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Retraites: des dizaines de milliers de manifestants "déterminés" malgré une mobilisation en baisse


Paris, France | AFP | jeudi 16/01/2020 - Après six semaines de conflit et un trafic SNCF revenant progressivement à la normale, les syndicats opposés à la réforme des retraites ont tenté jeudi de maintenir la contestation par une nouvelle journée de manifestations, s'affirmant "déterminés" pour la suite avec un nouveau rendez-vous le 24 janvier.

Cette journée, à l'appel de l'intersyndicale (CGT, FO, Solidaires, FSU, CFE-CGC et trois organisations de jeunesse) est la 6e depuis le 5 décembre. Des cortèges ont été organisés dans toute la France. 
A Paris, la CGT a revendiqué 250.000 manifestants entre Montparnasse et la Place d'Italie (contre 370.000 le 9 janvier). Ils défilaient derrière une banderole "Retraites à points: tous perdants, retraite à 60 ans: tous gagnants!". On y trouvait en grande majorité des enseignants, malgré des taux de grévistes en baisse dans l'Education nationale (6,6% dans le primaire et 6,83% dans les collèges et lycées, selon le ministère à la mi-journée), mais aussi des avocats en robe, des cheminots, des agents de la RATP ou des étudiants. 
"Je trouve que les gens sont très, très mobilisés, évidemment il y a une fatigue, pas un essoufflement, c'est pour ça que c'est important qu'on fasse des relais, que tout le monde se mobilise", a déclaré Elisabeth, une comédienne de 50 ans, alors qu'un peu plus loin, une pancarte assurait: "merci à nos cheminots, les marathoniens de la grève", slogan entouré de coeurs.  
L'intersyndicale hostile à la réforme espère retrouver une mobilisation conséquente après plusieurs journées d'actions en retrait par rapport aux 805.000 manifestants du 5 décembre, selon le ministère de l'Intérieur.
"La détermination est toujours aussi grande", a assuré le numéro un de la CGT Philippe Martinez. "Il n'est jamais trop tard pour faire céder un gouvernement". 
Mais "il n'y a pas l'idée que le gouvernement aurait bougé en quoi que ce soit", a estimé Benoît Teste (FSU), reconnaissant que "la lassitude, c'est le risque de ce mouvement".

- "Aucune négociation" -

Les premiers chiffres des manifestations dans les régions montraient plutôt une décrue: environ 42.000 personnes ont défilé en France hors Paris à 15H00, selon un comptage de l'AFP réalisé à partir des chiffres fournis par la police ou les préfectures. 
A Marseille, 8.000 personnes selon la police (110.000 selon la CGT) se sont rassemblées sur le Vieux-Port. "Aucune négociation, retrait du projet Macron", demandait une banderole de la FSU. A Toulouse, les manifestants étaient 7.300 selon la préfecture et 80.000 selon la CGT.
A Lille, avant la manifestation, une soixantaine de professionnels du secteur paramédical ont jeté leurs blouses blanches devant les locaux de l'Assurance maladie. "Nous ne comprenons pas que le gouvernement s'attaque à notre système autonome qui fonctionne bien", a dénoncé Juliette Grzeszak, orthophoniste libérale, craignant que les hausses de cotisations retraite ne mettent en péril des cabinets d'orthophonistes, kinés, infirmières...
"Nous, on est particulièrement concernés par la question de la pénibilité avec le travail de nuit ou le fait qu'on respire des produits qui ne sont pas très bons", a expliqué Jérémy Colin, 42 ans, opérateur à la raffinerie de Donges, qui défilait à Saint-Nazaire, où militants CGT côtoyaient des  "gilets jaunes".
Les accès aux terminaux du port de Nantes-Saint-Nazaire, le premier de la façade Atlantique, étaient toujours bloqués jeudi à l'appel de la fédération CGT ports et docks. 
Quatre raffineries sur sept "connaissent des difficultés temporaires dans leurs expéditions", de même que deux dépôts de carburant "sur environ 200", selon le ministère de la Transition écologique et solidaire. 
Dans les transports publics, fers de lance de la mobilisation, le trafic des TGV était "quasi normal" et l'intégralité des lignes de métro était ouvertes à Paris, même partiellement. La SNCF n'est "pas très loin du milliard" d'euros de pertes depuis le début du mouvement, selon son PDG Jean-Pierre Farandou, qui a annoncé un plan d'économies en février.
Pendant ce temps, les propositions du gouvernement pour les différentes catégories mobilisées se poursuivent: des "augmentations importantes dès 2021" pour les enseignants, notamment des hausses de salaires de 70 à 90 euros net par mois en début de carrière ont été annoncées jeudi, ainsi que le maintien d'"une caisse propre" à la profession d'avocat la veille. Sans convaincre les intéressés.
Si la mobilisation baisse, elle reste en tout cas soutenue majoritairement par l'opinion publique, selon plusieurs sondages.
L'exécutif a répondu à la demande des syndicats réformistes (CFDT, Unsa et CFTC) en acceptant de supprimer l'instauration progressive à partir de 2022 d'un âge pivot assorti d'un bonus-malus. Et une "conférence de financement" sera chargée d'ici à fin avril de trouver les moyens de garantir l'équilibre financier en 2027.
Mais le compromis proposé est un "leurre" pour les syndicats hostiles à la réforme qui ont annoncé de nouvelles mobilisations les 22, 23 et surtout 24 janvier, avec une 7e journée d'action nationale à l'occasion de l'examen du projet de loi en Conseil des ministres.

le Jeudi 16 Janvier 2020 à 05:45 | Lu 189 fois