résultat de leurs frappes aériennes".

Il avait un certain sens de la mise en scène. Sur son compte Facebook, il avait posté une photo de lui enchaîné, proclamant: "J'ai été torturé en prison à cause de mes écrits politiques", a rapporté le Business Insider.

Il estimait être victime d'une campagne de diffamation en sa qualité de "militant musulman" et se comparait au fondateur de Wikileaks, l'Australien Julian Assange, estimant être comme lui l'objet de persécutions.

Le preneur d'otage né dans le chiisme iranien semblait s'être converti à l'islam sunnite. L'organisation jihadiste Etat islamique et d'autres groupes jihadistes considèrent les chiites comme des hérétiques - "rafidha".

"J'étais un rafidhi, mais plus maintenant. Maintenant je suis un musulman", expliquait-il sur son site.

Ses liens éventuels avec l'organisation EI en Syrie et en Irak n'ont pas été établis. Il avait contraint les otages à tendre un drapeau noir avec inscrit en caractères arabes la "shahada", ou profession de foi musulmane, un drapeau souvent repris à leur compte par des groupes jihadistes: "Il n'y a de Dieu qu'Allah et Mahomet est son prophète".

L'institut américain de surveillance des sites jihadistes SITE a expliqué qu'il avait fréquemment posté des commentaires sur les réseaux sociaux au sujet d'informations concernant l'EI.

Son ancien avocat a dit de lui que c'était un "idéologue extrémiste" mais que son action était le fait d'un homme isolé. "C'est un individu dérangé qui a commis un acte terrifiant", a dit Manny Conditsis. "Si ce genre d'idéologue se retrouve dans une situation où il doit affronter des chefs d'accusation extrêmement graves (....) alors il a très bien pu considérer qu'il n'avait rien à perdre".

Rédigé par () le Mardi 16 Décembre 2014 à 05:57 | Lu 380 fois