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Vers une réforme des tarifs entre opérateurs


Tahiti, le 3 mai 2020 – Le Conseil économique, social, environnemental et culturel (Cesec) a rendu jeudi un avis favorable sur la réforme du code des postes et télécommunications, même si des doutes sur le fonctionnement du secteur de la téléphonie sont réapparus.
 
Le Cesec a rendu son avis ce jeudi sur un projet de loi du Pays modifiant le code des postes et des télécommunications. Une modification qui concerne principalement la détermination du tarif de référence d'interconnexion (TRI) des opérateurs de télécommunications et la suppression du dispositif d'agrément pour les installateurs de télécommunications. Ce dernier dispositif est en effet jugé comme une « réglementation pesante » et « ne répond plus aux besoins du marché ». Le marché est en effet orienté vers le développement de la fibre optique alors que seulement 6,8% des foyers sont raccordés, un niveau jugé faible « au regard des montants réalisés ». La suppression de l'agrément vise à faciliter le passage à la fibre dans les foyers et à rentabiliser enfin les investissements colossaux réalisés.
 
Baisse des tarifs pas certaine
 
Concernant les tarifs de référence d'interconnexion, les opérateurs de téléphonie mobile doivent assurer la terminaison des appels qui proviennent d'un réseau concurrent. Un appel d'un abonné Vini, Viti ou Vodafone doit pouvoir arriver à moindre frais auprès d'un abonné d'un concurrent. Jusqu'alors, chaque opérateur calculait selon sa propre méthode le tarif à appliquer. Une liberté qui occasionnait une distorsion dans les méthodes de calcul et nécessitait de retrouver une certaine homogénéité.
 
Le projet de texte rédigé par la Direction générale de l'économie numérique (DGEN) prévoit ainsi d'« assurer un traitement uniforme » en optant pour un modèle unique de calcul. La méthode doit ainsi devenir harmonisée entre les opérateurs, avec l'obligation de fournir les mêmes éléments budgétaires, comptables et techniques. La réforme doit « entrainer une baisse des tarifs proposés aux consommateurs ». Un constat peu partagé par la quatrième institution du Pays : « en l'absence de données précises sur le sujet, le Cesec s'interroge sur l'effectivité d'une telle baisse ». Sur ce point, les membres du Conseil recommandent plutôt « la mise en place d'un forfait spécifique ou de tout autre nature à destination des ménages les moins favorisés pour réduire l'exclusion numérique », « la baisse des tarifs pourra être effective en cas d'augmentation des volumes consommés ».
 
Doutes sur l'indépendance du secteur
 
L'avis favorable du Cesec, adopté à l'unanimité, émet cependant quelques doutes notamment sur l'indépendance de la régulation du secteur. Des doutes qui ne sont pas nouveaux. Déjà, en mars 2017 et octobre 2018, l'institution préconisait que « le régulateur soit indépendant du pouvoir central ». Ter repetita aujourd'hui. L'avis mentionne en effet que « la DGEN, service administratif du Pays, régule un opérateur public qui est lui-même sous tutelle de la Polynésien française » et « dans ce contexte, la question de l'équité entre opérateurs demeure ». Un problème d'équité qui réapparait à plusieurs reprises en filigrane dans l'avis notamment dans la méthode de calcul retenue.
 
Vodafone et Viti contestent en effet le choix fait par l'administration du modèle technico-économique. Selon ces opérateurs privés, ce modèle « favorisait l'opérateur historique et ne permettrait pas une baisse de tarifs rapide et importante au bénéfice des usagers ». Il appartiendra au conseil des ministres, en charge de la fixation de ces TRI, de surveiller la réalité de cette évolution tarifaire « dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires ». Mais avec cinq ministres siégeant au sein du conseil d'administration de l'OPT et un service administratif sous tutelle gouvernementale… Les craintes –pas nouvelles–sur une possible inégalité de traitement entre opérateurs peuvent apparaître légitimes.

Rédigé par Sébastien Petit le Dimanche 3 Mai 2020 à 09:50 | Lu 6336 fois