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Les contenus illégaux sur internet, une lutte ardue


LILLE, 23 janvier 2014 (AFP) - Images pédopornographiques, jeux illégaux en ligne, tweets racistes ou homophobes: les contenus illicites prospèrent sur internet mais malgré l'inquiétude qu'ils suscitent, les enquêteurs peinent à dissuader les cyber-délinquants.

Un indice de cette propagation et de l'envie de modération des internautes, le nombre en hausse des contenus illégaux recensés par la plateforme de signalement Pharos (www.internet-signalement.gouv.fr), qui est passé de 78.000 en 2010 à 123.987 en 2013.

La surenchère de messages antisémites et racistes postés sur Twitter en octobre 2012 à partir du hashtag #unbonjuif et la forte audience des vidéos de Dieudonné, interdit de spectacle pour avoir tenu des propos ouvertement antisémites sur scène, ont mis en évidence la difficulté de réagir efficacement contre ce racisme 2.0.

D'autant que les contenus illégaux sont légion. Du sac Chanel aux drogues de synthèse, en passant par du faux Viagra jusqu'à la dernière saison piratée de Homeland, la Toile regorge de sites illégaux, qui vont jusqu'à garantir l'anonymat de l'acheteur grâce à des logiciels pour compliquer la tâche des enquêteurs.

Le cyber-délinquant peut également se cacher sous les traits d'une connaissance pour ternir la réputation d'une camarade qui s'est dénudée ou proférer des menaces qui peuvent aller jusqu'à la provocation au suicide. Des atteintes à la réputation qui touchent en priorité les jeunes.

"Dans le cas où l'auteur est connu, et a fortiori s'il est mineur, une convocation au commissariat suffit à arrêter le harcèlement et le fichier est retiré après médiation", explique Jean-François Masselis, directeur d'un service intercommunal d'aide aux victimes et de médiation (SIAVIC). "Encore faut-il que les victimes déposent plainte", ajoute-t-il, en marge du Forum international de la cybersécurité (FIC).

Responsabilité collective

Lorsque l'auteur se cache sous un pseudonyme, les poursuites judiciaires se compliquent. "Le recours à la procédure civile est impossible, il faut alors se tourner vers le pénal, le ministère public ayant les moyens de découvrir les auteurs", déclare l'avocate Corinne Thiérache.

"Le problème, c'est que les hébergeurs, souvent domiciliés à l'étranger, refusent de répondre aux réquisitions des enquêteurs et qu'on ne va pas lancer une commission rogatoire à tout bout de champ", résume le colonel Eric Freyssinet, chef de la division de lutte contre la cybercriminalité de la gendarmerie nationale.

De plus, une infraction en France ne l'est pas forcément dans un autre pays, à l'instar des propos racistes condamnés en France et autorisés aux Etats-Unis, où la liberté d'expression est totale. Le problème se pose aussi dans la lutte contre les drogues de synthèse qui ne sont pas classées comme stupéfiants partout.

"Une coopération internationale est cruciale, avec en ligne de mire l'harmonisation des infractions", estime Patrick Pégeot, chargé de mission à la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILTD).

Policiers, gendarmes et des autorités administratives comme l'Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel) obtiennent chaque année la fermeture de dizaines de sites hébergeant des contenus illégaux. Mais à chaque fermeture, la tête de l'hydre repousse.

"Il ne faut pas tout judiciariser. Ce n'est pas aux gendarmes et aux policiers de régler le problème des contenus illicites, c'est un problème collectif", estime le colonel Freyssinet.

Pour Me Thiérache, "les gros hébergeurs se sentent de plus en plus responsables de leurs contenus".

Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls a d'ailleurs salué mardi les engagements pris par Twitter pour lutter contre les messages racistes. Selon lui, le réseau social s'est engagé à supprimer l'affichage des contenus prohibés par la France et à communiquer les données sur simple réquisition dans les affaires d'une particulière gravité.

Rédigé par () le Jeudi 23 Janvier 2014 à 06:13 | Lu 234 fois