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Science Po Paris: des crises à répétition


Crédit EMMANUEL DUNAND / AFP
Crédit EMMANUEL DUNAND / AFP
Paris, France | AFP | mercredi 13/03/2024 - Sciences Po Paris de nouveau plongé dans la tourmente: l'école des élites affronte simultanément deux crises avec la démission de son directeur renvoyé devant la justice dans un dossier de violences conjugales et une polémique après une mobilisation pro-palestinienne. 

"Le problème de Sciences Po, c'est qu'on va de crise en crise", résume auprès de l'AFP l'un de ses enseignants qui a souhaité garder l'anonymat.

La situation du prestigieux établissement s'est invitée en conseil des ministres mercredi matin, où le président de la République, Emmanuel Macron, a dénoncé des propos "inqualifiables et parfaitement intolérables" rapportés lors d'une mobilisation pro-palestinienne la veille à Sciences po Paris. 

L'Union des étudiants juifs de France a, en effet, affirmé que des jeunes appartenant à l'association y ont été "pris à partie comme juifs et sionistes".

"Les établissements universitaires sont autonomes, mais cette autonomie ne justifie en aucun cas le moindre début de séparatisme", a déclaré la porte-parole du gouvernement, Prisca Thevenot, rapportant une déclaration du chef de l'Etat. 

Cette version est vivement contestée par le comité Palestine de Sciences Po. Dans un communiqué en français et en anglais, il dénonce des "accusations infondées d'antisémitisme de la part de l'extrême droite". 

Comparution à l'automne 

Comme souvent avec Sciences Po Paris, la controverse étudiante a débordé dans la sphère politico-médiatique. 

Sylvain Maillard, chef des députés Renaissance, a appelé "la ministre (de l'Enseignement supérieur Sylvie Retailleau) à reprendre les choses en main", mercredi matin sur Radio J, tandis que Sébastien Chenu, vice-président du RN, a demandé à la direction de "plier bagage", sur CNews/Europe1. 

Toujours mercredi matin, le directeur, Mathias Vicherat, renvoyé devant la justice avec son ex-compagne dans un dossier de violences conjugales, annonce sa démission dans un message à la communauté éducative.

"Des convocations devant le tribunal correctionnel ont été délivrées à M. Vicherat et Mme Sansal-Bonnefont pour des violences réciproques au sein du couple", a confirmé le parquet de Paris à l’AFP.

Les ex-concubins se voient reprocher notamment "des violences sur conjoint ayant entraîné une incapacité de travail supérieure à huit jours", a précisé le ministère public.

Ils comparaîtront à l’automne, d’après une source proche du dossier. 

Mathias Vicherat, 45 ans, et son ex-compagne Anissa Bonnefont, s'accusaient réciproquement de violences conjugales et avaient été placés en garde à vue le 3 décembre avant d'être remis en liberté le lendemain. Le parquet de Paris avait ordonné une enquête préliminaire. 

Les deux ex-concubins n'avaient pas porté plainte. Le parquet de Paris a rappelé "que la charge d’engager des poursuites incombe au seul ministère public".

Déboires et scandales 

Dans son message de mercredi, M. Vicherat écrit contester "toujours les accusations de violences qui ont été formulées et diffusées à (son) égard". 

A la suite des accusations de violences conjugales en décembre, Mathias Vicherat avait proposé son retrait de la direction, avant de revenir fin janvier, sous les huées d'étudiants.

En attendant la nomination d'une nouvelle équipe dirigeante, "une administration provisoire" va être mise en place "dans les prochains jours", a indiqué la direction de Sciences Po Paris.

"En lien constant avec ses acteurs, le ministère va continuer à accompagner l’établissement afin de permettre son bon fonctionnement, en veillant en particulier à la sérénité de ses débats et à la lutte contre l’antisémitisme et toute forme de discrimination", a déclaré la ministre, Sylvie Retailleau, dans une déclaration transmise à la presse. 

Mathias Vicherat "représente Sciences Po, et avec ce qu'il a fait, il n'est plus exemplaire", estime Félix Mesonnier, étudiant engagé syndicalement et politiquement à Sciences Po. 

Sciences Po Paris cumule déboires et scandales autour de ses dirigeants depuis une dizaine d'années sans que son prestige académique n'en soit pour l'heure entaché. 

M. Vicherat avait succédé en novembre 2021 à la tête de l'école à Frédéric Mion, contraint de démissionner en février de cette année-là pour avoir dissimulé les soupçons d'inceste visant le politologue Olivier Duhamel, qui était alors le président de la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP). 

Frédéric Mion avait lui-même succédé à Richard Descoings, patron de Sciences Po de 1996 à 2012 qui a profondément modernisé l'institution fondée en 1872. Richard Descoings est mort accidentellement dans une chambre d'hôtel à New York.

Rédigé par RB le Mercredi 13 Mars 2024 à 07:01 | Lu 779 fois