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“Nous ne sommes pas des pions”


Tahiti, le 15 août 2024 - Les représentants du personnel d’Air Tahiti sont unis contre leurs organisations syndicales. Ils dénoncent le fait que le préavis de grève déposé le 10 août ait été fait sans concertation avec eux. “On n’utilise pas un outil de travail qui fonctionne (…) pour régler un problème annexe”, disent-ils. Ils annoncent d’ores et déjà qu’il n’y aura pas de grève au sein de leur entreprise alors que la grève doit prendre effet ce vendredi matin.     
 
Les représentants du personnel d’Air Tahiti sont montés au créneau pour dénoncer le manque de transparence des organisations syndicales quant au dépôt d’un préavis au sein de leur société, le 10 août dernier, et ce sans concertation avec eux. Et aussi pour annoncer qu’ils ne suivront pas ce mouvement social, qui doit prendre effet ce vendredi à 0 heure.
 
Tous regrettent avoir appris cette nouvelle “comme tout le monde (…) par la presse”, assure la déléguée du syndicat du personnel naviguant commercial d’Air Tahiti (Spencat), Titaina Viriamu. Elle se dit même “choquée” car “aucune concertation” ou “discussion” n’a eu lieu avec eux avant le dépôt du préavis.
 
“On reçoit cela en pleine figure et j’apprends aussi qu’ADT est au courant. C’est inadmissible”, explique Caroline Gooding, démissionnaire en tant que déléguée syndicale et que membre du CE de la CSIP. “Nous ne cautionnons pas ce genre de pratiques. Nous ne sommes pas des pions”, ajoute-t-elle. Elle rappelle d’ailleurs que la CSIP est “majoritaire” au sein d’Air Tahiti.

“Sans élus et sans employés, il n'y a plus de centrale et pas de subventions”

La déléguée syndicale du Spencat, Titaina Viriamu, dénonce les propos tenus par les secrétaires généraux des syndicats concernant notamment les représentants du personnel : “C’est de l’ingratitude et on n’accepte pas cela”. Elle souligne que si la CSIP est le syndicat “largement représentatif” au sein de l’entreprise, “c’est grâce à leur travail. Sans élus et sans employés, il n'y a plus de centrale et pas de subventions”.
 
Olivier Charles, pas syndiqué du tout, considère quant à lui cela comme étant “une forme d’ingérence politicienne que l’on n’a pas encore digérée”. Il rappelle d’ailleurs qu’aujourd’hui, leur compagnie n’est plus “dans un modèle monopolistique” avec l’arrivée notamment d’Air Moana, mais également de “la concurrence maritime”. Leur préoccupation première, rappelle Olivier Charles, est de sortir Air Tahiti “du rouge (…). Ce n’est pas eux qui font tourner Air Tahiti, ce sont les 1 600 employés, c’est nous qui portons Air Tahiti”. “ Il n’y aura pas grève dans cette société avec ces centrales qui essaient de faire du lobby en coulisse avec une petite minorité”, assure Olivier Jacques.

“On ne va pas poser les sacs”

De son côté, la déléguée syndicale du Spencat, Titaina Viriamu, assure : “On n’utilise pas un outil de travail qui fonctionne (…) pour régler un problème annexe. Même si c’est un coup de bluff  (…). On n’est pas des pions qu’on utilise sur un échiquier.” Elle rappelle qu’ils sont là pour “défendre” leur société, qui est une “grande famille qui nous fournit du travail (…). On essaie de garder nos emplois.”
 
Elle insiste néanmoins sur le fait que “cela ne veut pas dire que les points de revendications ne sont pas légitimes”. Mais les représentants du personnel préfèrent attendre les négociations annuelles obligatoires qui auront lieu en octobre prochain car “on a un directeur général qui ouvre le dialogue social”. Elle insiste également sur le fait qu’“aucun agent ne va faire la grève. On ne va pas poser les sacs”.
 
Caroline Gooding, ancienne déléguée syndicale de la CSIP, ajoute que chaque entreprise a son lot de problèmes et qu’Air Tahiti a également les siens, mais “on essaie de les résoudre petit à petit. Cela ne va pas se faire d’un claquement de doigt”.

“Pourquoi nous virer ? On n’a pas fait d’erreur, on est dans notre droit”

Interrogé sur une éventuelle éviction de son syndicat suite à cette protestation des représentants du personnel, le délégué de la CSTP-FO Terenui Mariassouce considère que “le mal est fait. Ils assument et nous on assume”. Il précise qu’il ne compte pas démissionner de son poste de délégué du personnel. “On n’est plus au Moyen-Âge, ce n'est plus le roi qui gouverne et qui décide de t’envoyer à la guillotine.” “Pourquoi nous virer, on n’a pas fait d’erreur, on est dans notre droit”, rappelle le jeune délégué syndical. Il affirme que si demain il est exclu de son syndicat, “j’espère que dans leur conscience, ils sont capables de m’expliquer pourquoi ils vont me virer”.
 
La déléguée syndicale du Spencat Titaina Viriamu estime qu’exclure les représentants du personnel serait “une bassesse car ils donnent leur opinion” et assure ne pas être “contre” les syndicats : “On a besoin d’eux”. Elle rappelle tout de même que ces organisations syndicales ont des élus au sein de leur entreprise, “il faut au moins concerter les élus et les respecter”.

“S’ils veulent s’en aller, ils sont libres”

Le 1er secrétaire général adjoint de la CSIP, Cyril Le Gayic, précise : “Je ne suis pas là pour virer (les représentants du personnel, NDLR), s’ils veulent quitter la confédération ils sont libres. Ils m’envoient leur lettre de démission et je prends acte.” Le syndicaliste regrette d’ailleurs qu’aucun représentant du personnel ne soit venu le voir à la sortie de la signature du protocole d’accord pour lui faire part de leurs griefs, excepté le représentant du syndicat autonome des techniciens. “On s’est retrouvé en face d’eux, on leur a demandé s’ils avaient des questions à nous poser et ils nous ont répondu que non et on est parti.” 

Rédigé par Vaite Urarii Pambrun le Jeudi 15 Août 2024 à 14:45 | Lu 3222 fois