Manille, Philippines | AFP | lundi 15/06/2020 - La journaliste philippine Maria Ressa a été reconnue lundi coupable par un tribunal de Manille et risque jusqu'à six ans de prison dans une affaire de diffamation présentée par ses soutiens comme une tentative pour museler les détracteurs du président Rodrigo Duterte.
Maria Ressa, 56 ans, est la cofondatrice du site d'information en ligne Rappler visé par plusieurs procédures judiciaires après avoir publié des articles critiques de la politique du chef de l'Etat, y compris de sa campagne sanglante et controversée contre le trafic de drogue.
L'ex-journaliste de CNN risque jusqu'à six ans de détention. Mais on ignore combien de temps elle devra purger si la condamnation devient définitive. Elle a été laissée libre dans l'attente de l'examen de son appel.
"Nous résisterons à toutes les attaques contre la liberté de la presse", a déclaré aux journalistes après sa condamnation Mme Ressa, qui avait été désignée par Time comme une des personnalités de l'année 2018.
"C'est un revers mais ce n'est pas non plus inattendu", a-t-elle ajouté. "Ils essaient de nous effrayer, mais n'ayez pas peur."
"Mort à petit feu"
"J'ai commencé ma carrière en 1986 et travaillé dans tellement de pays. On m'a tiré dessus et menacée, mais je n'avais jamais connu ce genre de mort à petit feu.", a-t-elle ajouté
Le procès découlait d'un article écrit en 2012 sur les liens supposés entre un homme d'affaires et l'ancien président de la Cour suprême.
La plainte déposée par l'homme d'affaires avait été rejetée en 2017 mais le dossier avait ensuite été transmis au parquet qui avait décidé de la poursuivre, ainsi que l'auteur de l'article, l'ancien journaliste Reynaldo Santos.
Ce dernier a également été déclaré coupable et est demeuré libre sous caution.
Les poursuites résultent d'une loi controversée sur la cybercriminalité, réprimant la diffamation en ligne mais aussi le harcèlement ou la pédopornographie. Cette loi était entrée en vigueur en septembre 2012, soit après la parution de l'article incriminé.
Mais le parquet avait argué que la correction d'une coquille typographique en 2014 -- Rappler avait remplacé le mot "evation" par "evasion" -- faisait que l'article tombait désormais sous le coup de la loi.
"On m'a avertie: +tais-toi ou tu seras la prochaine...+ c'est en partie pourquoi j'ai été visée", expliquait la semaine dernière à l'AFP la journaliste diplômée de Princeton, qui possède aussi la nationalité américaine. Elle avait révélé qu'en tant que responsable de Rappler, il lui arrivait fin 2016 de recevoir jusqu'à 90 messages d'insultes par heure.
Le gouvernement a rejeté les accusations selon lesquelles cette affaire était politique, affirmant veiller à l'application de la loi, y compris pour les journalistes.
Harcèlement
Mais les organisations de défense des droits de l'Homme affirment que cette affaire, les procédures fiscales contre Rappler et les efforts du gouvernement pour retirer ses accréditations au site relèvent du harcèlement.
"Ressa et l'équipe de Rappler sont visées pour leur couverture critique de l'administration Duterte", a affirmé Amnesty International.
"Avec cette dernière attaque en date contre un média indépendant, le bilan des Philippines en matière de droits de l'Homme poursuit sa chute libre.
Human Rights Watch a estimé que l'affaire n'aurait "pas seulement un écho aux Philippines, mais aussi dans de nombreux pays qui considéraient le pays comme favorable à la liberté de la presse".
L'archipel a récemment dégringolé à la 136ème place (sur 180) dans le classement de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières.
Le verdict survient un mois après l'arrêt de la diffusion des chaînes d'ABS-CBN, principal groupe de médias philippin, après que le gouvernement ait promulgué un décret ordonnant leur fermeture.
M. Duterte menaçait depuis des années de fermer ABS-CBN qui, à l'instar de Rappler, a largement couvert la "guerre contre la drogue" du président, qui a encouragé policiers à tuer les trafiquants de drogue et toxicomanes présumés.
Selon l'Agence philippine de lutte contre la drogue, les policiers ont tué au moins 5.600 personnes suspectées de trafic de drogue, mais des organisations estiment que le véritable bilan est au moins trois fois plus élevé.
Une autre figure très critique à l'encontre de cette guerre contre le narcotrafic est la sénatrice Leila de Lima, en détention depuis trois ans pour trafic de drogue.
Maria Ressa, 56 ans, est la cofondatrice du site d'information en ligne Rappler visé par plusieurs procédures judiciaires après avoir publié des articles critiques de la politique du chef de l'Etat, y compris de sa campagne sanglante et controversée contre le trafic de drogue.
L'ex-journaliste de CNN risque jusqu'à six ans de détention. Mais on ignore combien de temps elle devra purger si la condamnation devient définitive. Elle a été laissée libre dans l'attente de l'examen de son appel.
"Nous résisterons à toutes les attaques contre la liberté de la presse", a déclaré aux journalistes après sa condamnation Mme Ressa, qui avait été désignée par Time comme une des personnalités de l'année 2018.
"C'est un revers mais ce n'est pas non plus inattendu", a-t-elle ajouté. "Ils essaient de nous effrayer, mais n'ayez pas peur."
"Mort à petit feu"
"J'ai commencé ma carrière en 1986 et travaillé dans tellement de pays. On m'a tiré dessus et menacée, mais je n'avais jamais connu ce genre de mort à petit feu.", a-t-elle ajouté
Le procès découlait d'un article écrit en 2012 sur les liens supposés entre un homme d'affaires et l'ancien président de la Cour suprême.
La plainte déposée par l'homme d'affaires avait été rejetée en 2017 mais le dossier avait ensuite été transmis au parquet qui avait décidé de la poursuivre, ainsi que l'auteur de l'article, l'ancien journaliste Reynaldo Santos.
Ce dernier a également été déclaré coupable et est demeuré libre sous caution.
Les poursuites résultent d'une loi controversée sur la cybercriminalité, réprimant la diffamation en ligne mais aussi le harcèlement ou la pédopornographie. Cette loi était entrée en vigueur en septembre 2012, soit après la parution de l'article incriminé.
Mais le parquet avait argué que la correction d'une coquille typographique en 2014 -- Rappler avait remplacé le mot "evation" par "evasion" -- faisait que l'article tombait désormais sous le coup de la loi.
"On m'a avertie: +tais-toi ou tu seras la prochaine...+ c'est en partie pourquoi j'ai été visée", expliquait la semaine dernière à l'AFP la journaliste diplômée de Princeton, qui possède aussi la nationalité américaine. Elle avait révélé qu'en tant que responsable de Rappler, il lui arrivait fin 2016 de recevoir jusqu'à 90 messages d'insultes par heure.
Le gouvernement a rejeté les accusations selon lesquelles cette affaire était politique, affirmant veiller à l'application de la loi, y compris pour les journalistes.
Harcèlement
Mais les organisations de défense des droits de l'Homme affirment que cette affaire, les procédures fiscales contre Rappler et les efforts du gouvernement pour retirer ses accréditations au site relèvent du harcèlement.
"Ressa et l'équipe de Rappler sont visées pour leur couverture critique de l'administration Duterte", a affirmé Amnesty International.
"Avec cette dernière attaque en date contre un média indépendant, le bilan des Philippines en matière de droits de l'Homme poursuit sa chute libre.
Human Rights Watch a estimé que l'affaire n'aurait "pas seulement un écho aux Philippines, mais aussi dans de nombreux pays qui considéraient le pays comme favorable à la liberté de la presse".
L'archipel a récemment dégringolé à la 136ème place (sur 180) dans le classement de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières.
Le verdict survient un mois après l'arrêt de la diffusion des chaînes d'ABS-CBN, principal groupe de médias philippin, après que le gouvernement ait promulgué un décret ordonnant leur fermeture.
M. Duterte menaçait depuis des années de fermer ABS-CBN qui, à l'instar de Rappler, a largement couvert la "guerre contre la drogue" du président, qui a encouragé policiers à tuer les trafiquants de drogue et toxicomanes présumés.
Selon l'Agence philippine de lutte contre la drogue, les policiers ont tué au moins 5.600 personnes suspectées de trafic de drogue, mais des organisations estiment que le véritable bilan est au moins trois fois plus élevé.
Une autre figure très critique à l'encontre de cette guerre contre le narcotrafic est la sénatrice Leila de Lima, en détention depuis trois ans pour trafic de drogue.