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Recyclage: la seconde vie mouvementée des vêtements usagés


Soissons, France | AFP | lundi 08/07/2019 - Rangés dans des cartons ou ficelés en tas de plusieurs centaines de kilos, les vêtements de seconde main s'empilent jusqu'au plafond dans le hangar de la coopérative Relais, situé près de Soissons (Hauts-de-France). Ici, les 140 employés trient 30 tonnes de textile par jour, soit 7.000 par an.

D'un coup de cutter, deux hommes révèlent le contenu de sacs plastiques bien garnis. Ils écartent les pièces les plus imposantes, comme les couvertures, et déversent le reste sur un tapis roulant.

Les vêtements défilent rapidement devant une dizaine de salariées. Chacune se charge de quelques catégories: le presque neuf, les blousons, les vêtements chauds pour enfants etc. Elles sélectionnent leurs pièces et les expédient dans le bac grillagé correspondant.

"Nous leur recommandons de ne pas faire le tri en fonction de leur goût personnel. Si le vêtement a été acheté, c'est qu'il a plu à quelqu'un et peut plaire à nouveau", explique à l'AFP Emmanuel Pilloy, PDG du Relais Nord-Est-Ile-de-France.

Pas de critères de style donc, mais de qualité, de saison et d'âge. Les pièces en meilleur état, environ 10% du total, vont être revendues à prix modeste en France.

Car le Relais a d'abord pour objectif de créer de l'emploi et d'oeuvrer en faveur de l'insertion de personnes en difficulté.

Créée en 1984, cette coopérative emploie 2.200 personnes dans l'Hexagone et compte une vingtaine de centres de tri. Avec près de 150.000 tonnes de textile collectées par an, essentiellement auprès des particuliers, elle est l'un des principaux acteurs du secteur.

A l'heure où la France s'interroge sur la gestion de ses déchets - le projet de loi sur l'économie circulaire est présenté mercredi en Conseil des ministres -, plusieurs chantiers restent à mener en ce qui concerne le textile.

"Il y a un gisement important à récupérer dans la poubelle" des particuliers, commente M. Pilloy.

On estime qu'environ un tiers du textile mis sur le marché français est collecté. Près de 240.000 tonnes ont été récupérées en 2018, selon l'éco-organisme Eco-TLC.

Les vêtements dans un état correct sont compressés en lots imposants avant d'être exportés en Europe de l'Est (10%) ou en Afrique (40%). Destination: le Burkina Faso, Madagascar ou le Sénégal, où le Relais possède des antennes locales, qui emploient un millier de personnes.

La pratique, courante en France et dans les pays occidentaux, ne fait pas l'unanimité.

"On a tendance à se dédouaner en pensant que tout ce qu'on donne va être réemployé auprès de personnes dans le besoin", analyse pour l'AFP, Nayla Ajaltouni, coordinatrice du collectif Ethique sur l'étiquette. Or, "il y a des pays de tradition textile, notamment en Afrique, où ces vêtements de faible qualité viennent concurrencer une industrie et un savoir-faire locaux", indique-t-elle, en recommandant de plutôt "cesser de surconsommer".

Les habits tachés ou troués sont exclus. Leur destin: devenir des chiffons et faire briller des machines industrielles.

Sur une plateforme en hauteur, deux femmes passent les recalés sous une lame afin de réduire leur taille et d'obtenir un tissu uniforme. En quelques secondes, un jogging gris pour enfant est séparé de son élastique et de son motif en strass.

Une exception est faite pour les jeans. Les vieux pantalons sont expédiés sur un autre site français, où ils sont déchiquetés et convertis en un isolant gris bleuté.

"On n'imagine pas forcément tout ce qu'il y a derrière ces dons et tout ce qu'on peut en faire", souligne M. Pilloy.

"Si nous voulons avoir une stratégie de long terme qui crée de l'emploi, il faudrait construire une filière industrielle française pour assurer le recyclage des vêtements et trouver des débouchés à ces matières", estime auprès de l'AFP Yohann Petiot, directeur général de l'Alliance du Commerce, qui regroupe 26.000 commerçants.

Au Relais, certaines catégories de vêtements sont triées plus finement lors d'une seconde étape. C'est le cas par exemple des manteaux.

D'un geste rapide, une employée vérifie la présence des boutons ou le fonctionnement de la fermeture éclair avant de lancer chaque pièce dans l'un des 15 bacs qui l'entourent. Environ 1,5 tonne passe entre ses mains chaque jour.

le Lundi 8 Juillet 2019 à 02:41 | Lu 440 fois