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Procès Haddad-Flosse : stratagème procédural pour suspendre les débats


Ténor du barreau parisien, le bâtonnier Leborgne est l'avocat de Gaston Flosse.
Ténor du barreau parisien, le bâtonnier Leborgne est l'avocat de Gaston Flosse.
Papeete, le 24 septembre 2012 : Cinq Questions prioritaires de constitutionalité ont été soulevées en ouverture du procès en correctionnelle de l’affaire Haddad-Flosse.

Ces actes de procédure font valoir le "droit reconnu à toute personne qui est partie à un procès ou une instance de soutenir qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit. Si les conditions de recevabilité de la question sont réunies, il appartient au Conseil constitutionnel, saisi sur renvoi par le Conseil d’État et la Cour de cassation de se prononcer et, le cas échéant, d’abroger la disposition législative", précise l'article 61-1 de la Constitution française.

Voix de stentor et verbe facile, quatre QPC ont été plaidées par le bâtonnier Leborgne, conseil de Gaston Flosse, et une posée dans la foulée par Me Dubois, conseil de Pascale Haiti. Ces QPC mettent notamment en cause des décisions prises par la Cour de Cassation, sur les questions de connexité et de délai raisonnable, et posent la barre un peu haut pour le Tribunal de Papeete à qui on finit par demander d'être de fait l'arbitre d'une instance régulatrice en matière de droit.

Ténor du barreau parisien, technicien de haute voltige, le pénaliste Leborgne avait fait capoter le procès Chirac en mars 2011, contre toute attente, d’un effet de manche procédural du type de celui réitéré lundi à Papeete, dans une affaire OPT que nul ne souhaite voir jugée immédiatement, au Tahoera’a Huiraatira, à la veille des élections territoriales de 2013.

> Gaston Flosse devant le tribunal ce lundi

Le Tribunal correctionnel de Papeete devra de manière collégiale se prononcer au sujet de ces interpellations juridiques alors que le procureur de la République, José Thorel, a répondu aux observations du bâtonnier Leborgne et de Me Dubois sur la qualité de ces cinq QPC en suggérant à la cour de ne pas donner une suite favorable à ces actes de procédure qui "ne sont pas sérieux et n’entrent pas dans le champs d’application de l’article 61 ", a estimé le représentant du ministère public.

Le procès reprend mardi 25 septembre à 8 h 30.

Entre-temps, le Tribunal doit se pencher sur trois points. Le premier, consiste à vérifier que la question qui lui est posée a une utilité quelconque dans le cadre de la procédure qui lui est soumise. La deuxième consiste à vérifier si l'une des QPC posées n'a pas déjà été tranchée par le Conseil constitutionnel. Enfin, le tribunal agira à la manière d'un premier filtre en estimant si, prise indépendamment, chaque QPC "n'est pas dépourvue de sérieux".

Concernant ces trois aspects que doit instruire le Tribunal correctionnel de Papeete, "Les deux premiers sont purement formels et nous pouvons vous certifier que les conditions sont parfaitement respectées", insiste Me Quinquis, avocat de Gaston Flosse. "Quant au troisième point, son traitement est purement subjectif. Il ouvre deux possibilités : ou bien le Tribunal veut véritablement faire avancer le Droit et fera droit à nos QPC ; ou le tribunal veut faire avancer le procès et les rejettera.

L'avis que donnera le Tribunal au sujet des QPC soulevées n'est pas susceptible de recours. Il pourra être frappé d'appel mais en même temps que le jugement du fond du dossier
.", précise-t-il aussi.

Dans le cas où le tribunal ferait droit à une ou plusieurs des QPC soulevées par la défense de Gaston Flosse, le procès devrait être ajourné dans l'attente d'une nécessaire instruction par la Cour de cassation avant transmission au Conseil Constitutionnel. Les débats du procès de l'affaire Haddad-Flosse se trouverait alors remis pour un délai de plusieurs mois. « Mais ce n’est pas le but poursuivi », rassure Me Quinquis. « Les question posées sont très sérieuses »

Une QPC évoque notamment l’emploi abusif du principe de connexité ayant conduit l’instruction passer outre la prescription triennale et de traiter « des faits présumés de délinquance à col blanc de manière plus grave qu’un crime de sang », illustre Me Quinquis.

La quatrième QPC du bâtonnier Leborgne, pour le compte de son client, a été également évoquée par Me Dubois au sujet de Pascale Haiti, et conteste la régularité de la procédure en évoquant la nullité des gardes à vue de leurs clients, au regard de la décision de la Cour de cassation, vendredi 15 avril 2011, instaurant les nouvelles règles de la garde à vue et prévoyant notamment la présence des avocats lors de tous les interrogatoires.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Lundi 24 Septembre 2012 à 10:18 | Lu 3026 fois