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Salaires : combien gagnez-vous par rapport au reste des Polynésiens ?


PAPEETE, le 11 janvier 2015 - Votre salaire vous semble sans doute très insuffisant par rapport à toute la valeur vous apportez à votre organisation. Mais en réalité, comment se compare-t-il au reste de la population polynésienne ?

En Polynésie presque personne ne semble satisfait de son salaire, chacun étant persuadé de gagner moins que d'autres personnes faisant le même travail. Mais la seule façon d'en avoir le cœur net est de regarder les vrais chiffres des salaires polynésiens déclarés à la CPS et compilés par l'ISPF. La dernière année complète disponible est 2013. Depuis, le SMIG a augmenté de 3500 Fcfp, mais à quelques milliers de francs près, les chiffres n'ont pas profondément changé en 2014.

Voici donc les salaires de la population, répartis entre le secteur privé (près de 46 000 salariés) et le secteur public déclaré à la CPS (plus de 15 000 salariés) :


Répartition des salaires dans l'ensemble de la population de Polynésie déclarée à la CPS
Répartition des salaires dans l'ensemble de la population de Polynésie déclarée à la CPS
L'évolution des salaires depuis 10 ans :

Pour analyser l'évolution des revenus des Polynésiens, l'observateur se retrouve vite confronté à un problème de données. Les seuls chiffres disponibles sont les salaires déclarés à la CPS et ramenés en équivalent temps pleins par l'ISPF. Ils n'incluent pas les salaires des fonctionnaires d'État (sauf les contrats locaux) ni les revenus financiers des ménages. Les chiffres disponibles sous-estiment donc fortement les plus hauts revenus.

Malgré tout, l'évolution des salaires des employés du privé et des fonctionnaires déclarés à la CPS est déjà riche d'enseignements, surtout si on remonte à 2003, donc avant le Taui et l'augmentation rapide du salaire minimum dans les années qui ont suivi. Sachant que sur la période les prix ont augmenté de 16%.

L'augmentation du SMIG a écrasé les petits salaires

Dans la population générale, les salaires des 10% les plus pauvres se sont aujourd'hui totalement alignés sur le SMIG qui a augmenté de 41% en 10 ans. Pourtant en 2003, quand le SMIG était alors à 106 000 Fcfp, il y avait de vraies différences de salaires entre les travailleurs les moins bien payés et ceux au revenu minimum. Aujourd'hui, seule la fonction publique territoriale a maintenu une progression dans ses petits salaires.

Les professionnels du privé dénoncent un effet pervers de cet écrasement des bas salaires. Christophe Faure, co-président du Conseil des professionnels de l’hôtellerie, nous expliquait en septembre dernier que "aujourd’hui dans l’hôtellerie, avec l’augmentation du SMIG ce sont les sept premiers échelons de la grille de salaire qui sont écrasés au même niveau. Du plongeur tout juste embauché qui n’a pas d’expérience à la réceptionniste trilingue, ils sont tous au SMIG. Il n’y a plus de progression, c’est très démotivant pour le personnel."

Les hauts salaires limitent les pertes

Les chiffres collectés par la CPS ne comprennent pas les revenus financiers (dividendes, intérêts, loyers…) et sous-estiment donc déjà les plus hauts revenus. Malgré tout, les salaires des 10% des Polynésiens les mieux payés ne se sont pas trop mal sortis de la décennie qui vient de se terminer.

Ainsi, en 2003 ils gagnaient au moins 4,16 SMIGs avec un salaire commençant à 441 000 Fcfp. Après la série d'augmentations du salaire minimum, l'écart s'était réduit à 3,6 SMIG (502 000 Fcfp) en 2008 pour se maintenir à ce niveau jusqu'à aujourd'hui (à 539 000 Fcfp). Par contre chez les plus riches, il est peu probable que Tahiti ait échappé à la lourde tendance mondiale qui a vu les grandes fortunes augmenter considérablement, malgré un petit passage à vide pendant la crise.

Les classes moyennes ont progressé moins vite

Les chiffres montrent que parmi toutes les tranches de salaires, celles qui ont augmenté le moins vite sont celles des 50% de la population située entre les 25% les moins bien payés (qui ont profité de l'augmentation du SMIG) et des 25% les mieux payés.

Le salaire médian, donc celui qui divise la population en deux (la moitié gagne plus, l'autre gagne moins) a augmenté de 22% en 10 ans. Celui du 75ème centile (75% de la population gagne moins) n'a augmenté que de 21%.

Et c'est surtout dans la fonction publique que les salaires intermédiaires ont augmenté très lentement, souvent moins vite que l'inflation. Le 25ème centile (un quart des fonctionnaires gagnent moins) n'a augmenté que de 13% en 10 ans, le salaire médian que de 14%. Ils ont augmenté beaucoup moins vite que les salaires des hauts fonctionnaires (presque +19%). Ils restent malgré tout 25% à 58% au-dessus des salaires du privé des mêmes centiles.

Restent ceux qui n'ont pas de revenus, en particulier les chômeurs qui ne touchent aucune indemnité sur le Territoire. En 2002 le taux de chômage mesuré par le recensement était à 11,7%. Il n'avait pas bougé en 2007. Mais en 2012, il avait doublé pour atteindre 21,8 % de la population active et a encore augmenté depuis.



Les salaires moyens et médians

Le salaire brut équivalent temps plein s'établissait en 2013 en Polynésie à :
Salaire moyen : 308 174 Fcfp (+29,5% en 10 ans)
- Dans le privé : 290 391 Fcfp (+35%)
- Dans le public : 362 782 Fcfp (+21%)
Salaire médian (la moitié de la population gagne moins) : 219 894 Fcfp (+22%)
- Dans le privé : 201 000 Fcfp (+28%)
- Dans le public : 318 243 Fcfp (+14%)

Salaire minimum en 2013 : 149 491 Fcfp (+41% en 10 ans)

Inflation : les prix ont augmenté de 16% sur la même période



La masse salariale descend sous les 200 milliards Fcfp

La masse salariale en 2013 est désormais passée sous les 200 milliards Fcfp. En cinq ans, la masse salariale a diminué de 12 milliards Fcfp (6%). Entre 2012 et 2013 la baisse a été de 2,2 milliards Fcfp, dont la moitié est due à l’administration publique dont la masse salariale a régressé de 1,9 % suite à la baisse des effectifs et du gel des salaires.

À partir de quel salaire est-on riche à Tahiti ?

En 2013 il fallait gagner plus de 539 000 Fcfp brut par mois pour être dans les 10% des salariés les mieux payés. Mais ces chiffres cachent encore une disparité entre le privé et le public :
- Privé : plus de 508 500 Fcfp brut par mois (+29% en 10 ans)
- Fonction publique territoriale : plus de 593 800 Fcfp par mois (+19% en 10 ans)
Mais les chefs d'entreprises et cadres du privé, eux, cumulent probablement leurs salaires avec des bonus, primes et dividendes qui ne sont pas comptabilisés par la CPS.

En tout, en 2013 il y avait 4 000 personnes en Polynésie qui touchaient plus de 600 000 Fcfp par mois.

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Dimanche 11 Janvier 2015 à 18:59 | Lu 22356 fois
           



Commentaires

1.Posté par Taaroa le 12/01/2015 09:41 | Alerter
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Bonjour,

Je suis en contrat CDI depuis plus de 5 ans déjà mais sur une base de 30 heures par semaine. J'avais fait une formation de qualification et j'ai été choisi mais avec un salaire de base de 130 heures.
Quelques fois même en peut espérer avoir un salaire un peu plus que raisonnable en faisant des heures complémentaires mais pour combien de temps.

Faut espérer qu'en moyenne un établissement privé où publique reste debout plus de 5 ans mais une fois qu'ils n'ont plus l'avale de la défiscalisation tout les ennuis commence avec d'abord une sélection abusif de licenciement. On commence à faire le tri et on subit les harcèlements répétés au niveau morale pour finalement démissionné. Les anciens sont les plus touchés car trop cher. Aujourd'hui même je vois beaucoup de stagiaire qui débarque sur le marché du travail " aidé " avec un contrat de 169 heures sur 2 ans. En même temps, mon collègue qui était sensé passé en CDD après plusieurs mois d'extra n'a pas pu se faire à cause de qui? Je vois constamment des jeunes déposer leurs CV mais je leurs conseil d'aller voir les organismes compétents avec des contrat CAE, CFPA

Si seulement il pouvait y avoir une clause sur la durée du contrat (basé 130 heures) qui stipulerai qu'au bout de 3 ans minimum l'employeur se doit de revaloriser les employé(e)s sur une base de 169 heures avec obligation. Admettons que se soit le cas encore faut-il que les organismes privés où publiques se mettent d'accord sur le sujet.

Les élu(e)s doivent revoir la politique d'embauche afin que tout cela cesse.

2.Posté par Kaddour le 12/01/2015 09:44 | Alerter
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Bravo pour cette tentative d'analyse des salaires au pé'ï ! Hélas comme l'article le précise, les sources de données sont bien pauvres pour faire une véritable étude scientifiques... Mais justement, n'est-ce pas voulu ???
Ainsi les "hauts revenus" pourront continuer en toute quiétude, à essorer le peu de fric qui reste en Polynésie ainsi que celui qui débarque de la métropole... LOL

3.Posté par Leo le 12/01/2015 11:37 | Alerter
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On retiendra surtout la repartition suivante des salaires bruts :
Salaires du privé au dessus de 200.000 = 50% des effectifs
Salaires du public au dessus de 200.000 = 75% des effectifs
...Partout au monde c'est l'inverse !

4.Posté par Claude le 12/01/2015 16:29 | Alerter
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@Leo.

Il faut comparer ce qui est comparable: la proportion d'actifs titulaires d'un diplôme de niveau au moins égal à bac+3 est beaucoup plus forte dans la fonction publique que dans le secteur privé, d'où des rémunérations moyennes automatiquement plus élevées chez les fonctionnaires.

Cordialement.

5.Posté par Neyo le 12/01/2015 20:14 (depuis mobile) | Alerter
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J''imagine alors si on avait comparé ceux du privé aux salaires de la fonction publique d''Etat. Ceux là gagnent encore plus !!! Faut vraiment dégraisser le mamouth comme on dit parce que ceux qui paient leurs salaires ce sont ceux du privé !!!

6.Posté par Neyo le 12/01/2015 20:17 (depuis mobile) | Alerter
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Le pire dans tout ça c'est que les postes publics sont pour la plupart occupés par des privilégiés pistonnés, favorisés etc.. Mieux vaut baisser le nombre de fonctionnaires et les taxes des entreprises le pays en sortira gagnant

7.Posté par Bing le 13/01/2015 09:30 | Alerter
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@Claude, d’accord mais… c’est aussi le constat du dysfonctionnement de notre actuel système économique. Ces grands salariés du public étaient sensés consommer pour faire en sorte que le privé se développe et prenne le relai…or on constate que ces grands salariés ne consomment plus, tout du moins localement parce que tout est beaucoup moins cher partout ailleurs. Notre coût de la vie est ainsi devenu une aberration économique, nous sommes devenus beaucoup trop chers en tout grâce à l’inflation que ces gros salaires provoquent eux-mêmes. Nous sommes dans une bulle spéculative qui ne marche plus et qu’il nous appartient aujourd’hui de reformer car c'est la raison même de la crise que nous vivons.