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Loi fiscale : retour vers le futur


Tahiti, le 11 avril 2024 - Le gouvernement a fait le choix d'amender sa loi fiscale en décidant tout simplement d'acter la rétroactivité de son texte à compter du 15 décembre dernier. Rien à rembourser, rien à réclamer sur les trois premiers mois de l'année. C'est plus simple comptablement. Juridiquement en revanche, c'est une autre affaire et un nouveau recours, sur le fond cette fois, est à craindre.
 
 
On efface tout et on recommence. C'est en substance ce que propose le ministre de l'Économie, Tevaiti Pomare, qui est arrivé avec un amendement long comme le bras ce jeudi en séance de l'assemblée pour modifier sa loi fiscale tant controversée. Un amendement qui vient en fait tout simplement rendre applicables les dispositions du texte fiscal rétroactivement à compter du... 15 décembre 2023.
 
“On voyage beaucoup dans le temps”, ironise d'ailleurs l'élue du Tapura Huiraatira Tepuaraurii Teriitahi qui, plus sérieusement, s'inquiète de la suite. D'abord parce que le Conseil d'État a déjà sanctionné ce texte une première fois sur la forme, et qu'il pourrait à nouveau le retoquer sur le fond. Si l'opposition, ou “la minorité" comme préfère la qualifier le président Brotherson, n'a pas encore acté sa décision de saisir la haute juridiction administrative, ce n'est pas exclu – loin de là – et d'autres pourraient le faire. Ensuite parce que cela aurait, là encore, un impact budgétaire.
 
En effet, en présentant son amendement, le ministre de l'Économie a détaillé les droits et taxes à réclamer et ceux à rembourser du fait des effets à l'annulation de la loi fiscale par le Conseil d'État : 343,7 millions de francs à réclamer et 154,4 millions à rembourser. Et si un nouveau recours est effectivement déposé, ces sommes “seront à multiplier par deux dans trois mois”, prédit Tepuaraurii Teriitahi.
 
Même son de cloche du côté de Ahip qui a regretté, par la voix de Nicole Sanquer, que les bonnes intentions de concertation affichées le matin dans le discours du président Brotherson ne se soient pas traduites l'après-midi lors de l'examen de ce texte. “On vous propose des amendements mais vous rejetez tout”, a-t-elle ainsi tancé, pointant du doigt les élus de la majorité qui votent comme un seul homme “contre” l'intérêt des Polynésiens sans même avoir “réellement lu les amendements” présentés. Du côté du Tavini justement, si les 38 élus ont fait bloc et ont voté en faveur de ce texte modifié, la représentante Hinamoeura Cross s'est montrée plus réservée. Juriste de formation elle s'est même dit “inquiète” de l'amendement proposé par le ministre et voté par la majorité dont elle fait partie. Rendez-vous en juillet, autrement dit d'ici trois mois, après la décision du Conseil d'État si un nouveau recours est déposé.

Rédigé par Stéphanie Delorme le Jeudi 11 Avril 2024 à 20:16 | Lu 3758 fois