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Santé, solidarité, retraites : comment échapper à la faillite du système ?


Le siège de la Caisse de prévoyance sociale à Papeete
Le siège de la Caisse de prévoyance sociale à Papeete
PAPEETE, 17 novembre 2014 - La réforme du système de santé sera prolongée, annonce le document d’orientation budgétaire transmis aux élus de l’Assemblée comme base de réflexion au budget primitif du Pays. L'année 2015 est capitale pour éviter la faillite du système de la PSG ; mais n'est-il pas déjà trop tard ?

"L'Etat ne viendra pas à notre secours chaque année, ne nous leurrons pas", a prévenu Nuihau Laurey, jeudi lors de son intervention devant les représentants de l’Assemblée. Si l’Etat s’est engagé, sans en préciser les modalités, à contribuer au financement du Régime de solidarité territorial (RST) en 2015, rien n’assure que cette contribution sera pérenne. Pire, le système de retraites est annoncé en cessation de paiement dès 2016. Aussi, le vice-président a-t-il annoncé pour 2015 des "mesures impopulaires" mais "nécessaires" pour redresser le système de couverture sociale polynésien, gagné par un déficit structurel de ses branches maladie, solidarité et retraites.

Après 20 ans d’existence, la Protection sociale généralisée (PSG) commencera l’année 2015 avec un déficit cumulé de près de 20 milliards Fcfp, dont 6 milliards Fcfp de résultat négatif pour le seul Régime général des salariés. Ce déficit sera compensé en partie par un nouveau prélèvement dans le fonds de réserves des retraites. Le RST a de son côté été annoncé en déficit prévisionnel de 6,6 milliards cette année.

"Le chantier de redressement des comptes sociaux de la PSG doit être poursuivi tant sur la gouvernance que sur les risques « maladie » et « retraite », dont les déficits annuels pèsent fortement sur la viabilité du système", énonce avec beaucoup de pudeur le Document d'orientation budgétaire 2015.

Avec des dépenses en augmentation constante de 6% par an, la PSG pourrait atteindre les 126 milliards de dépenses en 2016. Pratiquement autant que le budget du Pays. En 2013, les seules dépenses de santé ont coûté 261000 Fcfp par habitant à la collectivité. Et rien ne laisse espérer une embellie de la situation, à courts termes. "Le vieillissement de la population polynésienne est engagé et l’évolution du nombre de patients souffrant de longues maladies est rapide (+66% entre 2002 et 2012)", constate d'ailleurs le rapport de la dernière mission de l’Igas, qui conclue : "de nouvelles réformes restent donc nécessaires pour garantir la pérennité du financement de la santé".

Nouvelle réforme des retraites

Aussi "les mesures impopulaires" qu’évoque le gouvernement pour 2015, s’attaqueront-elles au cœur du problème de la PSG : à son système de retraites par répartition en faillite ; à une réforme en profondeur du fonctionnement de la branche maladie.

"Entamée en 2014, une réforme structurelle de la branche retraite de la tranche A (salaires inférieurs à 254000 Fcfp) sera poursuivie avec l’adoption d’une loi du Pays portant sur une réforme des paramètres", déclare le DOB. Cette loi entérinera la réforme engagée par simple arrêté du conseil des ministres, en avril dernier, et devrait porter sur un allongement à 40 ans de la durée de cotisation, aujourd’hui encore de 35 ans, et une nouvelle augmentation de leur taux, déjà passé de 16,77 à 18,15% début 2014. Deux mesures impopulaires, mais nécessaires et pas forcément suffisantes dans l'immédiat. Le déficit prévisionnel de la "retraite A" devrait atteindre 7 milliards Fcfp fin 2014 pour un total de 31,4 milliards Fcfp de pensions versées sur l’année. Mais, outre son déséquilibre lié aux effets conjugués du vieillissement d'une population dans laquelle près d'un actif sur quatre est sans emploi, le problème du système de retraites polynésien est un manque de liquidités. Quatre cinquièmes des 34,6 milliards Fcfp de son fonds de réserve se composent de valeurs immobilières. Ce système par répartition est donné en cessation de paiements pour début 2016...
Et dans ce contexte, la "réforme en profondeur des paramètres de la retraite B" est un épiphénomène. Elle sera pourtant mise en chantier dès 2015.

Enveloppe fermée

Sur le volet maladie, "les mesures impopulaires" concernent notamment l’annonce de la mise en place "par les pouvoirs publics d’une enveloppe fermée consacrée à la santé, en particulier en ce qui concerne l’offre de soins". Cela annonce la fatalité d’une réouverture des négociations entre le Pays et les praticiens libéraux. Ce dossier avait été laissé en suspens fin 2012. "Les professionnels de santé libéraux en Polynésie française sont dans une situation particulièrement favorable", constate au passage le rapport de l’Igas, transmis au Pays en juin dernier. "A une rémunération élevée s’ajoute en effet un système d’imposition ne pesant que très marginalement sur les non-salariés. Leur participation à l’effort de rétablissement des comptes est indispensable". L'épineux dossier de la convention entre les praticiens libéraux et la CPS devra être remis sur l'écheveau. Au-delà ces relations avec les médecins libéraux, on en sait peu encore sur le projet que le nouveau directeur de la santé, François Laudon, (nommé la semaine dernière) a en tête. Dans une interview parue dans La Dépêche de samedi, il évoque toutefois une possible réduction de l'offre publique de la santé.

Une nouvelle baisse du ticket modérateur est également à craindre en 2015.

Le troisième volet des ajustements politiques annoncés pour l'an prochain concerne la prévention. En 2012, près de 35 000 polynésiens étaient traités en longue maladie. Et les deux tiers d’entre eux pour des affections non transmissibles : hypertension artérielle ; diabète sucré ; affection pulmonaire ; cancer… Le Pays prévoit d’investir 774 millions Fcfp en faveur du dépistage, de la promotion des habitudes saines dès l'enfance, de la lutte anti-vectorielle et de la formation des professionnels de santé.

En Polynésie, les maladies liées à l’obésité, aux complications de problèmes cardiovasculaires et au diabète, sont à l’origine de 3000 nouveaux allocataires en longue maladie chaque année. Et la Caisse de prévoyance sociale observe une augmentation moyenne de cet effectif de l'ordre de 6% par an depuis 2003 alors que nombre des patients suivis en longue maladie a été multiplié par quatre en 20 ans.

Les études prouvent qu'en matière de santé publique aussi il vaut mieux prévenir que guérir. Il est démontré qu'un franc investi dans la prévention permet à terme de faire l'économie de 1,4 franc en dépenses de santé.


Rédigé par JPV le Lundi 17 Novembre 2014 à 09:56 | Lu 2017 fois
           



Commentaires

1.Posté par simone grand le 18/11/2014 07:43 | Alerter
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Une certaine conception du progrès a entraîné le saccage des rivières et la privatisation de grandes portions du littoral, lieux ancestraux de détente et d'épanouissement. En compensation de ces frustrations, les gens mangent trop, s'abrutissent devant la télé, dévorent des sucreries, fument etc.
Revoyons notre manière de penser et donc d'agir.
Restitions l'espace public aliéné à la population
Multiplions par 3 ou 10 le prix des bonbons qui devront être interdits à l'école.
Augmentons le prix des sodas.
etc.
Simone Grand

2.Posté par zozo le 18/11/2014 12:03 | Alerter
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Encore une fois les très cher élu polynésiens TAHOERA en tête nous dépouillent. Nous cotisons pour avoir une retraite quand nous ne serons plus en capacité de travailler, et on nous prend cette argent pour payer la maladie et toutes les prestations de la CPS. Après on dit que le régime des retraite est en cessation de paiement et qu'il va falloir augmenter les cotisation retraite. C'est du détournement de fond pur et simple !!! Bien sûr les élus avec leur caisse à part sont tranquille ! comme les fonctionnaires !

3.Posté par Popoti le 18/11/2014 12:11 | Alerter
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En complément du post 1 de Simone :

- obliger le plus pourvoyeur local de limonade a réduire le taux de sucre de ses boissons. (chiche....) ou rajouter une taxe sur ces boissons pour couvrir les frais médicaux.
- faire la chasse aux fraudeurs...... (un vœu pieux qui n'intéresse personne..... à moins que toutes les familles bénéficient du système , ceci expliquant les œillères)
- réduire les avantages aberrants du personnel de la caisse.

Je ne fais que rêver à un monde plus juste.... Comme d'habitude, le petit cotisant est sollicité.... c'est tellement plus simple et rapide.

4.Posté par zozo le 18/11/2014 16:25 | Alerter
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le gouvernement déclare le rapport de l'IGAS hors sujet et refuse de le communiquer aux membre de l'assemblée ! belle preuve de démocratie ! G FLOSSE a dit qu'il n'appliquerait pas le rapport BOLLIET. Mais le gouvernement continue de demander des milliard à PARIS en criant sur tout les toits que la PSG est en passe de mourir et que ce sera du au manque de solidarité des contribuables métropolitains; Chantage quand tu nous tient !Le business des taotes ,pharmaciens et autres a encore de beaux jours devant lui. Avec le rapport de l'IGAS pas de hausse de cotisation mais des economies ^++++

5.Posté par Gabs le 18/11/2014 22:35 | Alerter
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Santé, solidarité, retraites : comment échapper à la faillite du système ?

Réponse : Revoir le fonctionnement de la CPS et recentrer sa mission sur son objectif premier... mais augmenter les cotisations et réformer la retraite est tellement plus facile !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

6.Posté par jacobo le 19/11/2014 01:20 | Alerter
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"Rédigé par JPV le Lundi 17 Novembre 2014"
"Après 20 ans d’existence, la Protection sociale généralisée (PSG) commencera l’année 2015 avec un déficit cumulé de près de 20 milliards Fcfp,"
"Avec des dépenses en augmentation constante de 6% par an, la PSG pourrait atteindre les 126 milliards de dépenses en 2016."
"Il est démontré qu'un franc investi dans la prévention permet à terme de faire l'économie de 1,4 franc en dépenses de santé. "

Monsieur JPV, si vos informations sont exactes et notamment la démonstration de 1 f pour 1.4 f et bien il suffirait donc de réduire de 12.94% les dépenses de santé par habitant (33780f par habitant) pour les réinvestir dans la prévention en plus des 774 millions prévus ( soit un total de 14 285 714 286 f) pour que les 20 milliards de déficit ne soient plus qu'un mauvais souvenir à terme . Reste à savoir si "à terme" veut dire avant qu'on ne puisse plus compensé dans les fonds de réserve de la Retraite , soit fin 2015 ....??? Un peu trop facile ...ou pas assez complexe ...
Soyons optimiste, on a de la marge . 2016 c'est dans plus d'un an on a le temps de réformer .
Travailler sous pression, y'a rien de mieux .

7.Posté par jacobo le 19/11/2014 17:57 | Alerter
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( suite du poste 6 )
....plus qu'un mauvais souvenir à terme . Reste à savoir si "à terme" selon l'étude prouvée que vous citez, sera avant
que l'on ait plus les moyens de compenser dans les fonds de réserve de la Retraite . Donc avant 2016, ça parait un peut trop facile ...ou pas assez complexe aussi .
Cependant, soyons optimiste . Après tout il nous reste plus de 365 jours pour pendre une réforme qui n'a pu voir le jour en
quelques années quand le déficit était moindre .
Aussi, certains préfèrent continuer à accuser les avantages aberrants du personnel de la CPS dont on ne connaît même pas les chiffres alors que la moyenne est calculée à 261 000 f en dépense de santé PAR HABITANT en 2013 avec une AUGMENTATION de 6% par an . C'est bon là, le topo est fait alors arrêtez de regarder le doigt qui vous montre la lune .
Le problème c'est le manque de moyen pour une meilleure maîtrise des dépenses de santé .