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Tahiti Tourisme, du mieux, mais à parfaire


Finances - La Chambre territoriale des comptes a publié ce lundi son rapport sur le contrôle des comptes à la gestion du GIE Tahiti Tourisme de 2017 à 2021.  

 

La Chambre territoriale des comptes (CTC) s’est de nouveau penchée sur le contrôle des comptes à la gestion du GIE Tahiti Tourisme. La période observée s’étale de 2017 à 2021. L’organisme, créé en 1992, avait déjà été sévèrement critiqué par la CTC lors d’un précédent rapport publié il y a tout juste dix ans. À l’époque, le gendarme financier pointait du doigt l’interventionnisme politique et la mauvaise gestion de l’organisme qui lui avait fait presque baisser le rideau en 2011.  

 

Pour ce nouveau rapport, la Chambre est, à peine, moins sévère. “L’instruction a permis de constater un réel dynamisme des équipes en place, les actions marketing à l’international sont importantes et les opérations de sensibilisation de la population locale sont visibles.” Ça, c’est pour la partie gentille du rapport, qui enchaîne plus durement. “La première difficulté pour le GIE réside dans sa capacité à justifier l’effectivité de retombées économiques directes issues de ses propres actions de promotion, obstacle qui semble être communément partagé en matière d’économie touristique”, explique la synthèse du rapport.  

 

Dans le secteur de la promotion, il est toujours bien difficile de faire la part des choses entre dépenses engagées, retours espérés et retours effectifs, et le GIE Tahiti Tourisme n’échappe pas à la règle. Résultat, la CTC doute même de la démarche promotionnelle envers les marchés porteurs. Entre “prospection habituelle” d’un côté et “présumée pratique du saupoudrage” de l’autre, difficile de s’y retrouver, surtout que “les données de moyen terme indiquent que le mouvement de concentration au profit des États-Unis et des touristes hexagonaux s’est accentué, y compris avant la crise sanitaire de 2020, lorsque toutes les routes aériennes étaient normalement exploitées”.

 


Devoir d’exemplarité

De fait, le ciblage des marchés, porteurs ou non, gagnerait à être éclairci, explique le rapport de la CTC. “La démonstration de la rationalité de ses arbitrages entre marchés et entre segments spécialisés pourrait être encore davantage mieux formulée”, explique le rapport. 

 

Sur la contribution financière du Pays, rien n’a changé en dix ans. Tahiti Tourisme est financé quasi exclusivement par les subventions du Pays, soit 1,6 milliard de franc par an. Un financement qui place le GIE comme un obligé, vis-à-vis de son financeur qui “lui impose encore davantage de garantir un haut degré d’exigence sur trois aspects principalement : transparence du pilotage et des procédures, rigueur de gestion, efficacité des pratiques professionnelles et du contrôle interne”, note la CTC. 

 

Aussi, la Chambre territoriale des comptes n’a que peu goûté les expérimentations russes à la demande de Tearii Alpha et les dépassements de coûts de travaux de 87% pour la constitution de son office de tourisme dans la gare maritime de Papeete. 


Interrogations californiennes et Cadillac flossienne 

 

Si la Californie est une frontière entre terre et mer, le désert et la vie, c’est aussi une zone d’approximation et de non-droit pour Tahiti Tourisme. Dans son rapport, la Chambre territoriale des comptes (CTC) dénonce de nombreux errements dans la délégation sur place. Des griefs qui étaient déjà émis lors du rapport de 2013. Manifestement, rien n’a beaucoup évolué. Les sept agents, tous américains, bénéficient de régimes spéciaux et sont abonnés au manque de rigueur. “Un compte client en déshérence pendant au moins trois années, l’absence de suivi des signatures des personnes autorisées à signer les chèques, une sous-évaluation de dettes fournisseurs, des écarts persistants dans les rapprochements bancaires”, liste le rapport.  

 

Et comme les vieux dossiers refont toujours surface, Gaston Flosse est lui aussi nommé dans le rapport. “La filiale est dotée d’une voiture pour permettre à ses agents d’effectuer les déplacements. À côté de cela, une Cadillac haut de gamme modèle 2003 d’une valeur initiale de 5,9 millions de francs” a été achetée en juin 2003 par la présidence de la Polynésie française, immatriculée en Californie et remise à Tahiti Tourisme, aux dires de la direction en fonction, pour gardiennage, parking et dépôt du véhicule à l’aéroport lors des venues aux États-Unis de M. Gaston Flosse, lorsqu’il était président du gouvernement de la Polynésie française. Un véhicule gardienné et assuré pour rien (4 millions de francs quand même), qui sera finalement volé et retrouvé comme épave. Coup de l’opération, 10 millions de francs. 

 


Le fiasco russe 
 

En 2017, Tearii Alpha, alors ministre du Logement, avait représenté le gouvernement dans une mission d’ouverture de délégation polynésienne en Russie. “Le partenariat a été noué d’abord entre deux représentations d’un grand vin de Bourgogne, en Russie. S’en est suivi un jumelage entre l’île de Kronstadt, située à proximité de Saint-Pétersbourg en Russie, et la commune de Teva i Uta”, retient la CTC. Des démarches soutenues par Jean-Christophe Bouissou, alors ministre du Tourisme. L’ensemble des démarches s’est fait “sans mise en concurrence entre candidats pour assurer la prestation de représentation sur le marché russe” avec un chiffrage de 15 millions de francs pour ouvrir cette représentation en Russie.  

De tergiversations en changements de ministres, la délégation ne verra jamais le jour mais aura malgré tout perdu 15 millions de francs. 

 


Rédigé par Bertrand PREVOST le Mardi 31 Octobre 2023 à 08:26 | Lu 1874 fois