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Timide consommation des ménages, fort endettement des entreprises


Tahiti, le 19 août 2020 – Selon une note de l’IEOM, les ménages polynésiens ont repris le réflexe d’achat mais cette reprise de la consommation est très timide. De leur côté, les entreprises se sont par contre fortement endettées pour renforcer leur trésorerie.
Dans une note sur « l’impact de la crise de la Covid-19 sur la situation financière des ménages et des entreprises », l’Institut d’Emission d’Outre-mer (IEOM), constate, dans un vocabulaire prudent, que les ménages font encore preuve d’une certaine « retenue » dans leurs actes d’achat avec une situation bancaire en cours de « normalisation » alors que l’on assiste à « la montée de l’endettement des entreprises en juin ». En filigrane, la possibilité pour l’économie polynésienne de se reposer sur la consommation locale apparait en l’état actuel peu évidente.
Les ménages jouent la prudence
Confinés à domicile, avec de nombreux commerces fermés, les Polynésiens n’ont tout naturellement pas fait chauffer les cartes bancaires pendant les six semaines de restriction des déplacements. Une épargne « forcée » selon l’IEOM, qui a donné lieu à un timide rattrapage de consommation. « En mai et juin, les consommateurs accroissent leurs dépenses, mais modérément ». Les Polynésiens ont repris l’utilisation de leur carte de paiement mais à des niveaux encore inférieurs (–18%) à la période d’avant confinement.
En cause notamment l’environnement incertain qui oblige les ménages à se constituer une « épargne de précaution » pour faire face à des jours difficiles. Les dépôts sur les comptes bancaires classiques des ménages, qui avaient gonflé de 10,2 milliards entre mars et mai, ont commencé à diminuer sensiblement (-0,5 milliards). Parallèlement, les Polynésiens jouent la prudence. Pour l’Institut, ce phénomène se matérialise par une hausse des dépôts rémunérés – au premier rang desquels les livrets d’épargne – de 1,6 milliard de francs. Une évolution des dépôts bancaires qui est donc le reflet « à la fois le regain de dépenses des ménages et les pertes de revenus engendrées par les diminutions de salaires liées aux mises en travail partiel ». 
L’endettement des ménages progresse également légèrement en juin mais cette évolution, timide, cache des réalités distinctes depuis le confinement. Depuis février, les crédits à la consommation baissent avec des ménages probablement plus prudents et moins enclins à une frénésie d’achat impliquant dans ce contexte incertain des traites à payer. Parallèlement, les crédits immobiliers sont en hausse sur la même période, signe que le logement et la terre restent l’investissement-refuge en cette période.
Les entreprises s’endettent 
Du côté des entreprises, l’heure est à la survie et le salut passe par les banques. Les crédits bancaires accordés aux entreprises s’accélèrent « significativement ». Les organismes de la place, après avoir octroyé 7,3 milliards de Fcfp en mai, en ont encore prêté 10,1 en juin. Des montants sans commune mesure avec ceux qui étaient constatés entre 2017 et 2019 en période de relance. Sur le second trimestre, les crédits accordés étaient ainsi dix fois supérieurs à la même période en 2019. Une évolution « dynamisée par la montée en puissance des PGE ». 550 prêts garantis par l’État ont ainsi été accordés depuis leur mise en place et jusqu’à fin juin, pour un montant total de 26,6 milliards de Fcfp. Un montant qui, comme l’indique l’IEOM, correspond à des PGE accordés mais non nécessairement décaissés et qui tardent à arriver sur les comptes des demandeurs. Une subtilité qui explique l’écart entre les annonces de signature de PGE et les virements effectivement perçus par les acteurs économiques.
L’endettement des entreprises est donc en forte hausse mais principalement pour financer des problèmes de trésorerie liés à une baisse drastique de l’activité et non un besoin d’équipement pour faire face à un regain de commandes ou moderniser l’outil de travail. Les crédits pour l’équipement sont ainsi divisés par deux en un an alors que les entreprises voient leur capacité financière se renforcer temporairement par cette perfusion économique. Des crédits destinés à maintenir l’exploitation qui sont au mois de juin, selon l’IEOM, 30 fois supérieurs à la moyenne constatée habituellement.  « Dans l’attente d’être utilisés, les PGE débloqués contribuent aussi à l’augmentation des dépôts des entreprises, +9,6 milliards de F en juin, après +7,6 en mai ». Les entreprises ne sont donc pas plus riches pour autant. Ces augmentations témoignent ainsi plus d’une volonté de parer au pire que de préparer des jours meilleurs.

Rédigé par Sébastien Petit le Mercredi 19 Août 2020 à 09:21 | Lu 2209 fois