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Mariage pour tous : les députés oranges sont contre et le font savoir


Le député Edouard Fritch, mardi lors de la conférence de presse.
Le député Edouard Fritch, mardi lors de la conférence de presse.
PAPEETE, mardi 12 février 2013 – Alors que quelques heures auparavant, l'Assemblée nationale disait sans surprise "oui" au mariage pour tous par 329 députés pour et 229 contre, les députés Tahoeraa Huiraatira, Edouard Fritch et Jean-Paul Tuaiva, ont exposé à la presse, en milieu de matinée, les raisons de l’opposition du parti orange à ce projet de loi.

Premier baroud parlementaire, Jean-Paul Tuaiva n’a pas manqué de rappeler en préambule le fait d’arme : "11 jours, 24 séances, quasiment 110 heures de travaux et le dépôt de 4.999 amendements. Je peux vous dire que les nuits étaient longues".

Sur le fond, les députés ont exposé des motivations de trois ordre : politique, éthique et sociétale. Ils préférent l'application en Polynésie du Pacte civil de solidarité, le Pacs. Des aménagements législatifs ont été demandés dans ce sens au Garde des sceaux, Christiane Taubira, pour rendre valable ce contrat sur le territoire "avant la fin de l'année", pronostique Edouard Fritch.

Concernant le projet de loi, la première cause d'opposition au mariage pour tous est d'ordre politique, par respect de l’avis de la base électorale du Tahoeraa. Cet aménagement législatif concerne un acte civil reconnaissant l’union entre deux personnes du même sexe. "J’ai voté contre parce que je suis titulaire d’un mandat venant d’une population qui ne souhaite pas. C’était notre thème de campagne aux présidentielles : on a tapé sur Hollande avec ça. (…)"

Deuxième raison : la crainte d’un engrenage. Et notamment celle de l’introduction prochaine des notions de Procréation médicalement assistée (PMA) et de Gestation pour autrui (GPA), qui sont étrangères au périmètre législatif actuellement débattu au Parlement, mais qui pourraient poindre en avril lors des débats relatifs à la projet de loi sur la famille. "Nous sommes très inquiets", a commenté le député Edouard Fritch, "La PMA et la GPA vont arriver d’ici la fin de l’année. Le débat aura lieu à l’Assemblée nationale. C’est un engagement du Président de la République : il ira jusqu’au bout. (…) Aujourd’hui, c’est l’explication qui est tendancieuse : on nous parle d’égalité. Les couples homosexuels réclament la filiation. Il faudra bien leur donner les moyens d’avoir des enfants. Et c’est là que la PMA et la GPA viennent polluer le débat en séance. Et c’est bien normal : lorsqu’on parle de filiation il faudra bien qu’il y ait quelque part un enfant".

Troisième raison : la société polynésienne n’est pas prête. "Moi ce qui m’embête, c’est que dans cette loi, les notions de père et de mère disparaissent. Et là je ne suis pas certain qu’en Polynésie française on soit prêt à accepter cela : qu’un enfant demain ait deux papas ou deux mamans.", a insisté Edouard Fritch.
Jean-Paul Tuaiva, a plaidé pour "un autre rythme que la métropole", estimant plus "judicieux" d'appliquer d'abord le Pacte civil de solidarité. Relevant du droit des contrats, le Pacs n'a pas été transposé en Polynésie. Alors que si la loi sur le mariage homosexuel est adoptée, elle s'appliquerait de fait car elle relève du droit des personnes.

"On a tout de même l’impression qu’en métropole, on ne veut pas entendre les particularités culturelles de nos collectivités d’outre-mer. (…) Imposer un acte de ce type à la Polynésie française, pour nous se sera perçu – en tous les cas pour les indépendantistes – comme un acte néocolonialiste", a rappelé le député Fritch.

Pour ce projet de loi, la parole est désormais au Sénat, où le débat débutera le 2 avril. Il devrait durer une dizaine de jours.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mardi 12 Février 2013 à 15:23 | Lu 1661 fois