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Vol avec arme : "Ce soir-là, je me suis vu mourir"


Tahiti, le 4 février 2020 - Un multirécidiviste de 35 ans a été condamné mardi par le tribunal correctionnel à six ans de prison ferme. Le prévenu, auquel il était reproché trois faits de vol et d’agressions commis avec une arme, a été maintenu en détention. Deux de ses amis d’enfance, poursuivi pour avoir participé à l’un de ces faits, ont également écopé de peines de prison ferme.

Dans la nuit du 15 au 16 octobre 2018, un jeune homme qui exerce la profession de racheteur d’or est violemment agressé non loin de la plage Lafayette où il s’est arrêté pour fumer une cigarette. Assis sur un muret, il est braqué par un scootériste qui le menace avec une arme, un revolver de catégorie B1, en lui demandant “de l’argent ou de l’or”. La victime lui remet 10 000 Fcfp et l’agresseur s’en va, non sans lui avoir curieusement laissé un karcher qu’il transportait sur son deux-roues.

Dès le lendemain, la victime va porter plainte en expliquant que son agresseur a menacé de le tuer en lui braquant l’arme sur la tête et qu’il connaissait le nom de sa propre mère. La victime indique également qu’elle a reconnu l’individu car il avait tenté, une semaine plus tôt de lui revendre des bijoux en pacotille.

Menaces de mort

Lors du dépôt de plainte de cette victime, les gendarmes font le rapprochement avec des faits similaires qui ont lieu le même soir au col du Tahara’a. Alors qu’ils transportaient un karcher, deux jeunes hommes ont été abordés par un individu qui a “exhibé” son revolver et leur a intimé de lui donner “tous leurs effets personnels”. Après les avoir menacés de mort, l’homme s’est emparé du karcher et d’un peu d’argent.

Grâce à la vidéosurveillance et au témoignage du racheteur d’or, les gendarmes identifient l’agresseur comme un délinquant très défavorablement connu de la justice. Quinze gendarmes sont alors mobilisés pour le retrouver.

Dans la nuit du 16 au 17 octobre, c’est un jeune homme qui se fait cette fois braquer à Taravao par trois individus qui circulent dans un pick-up. Alors qu’elle vient de faire regonfler le pneu de son vélo, la victime est prise à partie, menacée, dépouillée et frappée par les agresseurs. Elle dépose plainte dès le lendemain et le rapprochement est fait avec les deux agressions qui ont eu lieu la veille à Arue.

Cambriolage de la maison de Rony Tumahai

Face à ces faits inquiétants, les forces de l’ordre multiplient les perquisitions et les écoutes téléphoniques pour retrouver l’homme identifié lors des deux premières agressions. Il est interpellé quelques semaines plus tard en compagnie de ses deux amis d’enfance qui l’ont aidé à commettre la troisième et dernière agression.

Entendu en garde à vue, le principal agresseur reconnaît les faits et confesse plusieurs cambriolages dont celui de la maison de la famille Tumahai qui avait eu lieu lors de la veillée dédiée au défunt maire de Punaauia, Rony Tumahai.

Carcatère "létal" de l'arme

Ce multirécidiviste et ses deux complices, amis d’enfance ayant grandi dans le même quartier de Faa’a, ont donc comparu mardi devant le tribunal correctionnel pour répondre de “vol avec violence” et de “vol avec arme”.

A la barre, le prévenu le plus lourdement impliqué, déjà condamné à 24 reprises, a de nouveau reconnu les faits. L’homme a indiqué qu’il était en manque d’ice lors des trois agressions mais qu’il avait “encore conscience de ses actes” et qu’il ne serait pas allé jusqu’à “tirer” sur les victimes. Evoquant le racheteur d’or auquel il avait volé de l’argent, le prévenu a affirmé qu’il avait l’habitude de lui “receler des bijoux volés”. Faits catégoriquement niés par l’intéressé qui a déclaré au tribunal que le soir de son agression, il s’était “vu mourir”.

Lorsque le tribunal a abordé la personnalité des mis en cause, l’auteur des trois agressions a flanché à l’évocation de son enfance puis de son adolescence, passée dans la rue après que ses parents aient quitté le territoire pour rejoindre la métropole.

"Clémence" de la justice

Lors de ses réquisitions, le procureur de la République a insisté sur le caractère “dangereux”, “voire létal” du revolver de catégorie B1 utilisé pour commettre les agressions. Il a rappelé la “nécessité de se préserver la sécurité de nos contemporains” qui ont le “droit se balader nuitamment en Polynésie sans se faire agresser et braquer”. Huit ans de prison ferme ont été requis contre le prévenu le plus lourdement impliqué. Quatre et trois ans de prison ferme ont également été demandés contre ses deux co prévenus, dont l’un comparaissait libre sous contrôle judiciaire.

Tâche ardue pour l’avocate de l’auteur des trois agressions, Me Chouinni, qui a expliqué que son client n’était pas un “mauvais garçon” mais un toxicomane qui n’était pas dans son “état normal” à l’époque des faits. “Il a toujours reconnu les faits et n’a jamais essayé de se dédouaner”, a-t-elle affirmé avant demander à la justice d’être “clémente”.

Après en avoir délibéré, le tribunal correctionnel a condamné l’auteur des trois agressions à six ans de prison ferme assortis du maintien en détention. Ses deux amis d’enfance, qui avaient participé à l’agression de Taravao, ont quant à eux écopé de deux et un an de prison ferme.

Rédigé par Garance Colbert le Mardi 4 Février 2020 à 15:02 | Lu 3352 fois