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Matari'i i ni'a, une première à Paea


Tahiti le 28 novembre 2021 – Samedi, la commune de Paea a célébré Matari'i i ni'a pour la première fois au square Benjamin Bambridge. La cérémonie du 'ava a été officiée par une habitante de Paea âgée de seulement 21 ans.
 
La commune de Paea a célébré samedi Matari'i i i ni'a pour la première fois. Grâce à l'association Proscience, sa population avait pu profiter depuis plusieurs jours du planétarium installé dans la salle Manu iti pour voir virtuellement les Pléiades. Ce week-end la cérémonie a été préparée par une association culturelle de Paea. Les habitants venus timidement ont suivi cette célébration avec beaucoup d'intérêt. La cérémonie a débuté par une prière, suivie d'un 'ōrero puis des discours d'Antony Géros maire de Paea, de Sonia Punua maire de Papara et d'Yves Doudoute, venu avec l'association Haururu qu'il préside. Une fête rythmée par des chants traditionnels et un spectacle de 'ori tahiti.
 
Du haut de ses 21 ans

À la tombée de la nuit, après les spectacles de chants et de danse, un unu dressé au milieu des officiels a été dévoilé au public. Le unu est une planche de bois sculpté tel un totem, c'est une représentation du tāura (animal protecteur) d'une famille. Le unu est dressé pour que les dieux puissent s'y poser, afin de les remercier du retour de Matari'i i ni'a. Puis les officiels ont été invités à la cérémonie du 'ava. C'est Te Rā Hauata, jeune habitante de Paea, âgée de seulement 21 ans, qui était metua 'ava (la maîtresse de cérémonie du 'ava). C'est à l'âge de six ans que Te Rā, poussée par son père, a commencé sa formation en tant que metua 'ava auprès de Yasmina Teriitaumihau, ancienne présidente de l'association Haururu en 2006. Le metua 'ava est celui qui dirige la cérémonie du 'ava. Pour préparer la cérémonie, du jus de racines écrasées est mélangé à de l'eau. La boisson réunit ainsi l'élément terrestre où vivent les hommes à l'élément céleste, l'eau, où résident les dieux. Puis avant de servir le 'ava, Te Rā doit se présenter en récitant sa généalogie. Pour elle, ce sont 18 générations apprises par cœur. Selon Te Rā, il est encore possible que les jeunes se réapproprient leur identité culturelle mais en l'adaptant à notre époque. "Voilà le temps a changé, il faut vivre avec son temps", explique-t-elle. Un grand feu a été allumé en bord de mer en hommage à Pere, déesse du feu. L'assistance pouvait alors y jeter des branches de miri ou de toute autre plante odorante afin de demander aux dieux de porter cette offrande à Pere, partie de Tahiti vers Hawaii. La cérémonie s'est clôturée aux alentours de 20 heures. Le public a été invité à faire une offrande à la mer en mettant du feu dans des noix de coco posées sur l'eau, puis à partager un mā'a tahiti. 
 
Pérenniser
 
Le maire de Paea souhaite pérenniser cet évènement et demander au ministre de l'Education, Christelle Lehartel, qu'un rendez-vous annuel soit fixé pour que toutes les écoles de Paea puissent se rassembler afin de célébrer Matari'i i ni'a. "Pour que nos enfants participent de plus en plus à ce qui fait leur identité, et n'en soient plus simplement spectateurs", a déclaré Antony Géros.

Yves Doudoute, président de Haururu : "Que l'on réapprenne à vivre au rythme de la nature"

"Je suis content de la célébration de Matari'i i ni'a à Paea. Peut-être que les gens commencent à prendre conscience de l'importance de ce calendrier qui était suivi par nos tupuna : matari'i i ni'a et matari'i i raro. Un peuple qui ne suit pas son propre calendrier ne peut vivre convenablement, parce qu'il est lié à sa propre nature, à ses propres croyances. Et donc c'est le temps qui guide les hommes. Je constate maintenant que Matari'i est célébré dans certaines communes. Et nous insistons pour que les dirigeants considèrent Matari'i. Il faut une bonne fois pour toute que l'on réapprenne à vivre au rythme de la nature, et à gérer nos ressources. Il est temps que nous sachions qui nous sommes, d'où nous venons, non pas pour revenir en arrière, mais pour avancer ensemble dans la bonne direction. Il faut savoir aussi que Matari'i i ni'a était bien plus que le début de la saison d'abondance. C'était le temps où nos tupuna décidaient d'arrêter de faire la guerre, car c'est une période de fête avant tout, un temps de paix."
 

Rédigé par Areatua Parau le Dimanche 28 Novembre 2021 à 14:57 | Lu 1143 fois