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Nouvelle-Calédonie: la Marine française en mission de représentation en Asie-Pacifique


ADEK BERRY / AFP
ADEK BERRY / AFP
Koumac, France | AFP | vendredi 04/05/2023 - Les habitants de Koumac, dans l'extrême nord de la Nouvelle-Calédonie, ont fini par s'habituer à sa présence. Depuis dimanche, le porte-hélicoptère amphibie (PHA) français Dixmude mouille dans la baie de Karembé où ne croisent habituellement que de rares navires de pêche et des bateaux-cargo en attente de chargement à la mine de nickel voisine.

Le Dixmude et la frégate La Fayette participent jusqu'à samedi à un vaste exercice militaire en Nouvelle-Calédonie, archipel français du Pacifique Sud. 

L'exercice "Croix du Sud" réunit 3.000 militaires et civils, 10 navires et autant d'avions et d'hélicoptères, de 19 nations différentes. L'occasion pour la France d'affirmer sa stratégie en Asie-Pacifique.

Dans les entrailles du PHA français de 200 mètres de long cohabitent actuellement plus de 800 personnes: des marins, des élèves de l'Ecole navale, mais aussi des légionnaires et des pilotes de l'armée de Terre, auxquels se sont joints depuis quelques jours plusieurs officiers anglais et australiens et un détachement fidjien.

L'escale en Nouvelle-Calédonie du Dixmude, parti fin février du port de Toulon (sud de la France) pour un tour du monde avec la frégate La Fayette dans le cadre de la mission Jeanne-d'Arc, a été calculée pour lui permettre de prendre part à "Croix du Sud". 

Une manière d'illustrer la volonté du président français Emmanuel Macron de renforcer la présence militaire dans les eaux ultramarines. 

"Nos Outremers ne doivent jamais quitter notre regard et notre présence. La marche du monde met nombre de ces territoires, en particulier dans le Pacifique et l'océan Indien, aux premières loges des possibles confrontations de demain", a déclaré M. Macron en janvier lors de ses voeux aux armées.

"La France dispose de la deuxième zone économique exclusive (ZEE) dans le monde avec 11 millions de km2, dont 90% se trouvent dans l'Indo-Pacifique", rappelle le capitaine de vaisseau Emmanuel Mocard, commandant du Dixmude, qui fera bientôt route vers la Polynésie française.

"C'est une zone gigantesque et je répète souvent qu'une zone qui n'est pas contrôlée est un jour pillée. Et ce qui est pillé est un jour contesté. C'est important que les forces de souveraineté surveillent ces zones pour éviter des dérives", estime-t-il.

Importance stratégique croissante

D'autant que dans le Pacifique Sud, les enjeux internationaux deviennent de plus en plus concrets. Tandis que Français, Australiens, Néo-Zélandais et Américains s'entraînent à Koumac, un navire militaire chinois est arrivé vendredi au Vanuatu, à 500 km de la Nouvelle-Calédonie, avec à son bord de l'aide humanitaire.

L'aide chinoise n'est pas nouvelle, mais la présence à "Croix du Sud" du numéro 2 de l'armée américaine dans le Pacifique, le général James Jarrard, illustre l'importance stratégique croissante du Pacifique Sud pour les grandes nations. "C'est important pour nous de développer notre interopérabilité lors d'exercices comme celui-ci avec des alliés qui partagent nos valeurs comme celle de la liberté de navigation", a déclaré à l'AFP le général américain.

Les Etats-Unis ont annoncé l'ouverture prochaine d'une ambassade au Vanuatu, un mois après avoir décidé de rouvrir celle des îles Salomon, à la suite de la signature en mars 2022 d’un accord de sécurité entre les Salomon et la Chine, le premier du genre dans la région.

La France, elle, dispose à Nouméa d'une frégate, le Vendémiaire, occasionnellement utilisée pour des missions en mer de Chine, comme en début d'année dernière ou en 2019, où sa présence dans le détroit de Formose avait suscité un début d'incident diplomatique entre Paris et Pékin.

Pour autant, "le Pacifique Sud n'est pas le Pacifique Ouest", où se situe Taïwan, tempère le général Valery Putz, commandant des Forces armées de Nouvelle-Calédonie (FANC). Dans le Pacifique Sud, "l'enjeu qui touche le plus les populations, ce sont les conséquences du changement climatique, et la façon d'y faire face de la manière la plus efficace possible. Il s'agit donc de promouvoir la liberté de navigation, mais également le multilatéralisme, la coopération, et la présence de la mission Jeanne-d’Arc répond parfaitement à ces enjeux", estime le général.

La France prévoit des moyens militaires accrus pour ses territoires ultra-marins, notamment en Nouvelle-Calédonie. 

Le premier des six patrouilleurs en haute mer commandés par la France pour les Outremers est arrivé à Nouméa en avril et un autre doit être livré en 2025. Suivront le renouvellement des hélicoptères de l'armée de l'Air, puis celui des avions de surveillance maritime de la Marine, inscrits dans la loi de programmation militaire 2024-2030.

le Vendredi 5 Mai 2023 à 06:12 | Lu 948 fois