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Thalidomide: une Australienne obtient des millions de dollars de dédommagement


Thalidomide: une Australienne obtient des millions de dollars de dédommagement
SYDNEY, 18 juil 2012 - Une Australienne née sans bras ni jambe après que sa mère, enceinte, avait pris de la thalidomide, a obtenu des millions de dollars selon un accord à l'amiable avec le groupe Diageo, qui avait racheté un distributeur de ce médicament anti-nausée finalement interdit en 1961.

Lynette Rowe, 50 ans, conduit une action en justice collective au nom des victimes en Australie et en Nouvelle-Zélande de ce médicament, produit par le groupe allemand Grunenthal et commercialisé dans le monde en 1956 avant d'être retiré en 1961.

La plaignante affirme que ses malformations physiques ont été causées par la prise de thalidomide lors de la grossesse de sa mère, en 1961, juste avant que le médicament soit retiré du marché.

Elle poursuit le fabricant, le distributeur anglais The Distillers Company --qui n'existe plus-- et Diageo, qui a pris le contrôle de Distillers.

Distillers était un groupe de boissons alcoolisées et de produits pharmaceutiques, racheté par Guinness, qui a fusionné en 1997 avec un autre groupe pour former le géant britannique des boissons alcoolisées Diageo.

Les avocats de Lynette Rowe ont indiqué mercredi à la Cour suprême de l'Etat de Victoria que leur cliente avait conclu un accord à l'amiable, pour son seul cas, avec Diageo. Les termes en sont confidentiels mais il représente un montant de "plusieurs millions de dollars" australiens, soit l'équivalent en dollars américains, selon les avocats.

"Ca sera suffisant pour garantir un très bon niveau de soins à Lyn pour le restant de sa vie", a indiqué l'avocat de la plaignante, Peter Gordon, qui a qualifié l'accord de "juste et conséquent". Lynette Rowe nécessite des soins en quasi permanence depuis sa naissance.

Diageo a accepté de négocier avec d'autres plaignants dans cette affaire. Le cabinet d'avocats de Peter Gordon dit avoir été contacté par "plus d'une centaine de personnes" et deux cas sont bien avancés.

Par ailleurs, la plainte contre Grunenthal suit son cours. Les avocats de Lynette Rowe veulent demander un report de l'audience prévue pour octobre, afin de trouver un accord à l'amiable.

Selon l'équipe d'avocats de la plaignante, l'Australie était un marché prioritaire pour Grunenthal, qui a "inondé" les pharmacies avec son anti-nauséeux.

Grunenthal a tenté plusieurs fois de faire dérailler le processus judiciaire et "refuse à présent de contribuer à l'accord", a affirmé Michael Magazanik, autre avocat de la plaignante. "Grunenthal n'a jamais testé le médicament sur des animaux en état de gestation ou suivi ses effets sur les femmes enceintes, tout en assurant aux médecins que le produit était parfaitement sûr", a-t-il ajouté.

Dans un communiqué, Grunenthal dit regretter "les conséquences de la tragédie de la thalidomide" mais estime avoir agi de manière responsable lors du développement du médicament, au regard des critères des années 50, et assure qu'il "se défendra entièrement" contre les actions en justice.

Cet accord prouve qu'"on n'a pas besoin de bras et de jambes pour changer le monde", a déclaré mercredi à la presse Lynette Rowe.

"Les pilules qu'ont pris Wendy (la mère: ndlr) et des milliers d'autres femmes il y a 50 ans ont causé beaucoup de souffrance et de douleur, mais au moins, quelque chose est fait pour rendre justice", a ajouté le père, Ian Rowe.

La thalidomide a été commercialisée à partir de 1956 comme sédatif pour soulager les nausées des femmes enceintes. Largement utilisée dans le monde, elle a eu de terribles effets sur l'embryon : on estime à 10.000 le nombre de bébés nés avec des segments de bras ou de jambes manquant, des mains ou des pieds directement rattachés au tronc.

A la suite de ces graves malformations congénitales, parmi lesquels des anomalies du coeur et des reins, elle a été retirée du marché en 1961. Après ce désastre, les exigences préalables à la commercialisation des médicaments ont été renforcées ou instituées, selon les pays.

Ce médicament "est le plus grand désastre pharmaceutique de l'histoire", a estimé l'avocat Peter Gordon.


Par Amy COOPES

Rédigé par AFP le Mercredi 18 Juillet 2012 à 21:20 | Lu 697 fois