Tahiti Infos

Retour sur une année de justice


Tahiti, le 3 janvier 2024 - Tahiti Infos revient sur les affaires qui ont marqué la vie juridique du fenua en 2023. 

Les grandes dates

17 janvier : Mise en examen dans le cadre du scandale écologique des bonbonnes toxiques, l'ex-directrice de l'environnement conteste cette décision devant la chambre de l'instruction. 
 
20 janvier : Les enquêteurs de la brigade de recherches de la gendarmerie de Faa'a démantèlent un trafic d'ice. Les quatre personnes interpellées ont gagné vingt millions de francs en revendant la drogue.
 
19 février : Le ministère de la Justice autorise les chefs de cour de Papeete à recruter 16 greffiers sur la liste complémentaire. Ces derniers s'envolent pour la métropole où ils recevront une formation de 14 mois.
 
21 février : Un mécanicien de 55 ans est condamné par le tribunal correctionnel à six ans de prison ferme pour des agressions sexuelles commises sur trois mineures de moins de 12 ans. En 2015, l'homme avait déjà été condamné par la cour d'assises pour des abus commis sur ses propres enfants.
 
28 février : Estimant que la fédération n'a pas respecté les procédures, le tribunal administratif annule la sanction de deux ans d'interdiction de compétitions qui avait été prononcée par la fédération tahitienne de surf à l'encontre du surfeur Lorenzo Avvenenti.
 
22 mars : Au terme de trois jours d'audience d'un procès marqué par les dénégations constantes de l'accusé, la cour d'assises d'appel condamne un jeune homme de 22 ans, poursuivi pour avoir mis un coup de pied mortel à un quinquagénaire, à 12 ans de prison ferme.
 
28 mars : L'ancien procureur de la République, Hervé Leroy, annonce que les plaintes déposées par deux commandantes de police pour harcèlement moral à l'encontre du directeur de la DTPN, Mario Banner, ont été dépaysées à Nouméa. 
 
24 avril : L'ancien directeur général d'Onati, Thomas Lefebvre-Segard, saisit le juge des référés pour demander le paiement de primes de résultats et de l'intégralité de sa clause de non-concurrence à son ancien employeur qu'il accuse de rupture abusive.
 
1er juin : La cour d'appel relaxe un marin suédois qui était poursuivi après avoir été interpellé sur un bateau sur lequel les enquêteurs avaient saisi 425 kilos de cocaïne.
 
26 juin : Le tribunal mixte de commerce prononce la liquidation judiciaire de l'entreprise Interoute qui était l'un des poids lourds du secteur du BTP en Polynésie.
 
27 juin : Les hommes d'affaires Dominique Auroy et Pierre Marchesini sont condamnés en correctionnelle à payer une amende de 500 000 francs. Il leur était notamment reproché de ne pas avoir transmis des documents comptables au commissaire aux comptes qui était en charge de la validation des comptes de la société Paradise Pacific TV qu'ils dirigeaient. 
 
2 août : Huit nouveaux magistrats, dont la nouvelle procureure de la République, Solène Belaouar, sont nommés à Papeete.
 
23 août : Après le décès d'un jeune adolescent de 14 ans qui a été percuté par un bateau à Moorea alors qu'il faisait du snorkeling, le juge d'instruction en charge de l'information judiciaire ouverte pour homicide involontaire rend un non-lieu.
 
19 septembre : La fille de l'homme d'affaires Dominique Auroy, Christina Teihotaata, comparaît devant le tribunal correctionnel pour répondre du délit de “déversement de substance nuisibles” dans la mer. Des faits commis alors qu'elle dirigeait le Royal Huahine et pour lesquels elle est condamnée à payer une amende d'un million de francs. 
 
28 septembre :  Un gardien de prison de Nuutania est présenté en comparution immédiate pour répondre de faits de corruption passive. L'individu, auquel il était notamment reproché d'avoir demandé de l'argent à des trafiquants incarcérés en échange de son silence, est condamné à quatre ans de prison dont un avec sursis. 
 
23 octobre : Le tribunal mixte de commerce ordonne la liquidation judiciaire des deux Sofitel de Bora Bora. Soixante-quatre salariés sont ainsi licenciés.

C'était le ​7 mars : Me Outin condamné

Retour sur une année de justice
L'avocat inscrit au barreau de Papeete, Me Marc Outin, est condamné par le tribunal correctionnel à deux mois de prison avec sursis et 500 000 francs d'amende pour avoir proféré des injures publiques envers la communauté juive et pour avoir diffusé les informations personnelles d'une journaliste de TNTV. Cette affaire, qui avait provoqué de vives réactions et avait été largement relayée au-delà de la Polynésie française, avait éclaté le 2 septembre dernier lorsque l'avocat avait diffusé une vidéo sur son compte Facebook accessible au public. Dans ce petit film, Marc Outin s'était filmé dans un magasin d'électroménager du centre-ville de Papeete à côté d'un fumoir barbecue en faisant un lien avec les méthodes utilisées par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale pour exterminer les personnes de confession juive.
 
Lors de son procès devant le tribunal correctionnel le 28 février, Me Marc Outin avait choisi de ne pas être assisté par un avocat. À la barre, cet homme de 64 ans avait dénoncé une “plainte commandée par l'ambassade d'Israël en France” en expliquant que la vidéo diffusée sur son compte Facebook était en fait destinée à son fils avec lequel il entretient visiblement des relations très conflictuelles. Entendu sur la divulgation des coordonnées de l'une de nos consœurs de TNTV qui avait souhaité l'interviewer, Me Marc Outin avait expliqué au tribunal qu'il avait cru divulguer le numéro de la chaîne et non les coordonnées personnelles de la journaliste. 

C'était le 25 mai : Relaxe dans l'affaire Radio Tefana

Au terme de trois jours d'un procès maintes fois renvoyé, la cour d'appel de Papeete relaxe Oscar Temaru, Vito Maamaatuaiahutapu et Heinui Le Caill des accusations de prise illégale d'intérêts. Alors que les trois hommes avaient été reconnus coupables par le tribunal de première instance, la cour estime que l'infraction n'est pas caractérisée et que le tribunal a travaillé “sans affirmation avec des éléments vagues” et qu'en outre, “l'absence totale de bande d'enregistrement écarte le chef de prise illégale d'intérêts”. À l'énoncé de la décision, le leader indépendantiste déclare : “Je ne suis pas surpris de la décision qui a été rendue aujourd'hui parce que c'est la vérité et nous sommes venus là pour dire que nous souhaitions la justice avec un grand J pour notre Pays”. Lors de ce procès, l'avocat général a requis la confirmation des peines prononcées en première instance, soit cinq millions de francs d'amende et six mois de prison avec sursis contre Oscar Temaru, trois mois de sursis et trois millions d'amende à l'encontre de l'ex-président de la radio, Vito Maamaatuaiahutapu, et un mois de sursis contre Heinui Le Caill. Le représentant du ministère public a également demandé une amende de 100 millions de francs contre la radio. Le parquet général a formé un pourvoi devant la Cour de cassation qui n'a pas encore statué.

Rappelons que dans le cadre de cette affaire, Oscar Temaru était soupçonné de s'être servi de Radio Tefana pour promouvoir l'idéologie politique de son parti, le Tavini.

C'était le ​24 juillet : Philip Schyle renvoyé en correctionnelle

Retour sur une année de justice
Philip Schyle est renvoyé devant le tribunal correctionnel par l'ancien procureur de la République, Hervé Leroy, pour répondre d'accusations de prise illégale d'intérêts. Ce renvoi fait suite à l'enquête préliminaire diligentée par le parquet en octobre 2020 et menée par la section de recherches de Papeete à son encontre, pour des faits portant sur une période allant de juin 2016 à juillet 2018. 
 
L'affaire, relatée par Tahiti Infos, avait débuté sur la base de deux plaintes déposées par la successeuse de Philip Schyle et actuelle maire de Arue, Teura Iriti. La tāvana avait alors dénoncé le fait que la commune ait accordé deux subventions de cinq et six millions de francs à l'association Tetiaroa Royal Race au sein de laquelle travaillaient plusieurs élus municipaux, parmi lesquels Jena Punaa épouse Demary, dont le mari n'était autre que le trésorier de l'association. Une association spécialement créée pour l'organisation de cette course de va'a de 120 km entre Tahiti et Tetiaroa. Selon la justice, l'ancien maire de Arue avait favorisé l'octroi de ces subventions dans le but de servir son intérêt politique. 

C'était le ​10 octobre : Six mois de sursis pour le Dr Théron

Le docteur Jean-Paul Théron est condamné par le tribunal correctionnel à la peine de six mois de prison avec sursis pour des violences commises sur un clerc d'huissier et des outrages proférés à l'encontre d'une gendarme. Le médecin de 65 ans, qui est sous le coup d'une interdiction d'exercer en raison de manquements à la déontologie, est reconnu coupable d'avoir, le 16 septembre 2021, lancé un plat en fonte sur le bras d'un clerc d'huissier venu lui remettre une convocation de la chambre disciplinaire de l'Ordre des médecins. Il est également condamné pour avoir outragé une gendarme venue cette fois lui remettre une convocation liée aux violences commises sur le clerc d'huissier. Lors de son – long – procès devant le tribunal correctionnel le 26 septembre dernier, le médecin avait notamment assuré que le clerc d'huissier s'était blessé tout seul.
 
Après que le tribunal a rendu son délibéré, l'avocat du clerc d'huissier, Me François Mestre salue une “sanction pénale appropriée par rapport à la nature des faits”. L'avocat note en revanche que sur les intérêts civils et la réparation du préjudice de son client, “nous n'en sommes pas rendus puisqu'une expertise médicale a été ordonnée et il conviendra qu'il soit intégralement indemnisé du préjudice lourd qu'il a subi”. Me François Mestre rappelle en effet que le clerc d'huissier “en est arrivé à ne plus pouvoir reprendre ses fonctions et à perdre son emploi purement et simplement”.

C'était le ​16 novembre : Peine confirmée pour Week-end

Retour sur une année de justice
Le 25 octobre 2022, le tribunal de première instance avait condamné le supermarché Week-end de Punaauia pour tromperie sur la marchandise à une amende d'1,3 million de francs et à la révocation de la peine d'1,5 million de francs à laquelle il avait été condamné antérieurement pour des faits similaires. La société, qui était jugée en état de récidive légale, avait été reconnue coupable d'avoir prorogé les dates limites de consommation sur des pièces de viande décongelées.  
 
Dans un arrêt rendu le 16 novembre, la cour d'appel ordonne la confirmation de cette peine en l'assortissant de peines complémentaires assez rudes sur le plan commercial. Ainsi, du 10 au 15 décembre, soit juste avant Noël, le supermarché devra mettre une affiche de “deux mètres sur trois” faisant état des motifs de sa condamnation sur la façade de son magasin. La cour ordonne également la diffusion d'un encart – relayant lui aussi la condamnation – d'une demi-page dans nos colonnes pendant trois jours. Elle assortit sa décision de l'exécution provisoire. Interrogé, l'avocat du supermarché, Me Thierry Jacquet, indique qu'il n'“accepte pas les termes de cette décision” et qu'il va se pourvoir devant la Cour de cassation. 

Rédigé par Garance Colbert le Mercredi 3 Janvier 2024 à 09:20 | Lu 1754 fois