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Retards de paiement : Nette amélioration dans les entreprises locales


Tahiti, le 15 septembre 2021 - Dans une note récente, l’Institut d’émission d’Outre-mer (IEOM) a étudié les délais de paiement des entreprises polynésiennes au cours de la dernière décennie. L’IEOM note une nette amélioration des relations entre clients et fournisseurs, notamment depuis l’adoption d’une loi du Pays en 2015 fixant une limite légale pour les règlements. Mais cette évolution est moins favorable pour les TPE et le secteur de la construction.
 
Dans une note récente, l’IEOM a étudié “les délais de paiement en Polynésie française” sur la période 2009-2019, non sans considérer depuis lors l’évolution défavorable de la trésorerie des entreprises polynésiennes due à la crise sanitaire. Ces délais de paiement correspondent à la durée entre la livraison ou la facturation d’un bien, d’un service par un fournisseur et le paiement par son client. De ce fait, ils constituent un des enjeux majeurs de la reprise de l’activité économique. Les retards de paiement concernent 29% des entreprises et pèsent sur leur trésorerie. L’IEOM relève cependant une nette amélioration notamment depuis l’adoption de la loi du Pays sur les pratiques commerciales en avril 2015. Mais cette amélioration est très distincte selon le secteur d’activité et la taille de l’entreprise.
 
Une loi pour assainir
 
Les interventions des pouvoirs publics dans la vie des entreprises sont souvent craintes par les entrepreneurs et honnies des économistes. Pour les chefs d’entreprise, l’analyse de l’impact et des conséquences d’une mesure économique précède toujours le jugement sur l’intention et l’action, louable ou condamnable, du gouvernement. Pour les théoriciens libéraux, il s’agit souvent d’une position de principe non négociable. La dernière note de l’IEOM vient saluer une initiative réglementaire instaurée en 2015 avec l’institution de délais-cadre jusque-là inexistant. Ainsi, en l’absence de précision contractuelle, le délai de règlement est fixé à 30 jours suivant la date de réception des marchandises ou d’exécution de la prestation demandée. Si un délai est précisé dans le contrat, il ne peut quoiqu’il arrive excéder 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d’émission de la facture.
 
Le cadre est complété par l’application automatique de pénalités de retard afin de protéger les PME dont la pérennité peut être très rapidement impactée par des délais trop longs à supporter. Après avoir épluché les données des entreprises polynésiennes, l’IEOM note les effets positifs de la loi qui a permis une nette inflexion et un assainissement des relations interentreprises. Entre 2009 et 2014, les délais fournisseurs s’élevaient en moyenne à 64 jours d’achats. À partir de 2015, avec l’entrée en vigueur de la loi du Pays n° 2015-4 du 14 avril 2015 instaurant à 60 jours le délai maximum de règlement à compter de la date d’émission de la facture, ils sont passés sous la limite légale, s’établissant, entre 2015 et 2019, à un niveau moyen de 55 jours d’achats.
 
TPE et BTP moins bien lotis
 
Des durées en constante diminution, désormais inférieures au délai maximal autorisé de 60 jours, qui permettent à l’IEOM de conclure que “les retards de paiement existent mais restent contenus”. En effet, en 2019, 71% des entreprises reçoivent le règlement de leurs factures en moins de 60 jours contre seulement 63% dix ans plus tôt en 2009. Ce qui signifie qu’environ un tiers des entreprises polynésiennes règlent encore leurs fournisseurs au-delà de la limite légale instaurée. Des délais qui peuvent dans certains cas atteindre des durées importantes, 7% des entreprises subissent des retards de paiement supérieurs à 12 mois.
 
Cette évolution favorable ne bénéficie pas de manière uniforme aux entreprises polynésiennes. Choisissant ses mots, l’IEOM indique ainsi que “la taille semble influencer la capacité d’une entreprise à négocier les délais de paiement avec ses fournisseurs. Façon pudique de dire que les grandes entreprises sont plus à même d’obtenir des délais plus longs pour régler leurs fournisseurs que les TPE avec un écart de près de 22 jours entre les deux catégories. Parallèlement, les TPE affichent les meilleurs taux de paiement sans retard. Près de trois quarts d’entre elles règlent leurs factures fournisseurs en moins de 60 jours alors qu’elles ne sont qu’une sur deux dans la catégorie des entreprises de taille intermédiaire. Un constat qui conduit là encore l’IEOM à jouer la prudence dans la formulation, “les retards occasionnés semblent s’allonger en fonction de la taille de l’entreprise.
 
Des différences de comportement selon la taille de l’entreprise qui s’accompagnent “de fortes disparités d’un secteur à l’autre”. Si les secteurs de l’hôtellerie, de la restauration et du commerce bénéficient d’indicateurs favorables, ce n’est pas le cas du BTP. Les entreprises de ce secteur subissent en effet des délais de paiement nettement plus longs notamment des grands donneurs d’ordre publics, à savoir l’État et le Pays. Plus facile donc d’adopter une loi que de la respecter. Ainsi, en 2019, 70% des entreprises du secteur de la construction sont confrontés à des retards de paiement de la part de leurs clients et les retards de plus de deux mois concernent un tiers des entreprises.
 
Éviter les défaillances en cascade
 
Pour l’IEOM, si aucun retard de paiement n’était constaté, la trésorerie nette de l’ensemble des entreprises polynésiennes s’améliorerait de 6 milliards de Fcfp. Une photographie économique à la fin de l’année 2019 qui doit bien évidemment être actualisée. Ces retards certes contenus pourraient s’amplifier à la faveur de la crise économique sans précédent qui a accompagné l’irruption de la pandémie de la Covid-19 en 2020. La plupart des entreprises polynésiennes ont en effet sollicités les différents dispositifs pour soutenir leur trésorerie notamment les prêts garantis par l’État (PGE). Or, compte tenu des incertitudes pesant sur la reprise économique et dans la perspective du remboursement des PGE, passée la période de différé d’amortissement, les entreprises peuvent être tentées de préserver leur trésorerie en retardant certains règlements. Le but est donc dans les mois et années à venir, d’éviter que les difficultés de trésorerie d’une entreprise ne fragilisent tout un ensemble de partenaires commerciaux et n’aboutissent à des défaillances en cascade.
 

Rédigé par Sébastien Petit le Mercredi 15 Septembre 2021 à 17:52 | Lu 2018 fois