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Prêt CPS : le Tahoeraa dénonce la "fuite en avant" du gouvernement


Prêt CPS : le Tahoeraa dénonce la "fuite en avant" du gouvernement
A la veille du vote du conseil d'administration de la CPS, qui doit se prononcer vendredi matin sur l'octroi d'un prêt de 5 milliards au Pays pour financer la section "Investissements" du budhet 2011, le Tahoeraa Huiraatira se positionne avec force contre ce prêt, et dénonce la "fuite en avant" du gouvernement". " Faute de faire les réformes et les efforts nécessaires, le gouvernement sait qu’il n’aura pas l’aval des bailleurs traditionnels. C’est pourquoi il se tourne vers la CPS en pensant qu’il pourra mieux enfumer les administrateurs que les banquiers et l’Etat" estime Edouard Fritch, dont voici l'intégralité de l'intervention devant la presse ce matin :


Il y a un mois, le gouvernement a fait une demande de prêt de 5 milliards à la CPS au motif que le Pays a besoin de crédits pour financer des opérations d’investissement inscrites au budget 2011.

Pour appuyer sa demande, le gouvernement a effectivement fourni une liste d’opérations inscrites au budget d’investissement 2011 qui portaient sur des chantiers de constructions de logements, d’infrastructures portuaires et routières, d’études diverses. En gros, la plupart des opérations inscrites au budget 2011.

Le 15 septembre, le gouvernement a affiné sa proposition en présentant une nouvelle liste d’opérations inscrites au contrat de projets, concernant principalement le logement social.

Que faut-il penser de cette demande de prêt sensée financer des opérations d’investissement ?

En l’absence de fonds propres et de recettes suffisantes, il est évident que les opérations d’investissement nécessitent un recours à l’emprunt. C’est ce que nous faisons chaque année, et pour 2011 l’Assemblée a autorisé le Pays à emprunter à hauteur de 10 milliards.

Il est vrai que le recours à l’emprunt est de plus en plus difficile pour la Polynésie française auprès des bailleurs de fonds traditionnels en raison de la baisse de la notation de notre collectivité qui n’est que la conséquence de la dégradation de nos finances publiques depuis 2006.

Pour mémoire, je vous rappelle l’évolution de l’épargne nette de la Polynésie au cours de ces dernières années, en m’appuyant sur le rapport d’information financière 2010 fourni à notre assemblée par le vice-président Géros au mois de juin dernier. C’est donc bien le constat de ce gouvernement:

- En 2005, l’épargne nette de la Polynésie , c'est-à-dire la capacité d’épargne, s’élevait à 13,392 milliards ;
- En 2006, nous sommes passés à 11, 432 milliards ;
- En 2007 nous sommes tombés à 5,173 milliards ;
- En 2008 nous sommes passés en épargne négative avec – 903,6 millions ;
- En 2009 nous étions toujours en négatif avec – 349,8 millions.

Dans le même temps, et plus précisément entre 2004 et 2006, les dépenses salariales de l’administration sont passées de 25 à 32 milliards.

Avec un tel bilan, il ne faut pas s’étonner que les caisses prêteuses soient vigilantes sur nos capacités de remboursement des emprunts.

Il ne s’agit nullement d’une volonté du gouvernement central de nuire au gouvernement Temaru puisque vous vous souvenez que nous étions dans cette même situation l’an passé et que le budget 2010 préparé par Gaston Tong Sang n’a toujours pas trouvé la totalité de ses financements puisque l’AFD avait conditionné l’octroi de son dernier prêt de 5 milliards.

Ces conditions, ce sont celles qui ont été actées dès le mois d’avril par le président Temaru et son vice-président Géros qui, après avoir commandité le rapport Bolliet, ont signé le protocole de prêt et les conditions liées. Ce que n’avait pas voulu faire Gaston Tong Sang puisque cela constituait une intrusion dans notre autonomie

C’est dans ce cadre que le gouvernement Temaru nous a présenté un plan de redressement des comptes publics sur lequel il n’est pas utile de revenir, tant il n’a convaincu ni l’opposition, ni l’Etat, ni les caisses prêteuses.

C’est bien dans ce contexte que se situe la demande de prêt de 5 milliards auprès de la CPS.

Notre sentiment, et c’est celui que nous avons développé lors de la discussion sur le plan de redressement, c’est que le gouvernement n’entend faire aucun effort réel de contraction des dépenses publiques. C’est en cela que nous avions parlé d’escroquerie.

Faute de faire les réformes et les efforts nécessaires, le gouvernement sait qu’il n’aura pas l’aval des bailleurs traditionnels. C’est pourquoi il se tourne vers la CPS en pensant qu’il pourra mieux enfumer les administrateurs que les banquiers et l’Etat.

C’est une fuite en avant totalement inacceptable.

C’est inacceptable parce que cela confirme que ce gouvernement n’entend pas rapidement rétablir les comptes publics et mener de manière urgente les réformes nécessaires.

On l’a vu au dernier collectif, au lieu de réduire le volume de l’administration on commence par créer 300 postes supplémentaires. La seule économie connue du plan de redressement, finalement, c’est la disparition de l’ATP actée ce mercredi et le licenciement sec de ses salariés qui, à terme représentera une économie budgétaire de moins de 60 millions par an.

C’est inacceptable également car solliciter la CPS, c’est obérer la capacité de la caisse à assumer ses propres charges.

Le président de la caisse s’est largement exprimé sur ces charges qui sont supérieures aux ressources. Ce rappel utile n’est pas une surprise. C’est d’ailleurs ce qui a motivé la réforme de la PSG qui semble avoir disparu du paysage gouvernemental alors qu’elle devrait entrer en vigueur au 1er janvier 2012 et que la situation n’a fait que s’aggraver au cours de cette année en raison de la suppression d’emplois et donc de la baisse du nombre de cotisants.

Il y a donc de réels motifs d’inquiétude sur la démarche du gouvernement et sur les conséquences qui découleraient d’une acceptation des administrateurs de la CPS à accorder ce prêt.

Il faut d’abord avoir en mémoire ce que disait Standard and Poor’s dans sa note de mars 2011 justifiant la dégradation de la note de la Polynésie : « la situation de trésorerie actuelle de la Polynésie française au regard de ses engagements financiers est très négative. En effet, les montants disponibles sur les instruments de trésorerie à court terme couvrent moins de 40% du service de la dette à 12 mois ».

Cette notation et sa justification valent tout autant pour les bailleurs traditionnels que pour la CPS. Et les administrateurs ne peuvent pas l’ignorer.

L’autre motif d’inquiétude porte sur la destination réelle de ce prêt. Pierre Frébault a beau dire qu’on ne peut pas emprunter pour financer du fonctionnement, il n’est pas convaincant.

Il ne peut pas être convaincant lorsqu’on sait que les sommes qui entrent dans la caisse du pays sont fongibles. C’est ce qu’avait déjà expliqué Tony Géros, c’est ce qu’a rappelé le président de la CPS dans son dernier communiqué.

Plus clairement, ces 5 milliards, une fois qu’ils seront dans la caisse, pourront être utilisé à autre chose que de l’investissement. Mais si tel est le cas, au moment de régler les investissements, le pays devra trouver les sommes correspondantes. Ce qui reste de moins en moins évident puisque les recettes fiscales du pays enregistrent une perspective négative par rapport aux prévisions du budget 2011.

Tony Géros a d’ailleurs annoncé une moins value prévisionnelle de 3,8 milliards au 31 décembre. Et cela, c’est sans compter la moins value du rendement de l’impôt sur les sociétés qui est estimé à environ 3 milliards par les Contributions.

Le budget de Gaston Tong Sang avait déjà été construit sur des perspectives très négatives des rentrées fiscales, ce qui avait conduit à une contraction des dépenses par rapport à 2010. Mais si les recettes réelles sont encore pires que les prévisions, le pire sera rapidement atteint et risque bien de remettre en cause le paiement des salaires de notre administration dont le volume a encore gonflé a l’issue du vote du dernier collectif.

Des opérations fantômes

Le gouvernement ne peut pas non plus être crédible lorsque l’on sait que dans la liste des opérations qu’il promet de faire financer par la CPS on trouve les opérations du contrat de projets relatives au logement social des programmes Motio, Teroma, Vaitupa, Mahinatea, RHI Hotuarea, Cité transit Kosovo, toutes situées sur la commune de Faa’a alors que le maire de la commune, par ailleurs président du pays, vient de mettre son véto sur toutes nouvelles constructions sociales sur sa commune.

Ce sont donc des opérations fantômes. Tout autant que d’autres opérations listées dans le premier document transmis par le gouvernement et qui sont déjà achevées.


En l’état de ces informations, le Tahoeraa est opposé à ce que la CPS accorde un prêt de 5 milliards au pays car, outre le fait que ce serait dangereux pour les réserves de la caisse, ce ne serait pas rendre service au pays.

Ce ne serait que la concrétisation d’une fuite en avant d’un gouvernement aux abois qui ne veut absolument pas prendre la mesure de la réalité de la situation et surtout mettre en œuvre les réformes nécessaires pour remettre d’équerre les comptes publics.

Au final, à 3 mois de la clôture de l’exercice budgétaire, il nous semble que cette année sera nulle, ce qui ne surprendra pas les acteurs économiques.
On vient donc de perdre un an et ce n’est pas l’année prochaine, contrairement à ce qu’affirme le gouvernement, qu’on va pouvoir trouver les concours financiers pour financer les opérations inscrites au budget 2010, au budget 2011 et au budget 2012.

Sur ces bases, il est évident que le budget 2012 ne pourra pas apporter de solutions aux difficultés actuelles et à venir.

Toute l’action du gouvernement doit donc maintenant s’axer sur l’élaboration du budget 2012, en tenant compte des réalités et de la dégradation de nos finances publiques. Nous attendons de voir si le document du débat d’orientation budgétaire qui nous sera transmis sous quinzaine sera le reflet de ces réalités ou si le gouvernement va continuer à chercher à nous enfumer.

Surtout, nous attendons de ce gouvernement qu’il mette en œuvre de manière plus qu’urgente les réformes nécessaires au rétablissement des comptes publics et donc au rétablissement de la crédibilité de la Polynésie française auprès des bailleurs de fonds.

A ce stade donc, et en fonction de la connaissance que nous avons des difficultés budgétaires qui attendent la caisse, nous ne pouvons qu’encourager les administrateurs de la CPS à rejeter la demande de prêt.

le Jeudi 29 Septembre 2011 à 17:36 | Lu 680 fois
           



Commentaires

1.Posté par MOUSTIC le 30/09/2011 06:01 | Alerter
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C'est bien joli tout ce bla bla . Qu'attendez vous pour les mettre dehors ?

2.Posté par TEIVATANE le 01/10/2011 07:01 | Alerter
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La fuite en avant, ce n'est pas un trait de caractère purement tahoeraa ????