Salda, Turquie | AFP | mercredi 27/04/2021 - Avec ses eaux turquoises et son sable blanc, le lac de Salda, dans le sud-ouest de la Turquie, recèle des secrets qui pourraient aider à résoudre les mystères de Mars. Mais sa popularité croissante menace aujourd'hui son existence.
Cette vaste étendue d'eau est devenue célèbre lorsque des scientifiques de la Nasa ont commencé à l'étudier il y a quelques années pour préparer le déploiement du rover Perseverance sur Mars.
Avant l'atterrissage de l'engin sur la planète rouge en février, l'agence spatiale américaine avait même partagé une photo du lac de Salda, illustrant son importance pour les préparatifs de la mission.
Tirant parti de cette exposition, le président Recep Tayyip Erdogan a choisi d'intégrer ce lac d'une superficie de 45 km2 dans un vaste programme visant à créer plus d'espaces verts accueillant du public.
Mais face à cet engouement, les activistes locaux redoutent que le double intérêt de la Nasa et de M. Erdogan ouvre les vannes du tourisme de masse et signe l'arrêt de mort du lac en détruisant son écosystème.
"L'avenir du lac est en péril si des millions de touristes viennent", s'alarme Gazi Osmak Sakar, dirigeant de l'Association de préservation du lac de Salda.
Lac "vivant"...
Le lac est surtout renommé pour ses "îles blanches", des îlots d'un blanc brillant, ainsi que sa faune et sa flore uniques, comme le poisson-grenouille de Salda.
Des minéraux rares attirent également l'attention de la Nasa, comme l'hydromagnésite qui ressemble à des substances repérées dans le cratère de Jezero, où Perseverance a atterri.
Les scientifiques pensant que l'hydromagnésite présent le long du rivage du lac de Salda est un résidu de blocs de microbialites, des roches formées avec l'aide de microbes.
Cette matière capte l'attention des chercheurs qui se demandent si de la vie a existé sur Mars sous forme de microbes il y a plusieurs milliards d'années.
Mais ce qui fait vraiment la spécificité du lac de Salda, explique l'ingénieur géologue Servet Cevni, c'est son écosystème fermé.
"Ce qui le rend si spécial, ce sont les bactéries, les organismes unicellulaires qui y vivent. Comme on est sur du vivant, c'est très fragile face aux influences extérieures", dit-il à l'AFP.
Mais cette influence est déjà en train de se matérialiser sous la forme de neufs baraques en train d'être construites à proximité d'un jardin public en cours d'aménagement près du lac.
"Il faut annuler ce projet. Le lac ne peut pas être protégé s'il est exploité", estime M. Sakar.
... mais "mourant"
Si la baignade est interdite dans la zone des "îles blanches", les visiteurs peuvent piquer une tête ailleurs dans le lac.
Ses défenseurs estiment qu'il faudrait interdire toute baignade dans le lac pour protéger son écosystème fragile.
"Si un organisme unicellulaire s'éteint, Salda est fichu", prévient M. Cevni, l'ingénieur. "Les +îles blanches+ ne peuvent pas être recréées", dit-il.
Si des mesures sont prises dès aujourd'hui, le lac pourrait se régénérer en 150 à 200 ans, estime M. Cevni. "Sinon, il ne s'en remettra jamais", dit-il.
Mais la mission est ardue. L'Association de préservation du lac de Salda a ainsi été déboutée par un tribunal qu'elle avait saisi pour stopper l'aménagement du jardin public.
M. Sakar en appelle désormais à l'Unesco qu'il exhorte à classer le lac à son patrimoine mondial de l'humanité, gage de protection.
"Salda est en train de mourir", dit-il.
Tourisme responsable
Mais ces efforts entrent en collision avec l'intérêt économique suscité par la popularité du site, dont nombre de riverains espèrent bien profiter.
Suleyman Kilickan, un serveur qui travaille dans un café situé au bord du lac, explique que le nombre de visiteurs a explosé depuis que la Nasa s'y intéresse.
"S'il y a du tourisme, il y a de la vie", dit-il, tout en indiquant que les visiteurs sont appelés à être responsables. "On leur dit de ne pas emporter de sable ou de terre".
Ces flux de touristes ont déjà commencé à transformer le visage de Salda.
"Notre lac et notre village étaient bien plus propres il y a quelques années", indique ainsi Aysel Cig, un berger qui habite près de Salda.
Visiblement conscient du danger, le ministère de l'Environnement a indiqué le mois dernier vouloir limiter le nombre de visiteurs par an à 570.000.
En 2019, 1,5 millions de personnes s'y étaient rendues, et 800.000 en 2020, malgré la pandémie.
Cette vaste étendue d'eau est devenue célèbre lorsque des scientifiques de la Nasa ont commencé à l'étudier il y a quelques années pour préparer le déploiement du rover Perseverance sur Mars.
Avant l'atterrissage de l'engin sur la planète rouge en février, l'agence spatiale américaine avait même partagé une photo du lac de Salda, illustrant son importance pour les préparatifs de la mission.
Tirant parti de cette exposition, le président Recep Tayyip Erdogan a choisi d'intégrer ce lac d'une superficie de 45 km2 dans un vaste programme visant à créer plus d'espaces verts accueillant du public.
Mais face à cet engouement, les activistes locaux redoutent que le double intérêt de la Nasa et de M. Erdogan ouvre les vannes du tourisme de masse et signe l'arrêt de mort du lac en détruisant son écosystème.
"L'avenir du lac est en péril si des millions de touristes viennent", s'alarme Gazi Osmak Sakar, dirigeant de l'Association de préservation du lac de Salda.
Lac "vivant"...
Le lac est surtout renommé pour ses "îles blanches", des îlots d'un blanc brillant, ainsi que sa faune et sa flore uniques, comme le poisson-grenouille de Salda.
Des minéraux rares attirent également l'attention de la Nasa, comme l'hydromagnésite qui ressemble à des substances repérées dans le cratère de Jezero, où Perseverance a atterri.
Les scientifiques pensant que l'hydromagnésite présent le long du rivage du lac de Salda est un résidu de blocs de microbialites, des roches formées avec l'aide de microbes.
Cette matière capte l'attention des chercheurs qui se demandent si de la vie a existé sur Mars sous forme de microbes il y a plusieurs milliards d'années.
Mais ce qui fait vraiment la spécificité du lac de Salda, explique l'ingénieur géologue Servet Cevni, c'est son écosystème fermé.
"Ce qui le rend si spécial, ce sont les bactéries, les organismes unicellulaires qui y vivent. Comme on est sur du vivant, c'est très fragile face aux influences extérieures", dit-il à l'AFP.
Mais cette influence est déjà en train de se matérialiser sous la forme de neufs baraques en train d'être construites à proximité d'un jardin public en cours d'aménagement près du lac.
"Il faut annuler ce projet. Le lac ne peut pas être protégé s'il est exploité", estime M. Sakar.
... mais "mourant"
Si la baignade est interdite dans la zone des "îles blanches", les visiteurs peuvent piquer une tête ailleurs dans le lac.
Ses défenseurs estiment qu'il faudrait interdire toute baignade dans le lac pour protéger son écosystème fragile.
"Si un organisme unicellulaire s'éteint, Salda est fichu", prévient M. Cevni, l'ingénieur. "Les +îles blanches+ ne peuvent pas être recréées", dit-il.
Si des mesures sont prises dès aujourd'hui, le lac pourrait se régénérer en 150 à 200 ans, estime M. Cevni. "Sinon, il ne s'en remettra jamais", dit-il.
Mais la mission est ardue. L'Association de préservation du lac de Salda a ainsi été déboutée par un tribunal qu'elle avait saisi pour stopper l'aménagement du jardin public.
M. Sakar en appelle désormais à l'Unesco qu'il exhorte à classer le lac à son patrimoine mondial de l'humanité, gage de protection.
"Salda est en train de mourir", dit-il.
Tourisme responsable
Mais ces efforts entrent en collision avec l'intérêt économique suscité par la popularité du site, dont nombre de riverains espèrent bien profiter.
Suleyman Kilickan, un serveur qui travaille dans un café situé au bord du lac, explique que le nombre de visiteurs a explosé depuis que la Nasa s'y intéresse.
"S'il y a du tourisme, il y a de la vie", dit-il, tout en indiquant que les visiteurs sont appelés à être responsables. "On leur dit de ne pas emporter de sable ou de terre".
Ces flux de touristes ont déjà commencé à transformer le visage de Salda.
"Notre lac et notre village étaient bien plus propres il y a quelques années", indique ainsi Aysel Cig, un berger qui habite près de Salda.
Visiblement conscient du danger, le ministère de l'Environnement a indiqué le mois dernier vouloir limiter le nombre de visiteurs par an à 570.000.
En 2019, 1,5 millions de personnes s'y étaient rendues, et 800.000 en 2020, malgré la pandémie.