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Nārua, le projet de l'UPF qui valait 1,33 milliard


Tahiti, le 18 août 2022 – Le projet Nārua, porté par l'Université de la Polynésie française, est lauréat de l'appel à projets “ExcellencES” du ministère de l'Enseignement supérieur et de la recherche. L'UPF recevra une enveloppe de 1,33 milliard de francs pour son déploiement. Ce projet est particulièrement axé sur la formation, avec une approche transdisciplinaire et une plus grande professionnalisation, pour mieux répondre aux besoins de la Polynésie.
 
L'Université de la Polynésie française (UPF) fait partie des 17 lauréats de l'appel à projets “ExcellencES” du 4e plan d'investissement d'avenir, lancé par le ministère français de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. L'université recevra donc une enveloppe de 1,33 milliard de Fcfp pour son projet baptisé Nārua, soit la totalité de la somme demandée. “Un message fort de la part du jury sur la pertinence du projet”, selon le président de l'UPF Patrick Capolsini.
 
Nārua, qui signifie navigation par les étoiles, est un projet sur huit ans “qui se veut ancré économiquement, socialement et culturellement dans son territoire”, indique le président de l'UPF. Celui-ci est fortement axé sur la formation, avec une approche transdisciplinaire. Les secteurs clés de l'économie polynésienne sont ciblés, à savoir les métiers de la mer, le tourisme et le développement durable, pour répondre aux défis auxquels sera confronté le fenua demain. La toute première licence transdisciplinaire sur les défis des territoires multi-insulaires et éloignés, “très orientée sur le développement durable et les enjeux de la transition”, sera d'ailleurs proposée dès la rentrée 2023. Parmi ses nombreux partenaires, l'UPF compte donc les organismes de recherche CNRS, Ifremer et IRD, mais aussi le centre des métiers de la mer ou encore le Cluster maritime, pour ne citer qu'eux. La formation qui sera dispensée à l'UPF se veut aussi beaucoup plus professionnalisante. Ainsi, la refonte de la carte de formations sera mise en œuvre à la rentrée 2024 et la quasi-totalité des licences sera professionnalisée avec plus de stages intégrés aux différents cursus.

L'UPF au cœur du Pacifique

Autre enjeu de ce projet : mieux intégrer l'Université de la Polynésie française dans le bassin Pacifique, en mettant en avant les langues et les cultures polynésiennes. L'UPF ambitionne notamment de devenir un campus trilingue (français, anglais et reo Tahiti). Des partenariats sont également développés avec des universités de Hawaii, Nouvelle-Zélande, Australie et Californie. L'UPF souhaite ainsi encourager la mobilité étudiante (déjà développée vers l'Europe avec le programme Erasmus) vers les pays du Pacifique. Les étudiants deviendraient alors des ambassadeurs pour faire rayonner la culture du fenua. Mais partir, c'est aussi pour mieux revenir. “Nous sommes un grain de sable au milieu de l'océan”, indique la ministre de l'Éducation Christelle Lehartel. “Il est bon pour nos étudiants de bouger, d'aller voir un peu ce qu'il se passe ailleurs, pour mieux revenir et mieux servir la Polynésie.” A contrario, cela permettra également aux étudiants qui le souhaitent de rester au fenua plutôt que de partir étudier en métropole ou à l'étranger, comme le souligne le vice-président étudiant de l'UPF, Hoanui Mariassouce : “Ça ouvre de nouvelles opportunités pour nos jeunes, qui leur permettront de ne pas partir à l'étranger pour apprendre des compétences qu'ils pourront acquérir ici et de rester sur leur territoire, chez eux, dans leur communauté polynésienne et dans leur communauté universitaire.”

Démarche participative

Pour répondre à cet appel à projets, l'UPF a voulu s'inscrire dans une démarche “très participative”. Ainsi, l'ensemble du personnel, qu'il s'agisse du corps enseignant ou administratif, ses différents partenaires, le gouvernement, mais aussi les étudiants eux-mêmes ont été invités à réfléchir sur quelle université ils souhaitaient à l'horizon 2030. Lors de la présentation du projet, jeudi, tous ont insisté sur le caractère “concret” de celui-ci. Car, comme le souligne la ministre de l'Éducation, qui s'est dit “très satisfaite” de ce partenariat, “nous avons tous un seul et même objectif : l'avenir de la jeunesse polynésienne”.

Patrick Capolsini, président de l'Université de la Polynésie française : “Préparer aux métiers de demain”

En quoi le projet Nārua aura-t-il un impact sur le développement polynésien ?

“On pense que former mieux et plus de jeunes pour répondre aux métiers de demain, c'est fondamental aujourd'hui. La Polynésie est tournée vers la mer et le tourisme, qui sont les sources de devises les plus importantes. Donc participer à ça, c'est fondamental.”
 
Pourquoi vouloir mettre en place cette transformation structurante ? Est-ce que l'université était en retard ?

“Non, je ne pense pas. Depuis des années, on se bagarre pour moderniser beaucoup de choses. Donc non, en retard, vraiment pas. En revanche, avoir de l'argent quand on veut avancer, c'est fondamental parce qu'on pourrait développer ce dont on a envie, mais ça nous prendrait quinze années pour vraiment mettre tout ça en place, alors que là, c'est un très gros coup de pouce à l'ensemble de nos projets.”
 
C'est quand même sur une durée assez longue, huit à dix ans…

“Tout à fait. Ça c'est sur le papier, mais le gros des actions sera mis en place sur les quatre à cinq premières années.”
 
Justement, quelles seront les priorités ?

“La première, c'est à la rentrée prochaine, en 2023. On va ouvrir une nouvelle licence pluridisciplinaire très orientée ‘développement durable’. Et ensuite, de manière un peu plus échelonnée, on professionnalisera quasiment l'ensemble de nos licences.”
 
Vous avez voulu inclure dans la démarche de nombreux partenaires, mais aussi les étudiants. C'était important qu'ils prennent part au projet ?

“C'est fondamental, car c'est à eux que ça s'adresse. Ce qui est ressorti, c'est de mieux les préparer aux métiers de demain, mieux les préparer à avoir un métier en sortie de licence ou mieux s'inscrire dans des masters pour ceux qui veulent continuer.”
 
Un des axes importants, c'est l'intégration de l'université dans le bassin Pacifique ?

“Le constat est un peu un constat d'absence de l'UPF sur son domaine d'influence qui devrait être le bassin Pacifique Sud. Donc on a des universités partenaires en Nouvelle-Zélande, en Australie, à Hawaii, de manière à s'inscrire pleinement sur ce triangle polynésien un peu élargi, par les langues, par la culture, et en faire une destination privilégiée pour les stages de nos étudiants.”
 
Il y a aussi un volet sur la formation tout au long de la vie. La reconversion professionnelle est-elle de plus en plus fréquente et est-ce que cela veut dire que les étudiants sont mal orientés au départ ?

“La formation tout au long de la vie, ça s'adresse plutôt aux gens qui sont en milieu de carrière et qui souhaitent soit se réorienter –ça arrive–, mais surtout, le plus souvent, c'est progresser dans leur domaine de compétences. Ce sont des gens qui ont besoin d'être formés. Ça doit se faire dans le cadre de leur travail, en horaires du soir ou avec des cours dématérialisés. C'est un public qui est très particulier ; mais c'est un public qui est très intéressant, et qui est très demandeur.”

Rédigé par Anne-Laure Guffroy le Jeudi 18 Août 2022 à 17:32 | Lu 2684 fois