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Révolution dans la gouvernance de la PSG


Un projet de loi transmis jeudi dernier au Cesec prévoit de mettre un terme au système paritaire qui laissait jusqu'alors la gestion de la protection sociale généralisée aux seuls syndicats de salariés et patronaux.
Un projet de loi transmis jeudi dernier au Cesec prévoit de mettre un terme au système paritaire qui laissait jusqu'alors la gestion de la protection sociale généralisée aux seuls syndicats de salariés et patronaux.
Tahiti, le 31 octobre 2021 - Un projet de loi transmis jeudi dernier au Cesec pose le premier acte de la réforme du système de la Protection sociale généralisée (PSG). Avant la fusion des trois régimes en un seul avec une gestion des risques par branches prévue dès 2023, la PSG sera administrée dès janvier prochain par une instance unique de 15 membres au lieu des 68 qui la gouvernent actuellement.

Ce sont les premiers contours tangibles de la réforme du système de protection sociale polynésien. "Une première pierre sera posée en janvier 2022. Nous n’avons pas le choix, au risque de se prendre le mur en pleine face", prévenait le ministre des Finances en charge de la PSG, lors d’un récent entretien accordé à Tahiti Infos. Une première pierre ? Un caillou dans la mare du système de gouvernance de la Protection sociale généralisée.

Alors que les administrateurs du régime des salariés se réunissaient vendredi pour débattre du projet de budget 2022 de du RGS, un projet de loi du Pays portant réforme de la PSG transforme en chant du cygne ce rendez-vous annuel du conseil d’administration du Régime général des salariés. Les CA du régime des non-salariés et de celui du RSPF sont appelés à vivre le même épilogue. Le texte a été transmis ce jeudi au Cesec, dans le cadre d’une procédure d’urgence. Les représentants de la société civile ont quinze jours pour rendre leur avis. L’exécutif table sur une adoption du projet de loi du Pays à Tarahoi dès le 2 décembre prochain. "Entre ce qui est prévu et la version finale, il y aura certainement des ajustements", admet Yvonnick Raffin. "Maintenant, ce qui est certain, c’est que nous devons réformer cette protection sociale. La première mesure est de travailler sur la gouvernance, avec une mise en application dès début 2022. C’est un impératif."

D’emblée, le projet gouvernemental pose le décor. S’il entend revoir sur ses bases la gouvernance de la PSG, ce texte se présente en rupture "avec l’actuelle architecture lourde et chronophage qui multiplie les instances, retarde la prise de décision et occasionne des risques d’asymétrie dans la mise en œuvre des orientations majeures du gouvernement en matière sanitaire et sociale"

On sait que la réforme de la PSG table sur un régime unique avec une gestion par risque, en lieu et place des trois régimes (salariés, non-salariés et de solidarité) qui encadrent actuellement le système de d’assurance sociale polynésien. Ce régime de protection sociale universel sera décliné en cinq branches : Maladie, maternité, invalidité et décès ; Accidents du travail et maladies professionnelles ; Vieillesse et veuvage ; Famille ; Handicap et dépendance. La fusion devrait entrer en vigueur dès le 1er janvier 2023.

La fin du système paritaire

Mais dès l’année prochaine, exit les trois conseils d’administration : La PSG sera administrée par une instance unique et commune aux trois régimes. Celle-ci sera composée de 15 membres nommés pour cinq ans, soit plus de quatre fois moins qu’aujourd’hui. La protection sociale est en effet actuellement gouvernée par 68 administrateurs nommés pour deux ans : 28 pour le régime général des salariés, à parité entre représentants des salariés et du patronat ; 18 pour le régime des non-salariés ; et 19 pour le régime de solidarité. 
Tel que le prévoit le projet de réforme, le nouveau système de gouvernance reposera sur trois collèges de cinq administrateurs bénévoles, révocables en cas de "carence ou de mauvaise gestion" : cinq pour représenter les salariés, cinq issus du patronat et cinq mandatés par le gouvernement. Une instance unique présidée par le ministre en charge de la Protection sociale et dont les missions sont mieux précisées au regard de celles dévolues à la direction générale de la Caisse. Au passage, ce nouveau système de gouvernance sonne le glas d'un système paritaire qui laissait jusqu'alors la gestion de la protection sociale aux seuls syndicats de salariés et patronaux.

Discussions en vue

"Tout changement fait peur. Je ne suis pas dupe, il y aura forcément des discussions", admettait Yvonnick Raffin vendredi matin, en marge du conseil d’administration du RGS. En proposant de diviser par trois le nombre de représentants des partenaires sociaux au sein du conseil d’administration du navire amiral de la CPS, il a bien conscience que le trait n’est pas neutre. "C’est un projet de loi que nous allons devoir défendre en commission au Cesec. Mais encore une fois, nous devons prendre conscience qu’il faut réformer rapidement. Il s’agit de sauver notre PSG. Alors avançons tous dans ce sens-là de sorte que la protection sociale en dégradation ne devienne rapidement plus qu’un mauvais souvenir."
Examiné ce mardi matin par la commission Santé-Société du Cesec, ce projet de loi pourrait être doté d’un avis de la quatrième institution du Pays dès la semaine prochaine, après examen en séance plénière. 

Pour les comptes sociaux et la PSG, l’année 2022 est annoncée comme une phase de transition. Le premier axe de la réforme est aujourd’hui dans les tuyaux. Les deux prochains chantiers devront être abordés dans l’année : l’identification de nouvelles ressources financières pour assurer la pérennité du service des prestations, et la révision du périmètre de couverture des risques. Le nouveau système prévoit d’être en place au plus tard en 2024. Le temps est donc compté. "Il faut bien comprendre que derrière toutes ces dépenses de santé, de retraite, il y a des équilibres économiques qui sont en jeu", nous expliquait-on vendredi au ministère en charge de la PSG. "Il y a des agents économiques qui doivent pouvoir anticiper."

Le Cosr mis aux oubliettes

Santé, solidarité, vieillesse : Le système d'assurance sociale polynésien sera en principe sous observation avec le Comité stratégique de la protection sociale universelle (CSPSU), le gouvernement entend placer le système de protection sociale sous observation rapprochée. L’instance prévoit d’être créée dès le 1er janvier prochain. "Instance permanente d’études et de concertation", telle que définie par le projet de loi du Pays, le CSPSU sera chargé de la surveillance actuarielle des risques auxquels sont exposées les branches de la CPS et de formuler des propositions pour assurer l’équilibre financier de ces branches au regard des évolutions sanitaires, sociales et démographiques. Ce comité devra en outre produire, au plus tard le 15 juin de chaque année, un rapport annuel et public sur le système de protection sociale universelle et proposer les évolutions souhaitables.
Désignés pour cinq ans, 15 membres composeront le CSPSU : cinq représentants des syndicats de salariés ; cinq représentants des organisations patronales ; un représentant de la Chambre de commerce ; un représentant de la Chambre d’agriculture ; un représentant des professions libérales ; un représentant des organisations de retraités ; et un représentant des fédérations d’artisans.
La création de cet organe de surveillance signe au demeurant la disparition dès 2022 du Conseil d’orientation et de suivi des retraites (Cosr). Créé par la loi de février 2019 avec la réforme du système des retraites, et mis en fonction en 2020, ce conseil n’aura jamais œuvré qu’en temps de Covid. La pénible présentation, ce mardi, de ses “préconisations” pour un plan de sauvegarde et de pérennisation des régimes de retraites sera son ultime manifestation.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Vendredi 29 Octobre 2021 à 18:36 | Lu 4067 fois